C'est un chasseur et un voleur qui entrent dans un bar [SEBASTIAN FIGUERAO]

On est déjà en 106 ADD, putain ! Le temps passe vite quand on s'amuse, hé.

Il y a 5 ans, j'entrais dans le bar de Miss RedPantyhose. Peu de temps après, je deviens le videur.

Il y a moins de 4 ans, je perd mon bras en sauvant les belles miches de la patronne. Mais en échange je gagne son affection, son boule, et le surnom de "Chasseur de Pirates" à Port-Salem...Et ça, ça pète le style !

Depuis, je suis le "Garde du corps-Videur-Bras droit-Mercenaire" attitré de ce sacré bout de femme.
J'ai tout fait pour elle : surveiller son bar, assurer sa sécurité en ville ou pendant des rendez-vous d'affaires, intimider voire menacer des petites frappes locales, traquer des pirates un peu trop "gênants" pour son business, la représenter auprès d'autres de ses associés quand elle pouvait pas venir.
Hé, elle m'a même envoyer chez une amie à elle pour que je la "réconforte de la manière qu'elle désire"...15 ans de service dans les FFUC et j'ai dû faire le gigolo pour une Mo'At en deuil.

Je regrette pas, c'était sympa.

Enfin bon. Ce soir, c'est surveillance de l'établissement.
Miss RedPantyhose doit recevoir un "collaborateur" ou un truc du genre. Un blanc-bec de 10 ans mon cadet qui est monté s'entretenir avec elle il y a déjà 3 heures.
L'accord à négocier doit vraiment être important pour que ça dure autant...Ou alors ils baisent depuis une heure...Mais ça m'étonnerait d'elle, c'est pas une fille facile !

Je dois ouvrir l'oeil : il commence à y avoir de l'agitation. Donner de l'alcool à des idiots et ça risque à tout moment de déraper. Vivement. J'ai hâte de me bastonner. J'ai pas eu l'occasion depuis hier avec ce pirate borgne.

Ah, voilà le blanc-bec qui descend les escaliers.
Ce sourire niais ça veut dire qu'il n'a pas pu résister à la "force de persuasion" de la patronne, comme elle adore l'appeler. Moi personnellement, je dit "nichons" mais bon.

Argh, maintenant ça m'intrigue. Ils ont foutu quoi là-haut ? Faut que je lui demande.

Il semble se diriger vers le bar.
Tant mieux. J'ai soif.

Et je préfèrerai boire une bonne bière avant que les autres poivrôts ne s'emportent trop. En les gardant à l'oeil, je m'approche de ce type. Il me tourne le dos. Parfait, j'adore faire sursauter les petites natures...

Entre ma bière, la baston qui s'annonce et ce glandu, je sens que cette soirée va vite m'amuser !

Depuis que le vieux m'a jugé digne de reprendre son réseau, j'enchaîne les rencontres à travers tout le système : les gens doivent imprimer qui reprend les rênes de son business... Être sur Hope n'avait jamais empêché mon mentor de refourguer sa came aux quatres coins du système, et Port Salem ne faisait pas exception. J'avais jamais vraiment aimé ce port,  mais l'ancien tenait à ce que je rencontre celle qu'il appelait "la seule femme de sa vie".

Il m'avait fallu, quoi... Une minute avec la soixantenaire pour comprendre l'intérêt de l'ancêtre ? C'est simple : la profondeur de son décolleté frôlait le vide intersidéral. Sachant cela, il n'y avait alors plus rien d'étonnant à ce qu'elle fasse partie des privilégiés. L'ancêtre avait toujours eu un faible pour les charmes féminins...

C'est comme ça que je suis enfin descendu, la bouche sèche d'avoir trop parlé, après avoir passé trois bonnes heures en tête à tête avec elle, à jouer au fameux jeux de "celui qui baisse les yeux le premier a perdu". Autant dire que le verre qui m'attendait au comptoir a fait le plus grand bien. Au point de ne remarquer qu'au dernier moment le type qui s'était approché de moi par derrière.
Un seul coup d'œil à sa silhouette massive faillit me faire recracher ma putain de boisson par le nez. Oxtorn ?! LE Oxtorn ?! Reste calme, Seb. Si tu pars en courant, c'est mort...

Je me retourne avec un sourire... Peut-être trop crispé ?

Salut. Tu cherches un truc, l'ami ?

- Ha ha ha ha. Ah j'adore quand ils font ça !

Je m'assois sur un tabouret et fais signe au barman.

- Comme d'hab, Billy.

Tandis qu'il me prépare ma bière, je regarde un peu plus en détail le blanc-bec.

