Avant-garde

Je suis sorti de l'hôtel, Cariño sur mes talons. Hier, j'ai expliqué à Dani que nous avions tous les deux été engagés sur le Cerberus, moi en tant que Maître Artilleur, lui en tant que mousse. Il n'avait pas l'air ravi, bien entendu, il aurait préféré quelque chose de plus en rapport avec le rang qu'Arg lui a fouré dans le crâne. alors, pour le consoler, je lui ai permis de sortir. Oh, je ne me fais pas d'illusions, je sais bien qu'il le fait même quand je le lui interdis, s'arrangeant juste pour être de retour avant moi mais là, c'est officiel, il peut aller s'amuser. Il a donc quitté l'hôtel avant moi, crédits en poches (les miens), Kitihui...enfin sa sorte de chat bizarre sur ses talons. Profitant du calme, j'ai mis mon uniforme de cérémonie habituel mais sans grade ni décorations et me suis enfoncé dans la ville.

Mes yeux parcourent les vaisseaux du hangard. On m'a dit que la Vanguardia n'était pas loin. Un peu perdu, j'alpague un type qui m'indique une frégate non loin. Je m'avance et, parce que c'est un bon vaisseau, je me fais arrêter par une sentinelle qui me demande ce que je fiche ici. Pas vexé par le ton, je tends mon ID.

"Capitaine Felipe de Golazzo, des Forces Impériales. J'aimerais parler avec votre capitaine, s'il vous plait."

L'autre grommelle et, sans quitter son poste (décidément un professionnel consciencieux, c'est bien) m'annonce à l'intérieur. Sans bouger, j'attends donc qu'on me dise d'entrer, ou que l'on sorte.

" Cap'taineuh. Y a un autr' cap'taine avec un uniforme qui veut vous voir la dehors. Un impérial qu'il dit. Avec un uniforme et tout. "

La Vanguardia est à terre depuis un moment sur Esperanza et l'équipage y a trouvé son train de vie habituel des escales un peu plus longues que d'ordinaires. Le temps commence toutefois à raccourcir et leur départ ne devrait plus trop se faire attendre. En attendant, les abords du vaisseau sont en effet surveillés. Leur statut de corsaire les protégeant comme en faisant une cible pour certains énergumènes qui croient qu'une vengeance est plus facile à terre que dans l'espace. She'lagh, elle, profite de cette accalmie pour reprendre le sport. Depuis sa rencontre avec Zélio, ... elle a compris que l'endurance lui manquait.

Elle est donc loin d'être en état de recevoir un Capitaine, mais comme ce dernier ne s'est pas donné la peine de s'annoncer en avance, elle fera signe au mousse d'aller lui dire d'attendre. Le temps qu'elle donne congé à son partenaire d'entraînement qui n'est autre que son petit frère, et qu'elle s'éponge le visage, elle descendra la passerelle en vêtements légers et à la fois près du corps, un legging noir et un t-shirt simple sans manches, blanc et trop large. Après un topo avec l'un des hommes qui aura surveillé Felipe le temps qu'elle arrive, elle s'approchera de lui.

" Capitaine Golazzo ? Bonsoir. "

J'attends, amusé par l'annonce et le mousse qui vient me dire qu'elle va me voir un, juste faut que je poireaute. Qu'à cela ne tienne, j'ai toute ma journée. Bien droit, je peux rester au garde à vous de longues heures sans fatigue excessive. L'habitude des cérémonies fastidieuses.

La femme qui s'approche est magnifique. Malgré le t-shirt trop large, je peux voir ses formes se dessiner puis se préciser dans un legging noir qui fuselle ses jambes souples. Son visage est bien proportionné, avec des yeux fascinants et une expression simple, un peu froide, soulignée par une intense chevelure noire. J'en regrette un peu d'être en mission, j'aurais aimé rencontrer cette fille dans un cadre moins formel, vraiment. Où j'aurais pu siffler, par exemple au lieu de simplement rester poli.

Par chance, j'ai beaucoup d'expérience en maîtrise de moi. Je la salue poliment, puis lui tend la main.

"Bonsoir Capitaine De la Luz. Merci de me voir à l'improviste. J'ai peu entendu parler de vous mais je ne demande qu'à en savoir d'avantage. Y a-t-il un endroit où nous pourrions discuter ?"

Un autre endroit que debout dans un hangard d'astroport, cela va sans dire.

Premièrement, il ne l'a pas regardée de haut, ou remis en question son statut en fonction de sa tenue. Un bon point pour lui, car elle n'aurait pas apprécié. Deuxièmement, il est resté poli, malgré le fait qu'elle l'ai fait attendre simplement en bas de la passerelle. Alors qu'il aurait pu remettre en question son sens de l'hospitalité. Second bon point pour lui. Tout ça viendra compenser son uniforme impérial et son étrange apparition surprise au pied de sa frégate. Qui rend la jeune femme à la fois légèrement méfiante, et curieuse. Prudente, cependant, elle serrera la main en l'observant sans chercher spécialement à cacher le fait qu'elle fouille sa silhouette pour chercher si une arme semble y être dissimulée ou non.