Alors, voyons voir...Des yeux jaunes, c'est pas banal. Je peux deviner les dérouillées qu'il s'est mangé rien qu'en regardant son pif. Des fringues de bureaucrate, mais il a un genre d'énergie qui se dégage de lui.

Je sais pas, je le trouve sympa, à première vue.

À première vue.

Vu le temps passé avec Miss Redpantyhose, ça doit être un sacré gros bonnet. Je devrais éviter d'embarrasser la patronne, alors commençons par une introduction cordiale et professionnelle.

- Bonsoir. Je m'excuse pour avant, ça me fait marrer de surprendre les nouveaux venus. Faut dire que je passe pas inaperçu. Enfin bref, je m'appelle Steve Oxtorn. Je suis le bras droit de Miss Redp- de la patronne.

Je lui tend la main droite - l'organique - dans l'attente d'une poignée de main virile. Mais je n'ai pas beaucoup d'espoir avec lui. Je risque plus de lui briser la main. Mais quand même, son nez me dit qu'il sait se défendre...J'aimerai bien voir comment il s'en sortirait dans un combat.

Qui sait ? Peut-être que ce soir...

- Dis voir. Ton pif, comment tu l'as mis dans cette état ? Simple curiosité.

Son ton franc m'arrache un sourire alors que j'accepte sa main tendue. Quel vieux sadique.

Enchanté, Steve. Moi c'est Belamy. Nouvel associé de... La patronne.

Oh bordel ! Ce con me broie consciencieusement les phalanges ! Quand j'arrive à retirer ce qu'il me reste de doigts de sa grosse paluche, je m'exhorte au calme. Ah, il veut jouer à qui a la plus grosse ? Cool. Cool, cool, cool... J'ai grandi avec des pirates et ces derniers faisaient bien ton calibre, vieux schnoque.

Ah, ça ? On peut dire que c'est le résultat d'une combinaison subtile entre la meilleure éducation du monde et ma fâcheuse tendance à accueillir mes amis à coups de poings dans la gueule. Tradition familiale. J'ai jamais compris pourquoi ils n'appréciaient pas.

J'aime pas trop sa façon de me dévisager comme si j'étais son prochain repas, mais je garde le sourire malgré tout.

C'est vous, le Oxtorn qui a défoncé ce connard et ses hommes ? Sympa, ce que vous avez fait pour le bar... et pour la patronne !

Allez, soyons honnête : difficile de pas respecter un type pareil. ça me donne envie d'en savoir plus...

Et votre bras, il vient d'où ?

La meilleure éducation du monde ? hé hé hé hé, je l'aime bien, celui-là.

- On viens sûrement pas du même monde, mais je crois que nos traditions sont proches. Frapper des gens, c'est un peu ma raison de vivre...Pas vous ?

J'aimerai beaucoup l'affronter, je me demande ce qu'il vaut...Mais une autre fois. Je ne voudrais pas ruiner un deal qu'a signé la patronne avec lui.

- Celui-là même. Mais vous pouvez m'appeler le "Chasseur de Pirates". C'est mon p'tit nom en ville. Quand des enfants me croisent, ils m'appellent comme ça, et puis les mamies me serrent la main en me remerciant pour ce que je fais...

"Ce connard" ? D'habitude quand on me demande, les gens disent "le pirate" ou "le groupe de pirates", alors pourquoi cette précision ? Il le connaissait ? Hmmm...Naaaan, ce ne sera pas...

- Ah, mon bras. Ma plus grande fierté. C'est le chef des 6 pirates qui ont attaqué le bar il y a 4 ans qui me l'a coupé. J'ai plongé devant la patronne pour prendre le coup de sabre à sa place. Tranché net. Mais il a baissé sa garde, et je lui ai calé une belle cartouche entre les yeux avant de toucher le sol. Une vraie raclure, mais je le connaissais pas assez pour dire que c'était un connard...Et toi, Nosebroke, tu le connaissais ?

J'éclate de rire. Ouais, il a une tête à frapper des gens, c'est clair. Dans le type armoire à glace, la largeur de ses épaules le pose là.

Oh, pas du tout ! Après, je ne dis pas que ça ne détend pas... C'est juste mauvais pour les affaires en général. Je vous laisse volontiers ma part de crânes à défoncer. Encore que... Avec un surnom pareil, vous devez forcément être un grand philanthrope, au fond. A Steve Oxtorn ! Grand défenseur de la veuve et de l'orphelin !

Et à moi de finir mon verre d'un trait. Encore une fois ce franc parler qui va droit au but. C'est rare et je ne peux pas dire que ça me déplaise.

Désolé pour votre bras, mais bordel, ça devait être magistral, ris-je en louchant vers son bras. Bel ouvrage... Fin c'est ce que je dirais si j'y connaissais quelque chose...

Et je l'ai jamais rencontré en personne. Mais mon boss, en revanche... Disons qu'il me l'a décrit comme le genre de gars spécialisé dans le foutage de merde. Le genre à faire fuir les clients. Et ça me suffit pour dire que c'était un connard.

Je fais signe à Billy de me remettre un verre. "Nosebroke", hein ?

D'ailleurs, ça m'étonne qu'il ne vous ait pas envoyé des fleurs. C'est un fervent admirateur de...

Un signe évocateur du menton vers l'escalier complète ma phrase.

Rajoutez-le à la liste de vos adorateurs secrets, "Steve le preux" ! ça vaut bien une grand-mère.

Mon rire tonitruant résonne dans tout le bar.

Le genre de rire qui rassure instantanément les barmans et les serveuses. Si Steve rigole, c'est que tout va bien !

- Si des fleurs sont arrivés ici ? Presque tous les mois, Miss RedPantyhose me demande de terroriser le pauvre puceau chargé de les lui apporter. Elle dit qu'elle est allergique mais je connais la vérité : elle DETESTE les fleurs !

Billy lui ramène un verre. J'en profite pour lui filer ma bière vide et lui demander une autre.

- Un traumatisme lié à l'enfance, un truc comme ça. Elle m'en a parlé une fois, mais j'écoutais pas. Trop concentré sur ses...arguments, hé. Même sans dire un mot, elle sait se montré convaincante, pas vrai ?

L'agitation a diminué, mais restons vigilant. Elle pourrait remonter.

- Et sinon, si je peux poser la question, t'as parlé de quoi avec Madame ? Simple curiosité professionnelle, j'aimerai juste savoir avec qui je vais devoir composer à l'avenir. En tant que bras droit de la patronne, je crois que je dois être mis au courant de certains trucs, non ?

J'ai le sentiment que, d'une manière ou d'une autre, on va finir par se mettre sur la gueule. Ce serait préférable que non, mais je ne me fais pas d'illusion. Ce beau gosse cache bien son jeu, mais sa façon de parler me rappelle celle de certains pirates...Est-ce qu'il m'a dit le nom de son boss ?

Mon rire se joint au sien, beaucoup trop communicatif, au point de rendre la consommation de mon tout nouveau verre absolument impossible.

Oh merde ! Miss RedPantyhose ?! Dis-moi que j'ai le droit de l'appeler comme ça aussi, je t'en prie... ça lui va beaucoup trop bien pour rester ignoré du grand public !

Je parlais du surnom. Pas des collants. J'espère avoir été clair. Une fois la crise de rire passée, j'efface de mon imagination les (nombreuses) images de la patronne en sous-vêtements qui viennent y danser en me concentrant sur mon verre et sur la question de Steve.

Oh ! J'imagine que ça ne peut pas faire de mal, oui. J'suis juste là pour faire connaissance avec ta patronne, c'est tout. Mon boss lui fournit des marchandises spécifiques, introuvables à des prix honnêtes sur le marché... Et je reprends son business.

Dame ! Ses yeux sont toujours ceux d'un prédateur et je le sens attentif. "Miss RedPantyhose" a bien choisi son chien de garde...

La réponse me permet de rentrer chez moi avec toutes mes dents ? Le nez est foutu, mais le reste j'y tiens.

Derrière moi, j'entends des voix qui grondent. Un type rit trop fort. Ses potes n'ont pas l'air d'aimer...

- À moins que tu me dises que t'es un pirate recherché, j'ai aucune raison de te péter les dents, héhé.

En fait, si, j'ai TRES envie de lui refaire le portrait. Mais c'est pas contre lui, c'est juste que je veux me défouler, et je m'interroge de plus en plus sur cette demi-portion et son attitude d'ex-pirate qui fait profil bas...
M'enfin, je me fais sûrement des idées...

- C'te réponse me suffira, j'ai pas besoin de connaitre tous les détails non plus, hein ? Allez, portons un toast pour fêter ce partenariat.

Je me lève, me dirige vers le comptoir et active les haut-parleurs. Je les relie à mon Hcom avant de dire :

- Hého tout le monde ! Je souhaite porter un toast en l'honneur de notre bien-aimée Miss RedPantyhose. Levons nos verres à sa bonté

les autres répètent "À sa bonté !"

- À son alcool !

"À son alcool !"

- À ses collants !

"À ses collants !"

- Et surtout...Célébrons tous ensemble ce cadeau que sont ses décolletés plongeants ! Wouhou !!!

"À ses nichons ! Hahaha !"