" Bien sûr " Qu'elle répondra distraitement. Avant de lui indiquer la passerelle d'un signe de tête. Pas d'arme visible, ça ne veut pas dire qu'il en a pas. Mais il est de l'armée, un de ses matelots a vérifié (le principe de profiter du temps que le gars poireaute à l'extérieur). Donc...

" En quoi me vaut l'honneur d'une visite ainsi improvisée, Capitaine ? "

Elle initiera la marche vers ses quartiers donc, tranquillement. Elle n'est pas armée non plus. Mais elle a des hommes tout autour d'eux.

Je la suis sur la passerelle et dans le ventre de son vaisseau, sans appréhension. L'idée qu'un capitaine corsaire puisse vouloir me réduire au silence ne m'effleure pas. Pour moi, ils sont engagé aux côté de l'Empire dont ils font partie, bien qu'ils ne soient pas de l'armée proprement dite Je n'ai aucune crainte à avoir et n'en ait aucune. Cela se voit dans mon maintient, souple mais décontracté, sans autre vigilance que celle normale d'un homme qui aime regarder autour de lui.

"Je suis nouvellement arrivé en Dorado pour servir dans la toute nouvelle milice. Etant donné mes lacunes dans le système, je voulais savoir si vous pourriez me tenir au courant des activités pirates dans la région ces derniers temps de façon plus exhaustive que les rapports que j'ai pu lire."

Un Capitaine arrivé en Dorado pour servir la Milice ? Elle lui jettera un coup d'oeil. Tout guindé qu'il est, il fait preuve d'un certain charisme et d'une certaine prestance, même si elle n'y accorde pas beaucoup d'importance, surtout parce qu'elle déteste l'uniforme qu'il porte. Elle est légèrement tendue, même si elle n'appréhende pas qu'il l'attaque ou quoi que ce soit d'autre. Elle n'aime pas les visites surprises, surtout venant de l'Impérium.

La raison de sa venue lui fait arquer un sourcil néanmoins. Est-ce que c'est une façon de vérifier ses propres rapports ? Est-ce que c'est vraiment une visite anodine parce qu'il est vrai qu'un rapport ne peut pas être aussi précis qu'un conte de première ligne ? Elle détourne le regard pour ne pas laisser voir son interrogation intérieure, et continue de marcher dans les coursives à la touche impériale, jusqu'à arriver devant un ascenseur et appuyer sur le bouton.

" Quelles informations ne paraissant pas dans les rapports souhaitez-vous savoir ? "

"Leur organisation." Autant arriver tout de suite au point important puisqu'elle ne semble pas du genre à faire la conversation. Elle est vraiment jolie cependant et je dois me faire violence pour ne pas l'admirer de façon voyante. Ce ne serait pas correct, je suis là pour travailler. "Les rapports que l'on reçoit dans mon système d'origine sont disparates et ne font état que de terrorrismes dans des attaques qui semblent aléatoire mais je me demande comment ils font pour se supporter les uns les autres. Il y a certainement quelque chose, sinon, ils ne pourraient pas être si nombreux."

Une des raisons pour lesquelles les militaires des factions font souvent de piètres chasseurs de pirates... Souvent... C'est généralement leur mauvaise compréhension de la piraterie. Terrorisme aléatoire ? Organisation ? Ils sont à la fois les deux tendances... Et aucune. Alors qu'elle attend devant les ascenseurs qu'une des portes souvent pour les mener plus aisément à son bureau, elle lui jette un nouveau coup d'œil plein de réflexion.

" Vous avez déjà entendu parler des Seigneurs, Capitaine De Golazzo ? "

C'est un des détails qu'elle ne s'est pas vraiment embêtée à vérifier, si l'Imperium, dans leurs bases de données, leur ont accordé leurs titres auto-proclamés ou non.

"Des Seigneurs ?" Mon incompréhension répond pour moi, ce qui n'est pas pour me déplaire. Je vois bien qu'elle ne fait pas référence aux Hidalgos, troupes inombrables de nobles sans titres dont je fais partie. Et les autres ont des titres pour les départager. Barones, Condes, Marques, Grande, tous sont des Seigneurs. La majuscule, audible, me confirme bien qu'il ne s'agit pas d'eux. Et pourtant aucune des autres faction n'a de noblesse. Même le clergé qui se donne des "Monseigneurs" et autre bêtise n'a pas osé celui-ci. Je la suis dans l'ascenseur, curieux. "Ca ne me dit rien, non. De qui et quoi s'agit-il ?" Je n'aime pas ça, cela sent la hiérarchie à plein nez. Pis même. La hiérarchie impériale.

L'incompréhension est audible dans sa voix... Et elle se fustige intérieurement. L'Impérium se targue de beaucoup de chose, mais leurs renseignements sont incomplets. Et voilà qu'elle se retrouve à devoir combler les trous béants chez un de leurs Capitaines, qui ne manquera pas d'aller faire son rapport sur la conversation, pour alerter tous les autres. A-t-elle le choix ? Pas vraiment. Est-ce important ? ... Pas vraiment.