Même les serveuses se sont pris au jeu...Les gens d'ici sont vraiment fun à côtoyer. Je m'ennuie jamais ici, bon sang.

Je retourne m'asseoir près de Nosebroke.

- Ah. Je sais pas si c'est la bière ou ta tronche, mais j'avais vraiment envie de faire ça.

Ah ! Le volume monte dans le fond ! Ça va pas tarder. Peut-être dans une ou deux bières, mais ce sera dans pas longtemps, héhéhé !

Je me demande jusqu'à quel degré l'homme, que je suis en train de regarder en souriant alors qu'il harangue les clients du bar, est impliqué dans les affaires de sa patronne. Bien sûr, elle n'a rien d'une sainte, ça se voit... Sans oublier que mes petites recherches m'ont prouvé que j'étais loin d'être le seul fixer à lui faire les yeux doux. Mais de là à la menacer de couper les ponts comme me l'avait suggéré le vieux ? Non. J'étais pas allé jusque là. Un contact à Port Salem pouvait avoir son intérêt, surtout dans un bar comme celui-ci. Et puis, si je l'avais écouté, j'aurais probablement sorti mon arme pour lui faire peur... Et je me serais heurté à Oxtorn. Bonne chose que mon sens des affaires soit ce qu'il est. Et que le vieux soit près de la retraite.

Levant mon verre et joignant ma voix à celle des autres, j'acclame ma nouvelle cliente. Puis j'applaudis Steve d'un air moqueur alors qu'il retourne à son verre.

Wouuuuh ! Bravo ! Simple, efficace, concis... J'adore.

Sa harangue a enflammé les clients, qui commencent à entamer des chants paillards en l'honneur de Miss RedPantyhose. Le dos tourné au comptoir, je les observe avec un grand sourire.

Avec tout le respect que je dois à ta patronne... Putain, ouais, ça c'était du décolleté !

- Hé, un peu de respect, blanc-bec ! C'est de ma patronne que tu parles !

Je lève mon poing devant son nez rafistolé d'un air menaçant, prêt à lui écraser sa tronche contre le comptoir.
Avant de l'abaisser tranquillement et de m'accouder contre le bar.

- Nan j'avoue c'est un sacré coup. Et puis, faut la voir à l'oeuvre, mon gars. ÇA c'est du service client, moi je te le dis hé hé !

Quelques poivrôts me dévisagent après avoir entendu ma dernière phrase. Après un clin d'oeil de ma part, ils retournent entonner des chants grivois, typiques des pirates et des marins.

- Héhé, c'est marrant. Avant de bosser ici, j'avais jamais entendu ce genre de chanson. Dans l'UC, on chantait pas des trucs comme ça. Mes supérieurs ont toujours été trop stricts vis-à-vis de ce genre de choses. Ça faisait pas "sérieux", hé.

J'avale d'une traite ma bouteille, la pause à coté de moi et je m'en prends une autre derrière le comptoir. Un regard échangé avec Billy et le problème est réglé.

En parlant de problème...J'en vois plusieurs qui commencent à s'échauffer. Ça devrait plus trop tarder.
Dans le doute, j'active mon bouclier personnel. J'en profite aussi pour vérifier si ma machette et mon flingue sont bien sur moi.

C'est bon.

Je déploie ma garde mono-filament, au cas où elle serait grippée. R.A.S.
Je fais tout ça devant Nosebroke, mais je m'en fous.

- Pardon, je me prépare pour la suite de la soirée, c'est tout...

Impossible de prendre sérieusement un type qui appelle sa patronne Miss RedPantyhose et porte des toasts à ses sous-vêtements lorsqu'il râle qu'on l'insulte.

Quoi ?! Mais c'est le charme du coin, ces chants-là ! Le folklore ! La culture !

Qui conte l'histoire d'une Trinitaire et d'un navet gros comme un bras qui disparaît quand on s'asseoit dessus, mais culture quand même. J'ai grandi dedans, non mais oh !

Encore deux verres et je refais ton éducation. Militaire ou pas militaire, va falloir corriger des trucs si tu veux faire partie du décor !

Zut, mon verre est vide... Et Steve... Sors ses armes ?!

Malgré ma surprise je ne peux pas m'empêcher de siffler entre mes dents tout en portant la main à la mienne. Bordel, ça c'est de la belle arme ! Un poil rustique, mais... Dame ! Respect !

Sympa ton arme. T'es sûr que ça fait partie de l'équipement militaire de base ?

Ah oui, "la suite de la soirée", hein ?

Du grabuge de prévu..?

Soit je fous le camp maintenant, soit je reste et je suis l'autre armoire à glace dans ce qui semble être pour lui la meilleure façon de passer une soirée... Meh... Allez, il est temps de se faire bien voir par mes nouveaux contacts de Port Salem. Strip-tease improvisé, je me débarrasse calmement de ma veste et la pose sur le comptoir tout en scrutant la salle.

Lesquels, Monsieur Oxtorn ?

- Ça va faire 5 ans que j'ai quitté l'UC pour venir ici. Cette machette est loin d'être conforme aux normes corporatistes, mais elle m'a sauvé les miches plus d'une fois. Mon flingue, lui, c'est un modèle de l'armée...Et t'as pas encore vu ma plus belle pièce.

Je me penche par-dessus le comptoir pour vérifier si mon fusil à accumulation est toujours dans sa cachette.
Ok, il est en place pour les cas d'urgence.
Tout est en ordre.

- Du grabuge. Non, rien de bien méchant, juste des...

Voilà, ça commence. Les ivrognes pelotent les serveuses. Elles les giflent. Ils s'énervent. Les moins torchés tentent de calmer le jeu, mais en fait l'aggravent. Scénario habituel.

- ...énergumènes qui manquent d'éducation. J'ai connu pire, hé.

Et c'est à ce moment là que j'interviens !

Oh, mais je vois que Môsieur veut jouer les durs...Et il me demande lesquels ?
Eh bien...Eh bien...De plus en plus sympa cette soirée.

Mon HCom toujours relié aux enceintes, je prononce le discours que j'ai répété :

- Employés du bar, veuillez vous regroupez derrière le comptoir ou dans la cuisine. Chers clients assez sobres pour piger ce que je dis, veuillez quitter les lieux rapidement. Je ne voudrais pas vous blesser dans le feu de l'action. Pour les autres...Vous...Allez...Prendre...Cher !

Mes armes dans les holsters, pour l'intimidation, je m'avance calmement en roulant des épaules.

- Qu'est-ce que t'en dis, NoseBroke ? On compte les points ?

Les poivrôts m'ont détecté. Les plus inconscients me foncent dessus...

Je pouvais aisément imaginer sa machette fendre des crânes et couper des mains... Il allait sans dire que ce n'était pas une arme contre laquelle j'aurais aimé me retrouver en combat, surtout si elle se trouvait dans les mains de ce fou fur... De Steve.
A peine avais-je posé ma question que des éclats de voix attiraient mon attention vers une table, au fond du bar. Des gars se lèvent, s'engueulent avec d'autres clients... Et Steve à côté de moi a l'air d'avoir reçu un putain de cadeau. Bordel... Ce type est vraiment putain de fêlé !

T'es un grand malade, hein, tu le sais ? Je prends ceux de droite !

Je laisse les plus énervés au gorille. Les trois gamins de droite sont complètement bourrés et même s'ils sont énervés, leur coller mon pied au cul devrait pas être trop compliqué.

Okay, les gars, va falloir sortir gentiment avant qu'il y ait de la casse !
-CASSE-TOIIIIIIIIII !

Un de leur verre me loupe de justesse et part s'écraser dans le bois du comptoir. Pas d'accord, donc... Arrivé à leur table, j'évite le poing mou que le plus proche avait visiblement l'intention de m'envoyer dans le nez, je l'attrape par l'oreille et le fait valdinguer contre le mur. Le deuxième semble à l'ouest. J'en profite pour l'attraper par la peau du cou et l'envoyer vers la porte de sortie. Il semble comprendre le message et fuit sans demander son reste.

Souviens-toi, le but c'est de péter le moindre truc possible...

HAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHAHA !!!!!

Je m'éclate !

Des armoires à glaces me rentrent dedans. Ils encaissent mes coups et j'esquive les leurs. L'éclate total !

J'adore cette ville.

4 contre 1 ? Ils veulent pas que je ferme les yeux aussi ? Remarque : ils sont tellement prévisibles que je pourrai...

Je distribue des tartes et des patates à tous ce qui m'approche. Un marin en chemise sale ? Sa mâchoire rencontre mon poing cybernétique et finit par terre. Un petit pirate sans prétention ni avenir ? Je le chope par le col et j'essuie la table avec ses joues avant de le bazarder vers la sortie. Un demeuré armé d'un tabouret ? Je le lui fracasse dans le bide. Un petit acrobate qui veut me faire un drop-kick ? Je l'attrape en plein vol et l'éclate contre le comptoir...

Merde, je crois que j'ai fissuré le zinc. Encore des réparations de ma poche, ça...

Il y a au moins une dizaine de bagarreurs dans le bar, et Nosebroke a réussi à en géré 3. Pas mal, pour un blanc-bec.
Et c'est là que j'entend ce que j'appelle "la mélodie du bonheur"...Dehors, il y a des voix qui hurlent :

"Une baston de bar ? le Chasseur de Pirates ? J'ai des comptes à régler avec cet enfoiré ! Il va morfler !"

Et alors une autre dizaine de clampins prêts à en découdre déboulent dans la salle et se dirigent vers moi, ignorant royalement NoseBroke...Tant mieux pour MOI !

- Moi, j'en suis à 4. Et toi ?

C'est la meilleure soirée depuis des semaines...

Après avoir collé une gifle magistrale au troisième réfractaire, je les chope (n°1 et lui) par les oreilles et les fous dans la rue avec mon pied au derrière...

Pas mal pour un vieux décrépi ! J'en suis à 3 !

Devant les regards beaucoup trop intéressés des passants... Qui se précipitèrent tous à l'intérieur du bar. Visiblement le nom de Steve rameutait les brutes comme un cadavre rameute les mouches !

Foutu dehors par la dizaine d'excités, je me retrouvais à mon tour en public, face à cinq gars que je n'avais jamais vu de ma vie mais dont les tronches ne me disaient absolument rien qui vaille. Des gamins ivres passaient encore... Mais eux ?
Sortant mon arme, je tente une approche stratégique :

Vous savez... Vous vous trompez de gars. Alors foutez le camp, y a rien à voir.

Visiblement, la vue du pistolet a fait son petit effet et les cinq se dispersent en gromelant. ça me laisse enfin la route libre pour entrer dans le bar, duquel des bruits de combat continuent à se faire entendre. Putain de merde, ces connards seraient bien capables de faire exploser mes nouveaux clients ! Sans tergiverser, j'entre à l'intérieur du bar et tire un coup en l'air.

HOOOOOOOOOOOOOY ! J'VIENS DE PASSER UN PUTAIN DE CONTRAT DANS CE PUTAIN DE BAR, ALORS VOUS ALLEZ TOUS M'FAIRE LE PLAISIR DE FOUT'LE CAMP D'ICI AVANT Q'CA VIRE TRES MOCHE !

Désolé de casser ton fun, Steve, mais pas question que j'aie fait le trajet pour rien.

Nosebroke est rentré dans bar après s'être fait sortir. Il a dégainé son flingue et dit un truc intimidant pour calmer le jeu mais...Avec l'adrénaline, il a sûrement pas vu que j'avais déjà séché tout le monde.

Le défaut majeur de foncer tête baissée sur un type qui l'a vu venir, c'est qu'il l'a vu venir. Et qu'il a déjà préparer de quoi les accueillir. C'est pour ça que les 10 abrutis de dehors n'ont pas fait le poids...Ni les 10 de dedans, d'ailleurs...

- Au lieu de redécorer le plafond à coup de plomb, tu m'aiderais pas à les faire sortir ? Je pourrais le faire seul, mais là ils sont un peu nombreux et, le temps c'est de l'argent.

Je commence à en soulever un pour le jeter dehors. Puis un autre. Puis un autre. Toujours le sourire au lèvres...

- Au fait, blanc-bec...J'ai gagné ! Héhé, tous ces types : séchés ! Et j'ai même pas transpirer, ha. T'en dis quoi, toi ? Je pète le feu moi, hahaha !

Avant qu'il n'ai pu répondre quoi que ce soit, on entend la porte du bureau de la patronne s'ouvrir violemment.

Sous le regard des employés qui ressortent de leurs cachettes pour m'aider à remettre l'établissement dans un état présentable, Miss RedPantyhose descend l'escalier et se dirige droit vers nous.

Je contemple, atterré, Steve qui trône au-dessus des 20 abrutis qu'il vient de sécher tout seul.

Le plafond, c'est pour ma gueule. Putain de bordel de merde, Steve. T'es pas humain, c'est pas possible. 20 mecs ?!

Je remballe mon arme et chope le premier gars le plus proche sous les aisselles pour le foutre dehors. Berk. Mouillé. Et puant !

Comment...? Enfin... Tu sais quoi ? Je veux pas le savoir, en fait. Garde ça pour les mioches, le mystère me convient.

Bon, l'état du bar... Disons qu'il laisse sérieusement à désirer. Le mobilier a souffert, mais le personnel est intact. "Well", comme diraient les Corpos, je peux toujours proposer à la patronne de la fournir en meubles en plus du contrat de base ! Avec un type comme Oxtorn pour s'occuper de la sécurité, elle devrait en avoir besoin...
Un grand "BANG" se fait entendre et la patronne en furie débarque dans la pièce principale. Ouhla. Je vais fermer ma grande gueule pour une fois, je crois... On a beau blaguer sur son physique, c'est une tempête spatiale quand elle est en colère... Et on déconne pas avec les tempêtes spaciales.

- STEEEEEEEEEEEEEEEVE !!! Où sont-ils ?!

- De quoi ?

Miss RedPantyhose est arrivé en trombe et maintenant se plante devant moi. Les poings sur les hanches et le décolleté plongeant, mais...Énervée comme ça, même moi je la regarde droit dans les yeux.

J'ai fais quoi ?

- Mes verres à vin, Steve. Ceux que Nat' m'avait offert, Steve. Ils ne sont plus dans le buffet de mon bureau. Alors où sont-ils ?

Aïe.

- Et bien, tu vois...Il se trouve que...ben...j'ai peut-être...accidentellement, hein...cassé...tes verres...la semaine dernière...avant ton rendez-vous...

- QUOOOOOOOOOOOOI ?!

Et la voilà à me taper sur les pectoraux avec ses poings. Bon, elle ne me fait pas mal, loin de là, mais c'est drôle à voir. On dirait une enfant qui pique une crise...

Non attends, je ne dois pas rire, sinon je suis foutu.

- Mais ce n'est pas grave, patronne. J'ai réussi à retrouver les mêmes dans une boutique en ville. J'allais justement te les apporter. Ou plutôt les mettre dans ton buffet pour que tu ne remarque rien. Désolé.

Elle ralentit ses coups et finit par s'arrêter.
Il y a un silence gênant. J'aime pas le silence.

- C'est vrai ? C'est vrai ? Oh Steeeeeeve. Que tu es adoraaaable. Tu as fais une bêtise et tu as voulu la réparer sans que je la vois. Tu es un amooooooour.

Et là, elle me dépose un baiser sur les lèvres. Devant tout le monde.
Bon, moi je m'en fous, mais ça fait bizarre, quand même...

Vous connaissez ce moment extrêmement gênant où deux personnes oublient qu'elles sont en public et commencent à régler leurs histoires de couple comme si de rien n'était ? C'en était un. Le bar était en miettes (j'exagère un peu pour le côté drama, mais vous comprenez l'idée), certains des opposants de ce cher Steve commençaient à se réveiller, un tonneau de rhum se vidait allègrement de son contenu alors que le staff tentait vainement d'endiguer l'hémorragie et j'avais droit de regarder une dispute de vieux couple se dérouler devant moi. Argh.

Me retenant de lever les yeux au ciel, je décidai de m'occuper des quelques clampins encore à terre, jusqu'à ce que mon regard soit attiré par un reflet gris. Au sol se trouvait un badge au nom d'un certain "Docteur Til'uan Ni'wagueh", directement sorti d'un hôpital de Port Salem. Bon... Ces trucs-là sont toujours une bonne addition à un déguisement, aussi fis-je main basse sur ladite carte. Ni vu, ni connu.

Sans aucun commentaire sur l'étonnant couple patronne/employé que formaient Steve et Miss RedPantyhose, je récupérai ma veste au comptoir. Qu'ils aillent donc se trouver une chambre, ces deux-là ! En addition aux boissons consommées, j'ajoutai un supplément suffisant pour réparer le trou au plafond et me tournai vers les deux inséparables.

Ehem... Madame, Steve... La visite fut charmante, mais si ça vous ennuie pas, je vais prendre congé. Si besoin, vous savez où me trouver, c'est toujours un plaisir de faire affaire avec vous.

- Tout le plaisir est pour moi, mon chou. Et n'oublie pas de dire à ce vieux macaque d'ARRETEZ DE M'ENVOYEZ DES FLEURS !

Hahahahahaha ! Ah, je m'en lasse pas.

- Et bien, Steve ? Qu'est-ce que tu attends pour le raccompagner ? Les rues ne sont pas sûres après tout. Et puis, je lui doit bien une petite faveur pour notre nouveau deal EN OOOOOR ! Allez les garçons, bonne soirée. HO HOHOHOHOHOHOHOHOHOHHOOHOOOOOOOO !!!

Et là voilà qui remonte les escaliers en riant...5 ans que je bosse pour elle, et j'ai toujours pas réussi à la cerner en entier.

Mais quelle femme !

- Bon, ben...Je vous suis.

Le vieux avait véritablement eu raison de m'envoyer rencontrer son "seul amour", et c'est avec un grand sourire plaqué au travers de ma gueule que je sortis du bar de mon incroyable nouvelle cliente. Bon sang, ce bout de femme avait un caractère de feu ! Et il n'en fallait pas moins pour garder le Chasseur de pirates sous son autorité, j'imagine... ça ne m'aurait définitivement par surpris qu'ils se retrouvent mariés un jour.

Ce dernier m'avait suivi dans la rue et s'il n'avait pas fait deux fois ma largeur je me serais allègrement foutu de son air niais.

C'est gentil de venir, mais je n'ai pas besoin qu'on me tienne la main, Steve. Même sans être celui qui assomme une vingtaine de poivrots par je-ne-sais quelle grâce de Calypso, je ne crois pas risquer grand chose ici.

La remarque n'était pas méchante, elle avait été dite avec un sourire. Mais le moins de temps je passais en compagnie du Chasseur-De-Clients-Potentiels et le plus de chances j'avais, justement, de conserver ma clientèle de forbans de tout poil. Encore que... Une de mes premières leçons avait été de ne jamais laisser passer une occasion...

ça ne t'intéresserais pas de venir sur Esperanza ? Les gars comme toi sont rares et je connais plus d'une personnes qui seraient très intéressées par ton... Set de compétences particulières. Tabasser des gars peut amener un sacré bon salaire, surtout si tu sais parfois tourner la tête sur les affaires des patrons.

- NoseBroke, t'es quelqu'un de vraiment marrant, mais t'emportes pas trop. Je suis fidèle à Miss RedPantyhose, mais plus encore, à mes principes. L'un d'entre eux est de ne JAMAIS laisser mes supérieurs s'en tirer s'ils font une connerie.

Je sais que je suis pas le plus malin, mais je ne suis pas un abruti complet.

- Ces personnes intéressées par mes compétences, elles auraient pas des fringues de comptable et le nez cassé, par hasard ? Parce que si c'est le cas, elles abusent légèrement de la gentillesse d'une de leurs associées.

Maintenant que je suis lancé, autant aller jusqu'au bout...J'ai besoin de clarifier un truc.

- Entre nous, entre compagnons de baston, tu peux me le dire...Tu serais pas un pirate, des fois ? Mon surnom peut prêter à confusion, mais j'ai pas vraiment une dent ces gens-là. Ou au moins pas tous. Si tu me dis que t'es le fils d'un pirate retraité qui n'a jamais massacré des orphelinats ou violé des marins corporatistes, on pourra encore rester potes. Mais j'aimerai bien savoir qui t'es, pour la sécurité de la patronne.

Je ne sais pas s'il l'a remarqué, mais j'ai toujours mon bouclier personnel d'actif. On est jamais trop prudent, par ici...

Je connaissais l'idée. Même mon père était fidèle à ses principes. ça l'empêchait pas d'être un connard, mais... Okay... Bon point pour lui, j'imagine... Mais c'est quelque chose que je n'ai jamais vraiment bien compris.

Ohla ! Le comptable peut t'assurer que laisser sa sécurité entre les mains de quelqu'un d'autre n'est pas exactement à son programme. Les gens s'achètent, les principes se contournent... Une balle dans le dos, c'est pas l'avenir que je me réserve. Mais c'est bien, ta patronne doit être heureuse de pouvoir compter sur un gars comme toi.

J'hésite à lui poser la main sur l'épaule... On n'en est pas encore là.

Et c'est là qu'il lâche la bombe. L'Ataa'awve dans la salle des machines. LA question. Bon sang... Est-ce une question de routine ? Ai-je assez bu pour lui faire confiance ? Belamy est intraçable, mais jusqu'à quel point est-ce tolérable de le laisser se rapprocher de Sebastian ?
Le silence dure depuis trop longtemps, faut que je dise quelque chose. Que je mette l'éducation du vieux au test. Et ses putains d'yeux qui me scrutent...

Pourquoi tu demandes ? J'ai une gueule de pirate ?

De toute manière mon arme n'est pas utilisable à cette distance. Autant que je sache ce qu'il voit avant de répondre...

- Personne n'a une gueule de pirate. Je les reconnais à leur "aura"...Ça sonne un peu mystique, j'avoue, mais j'ai pas de meilleur mot. Et ton attitude, ta façon de parler et le fait que tu veuilles négocier un deal avec elle me laisse pensez que tu es lié, de près ou de loin, à la piraterie.

J'arrête de marcher et je le fixe intensément. Ma main cybernétique prête à se déployer en garde et ma main organique prête à sortir la machette.

Prêtes, mais pas parties pour. J'hésite encore assez pour ne pas mettre jeter sur lui. Si la patronne a accepté le deal, c'est qu'elle y gagne quelque chose. Et lui aussi il doit y gagner un truc.

Pour être franc, j'ai très envie de me mesurer à lui. Mais la décence et le respect pour la Miss me poussent à vérifier ma théorie d'abord.

Au pire, je passe pour un idiot devant un mec dont j'oublierai le visage d'ici 2 semaines. Et lui le mien.

Non attends, ça non.