" Les Seigneurs Pirates " Qu'elle notera, à moitié posée contre la paroi de la boite dans laquelle ils viennent de s'enfermer, et qui commence à monter. Le trajet est court. L'ascenseur est plutôt récent, et efficace. " Des individus autoproclamés chefs mais qui en réalité ne régissent que les villes pirates dans lesquelles ils se sont établis "

Des chefs auto-proclamés qui régissent des villes. Intéressant. Cela conforterait l'hypothèse de Mia sur les attaques concertées et les possibles dangers de ce genre d'organisation. Le problème pirate semble bien plus important qu'on ne le soupçonne sur Tyrion.

"Ont-ils beaucoup de pouvoir ? Comment arrivent-ils à régir des villes s'ils sont itinérants ? Connaissons-nous leur identité ? Y a-t-il beaucoup de tentatives pour prendre leur place ? Comment dirigent-ils ? Ils sont là depuis longtemps ?"

Cette première salve de questions, que je tire sans agressivité mais avec un sérieux indéniable qui n'est généralement pas la face que je présente d'ordinaire à mes interlocuteurs, surtout lorsqu'ils sont de jolies femmes, n'est qu'un début. Chaque réponse aura son lot d'interrogations suivantes et je pressent déjà que notre entretien sera plus long que prévu. Cela ne me dérange pas. Pour le moment, le Capitaine De la Luz est de bonne compagnie. Une surprise agréable et inattendue chez les corsaires. Peut-être valent-ils la peine que je me penche un peu plus sur eux aussi.

La porte s'ouvre à peine lorsqu'il a fini de lancer sa série de question. La jeune femme qui l'observe de ses yeux dorés légèrement écarquillés ne bouge pas tout de suite de sa place apparemment confortable contre la paroi, alors que le couloir du second pont s'ouvre à eux. Elle cligne des yeux en le fixant, avant d'arquer un sourcil amusé, de se redresser et de s'engouffrer dans le couloir pour se diriger vers une porte du fond qui est son bureau... et sa cabine, par la même occasion.

" Les Seigneurs pirates... Ils n'ont vraiment de seigneur que le nom. Ils ne régissent ni villes ni flottes... Du moins, pas que je sache. Et sont en Dorado depuis... Si ma mémoire ne fait pas défaut, aux alentours de 25 ou 20 ADD. "

Elle réfléchit, une seconde, en arrivant à la porte qui n'est guère très éloignée de l'ascenseur. Comment expliquer ça ?

" Ils ne sont pas vraiment des... Captaines d'autres capitaines pirate. Ils sont là pour faire respecter le Code. Veuiller à l'avenir de la piraterie. Sans vraiment diriger... Ils insufflent tellement de respect que tout le monde les écoute. Et sinon, ils vous roulent dessus avec leur équipage. "

Ah. D'un coup ils ne régissaient plus de ville. Et le mot flotte était venu l'accompagner. Intéressant. Je me demandais à quel point le Capitaine de la Vanguardia était coincée entre les deux mondes et pouvait ou non se montrer directe. C'était en tout cas une mine d'information à creuser. De vieille information qui plus était. Je me demandais comment il était possible que l'Empire n'en sache pas plus sur eux. Etait-ce classifié ? Ou bien les officiers impériaux avaient-ils été trop obtus pour s'abaisser à simplement demander ? Les deux étaient possibles, bien trop possibles. Tout comme je ne pouvais m'empêcher de penser que cela pouvait bien être également une connaissance d'une famille qui l'avait caché à une autre dans le cadre d'une vendetta. Oui, ça aurait été de bonne guerre.

"Le Code ? Qu'est ce que le Code ? Et comment font-ils pour être plus fort que les autres pirates ? Ils ont des galions ?"

Je savais que l'attaque du Durilium s'était effectuée à quatre frégates et que donc les pirates en avaient. Je n'osais penser que certains aient pu mettre la main sur un destroyer cependant. Cette simple idée était par trop effrayante. Et puis il y aurait eu des rumeurs... quand même...quoi que...

Elle l'observe de nouveau, ses grands yeux d'ambre semblant l'analyser un instant, avant d'ouvrir enfin la porte de sa cabine, et de l'inviter à entrer à l'intérieur.

" Il paraît que oui. Je n'en ai jamais vu cela dit. "

Elle n'a, non plus, jamais croisé de Seigneur Pirate à sa connaissance, et tout ce qu'elle dit ici est un condensé de théorie et de souvenirs partagés par son père. Et d'autres membres de son équipage d'antan.

La cabine est assez simple. Un bureau. Une chaise de chaque côté. Il est méticuleusement rangé. Pas de photos visibles. Le reste de la cabine est à la même image, avec un lit, fait, dans le fond, sa veste et son écharpe rouge habituelles posés sur une autre chaise plus loin, et une porte au fond menant sur autre chose. Le lit est en partie cachée par une sorte de paravent en métal. Qu'elle ne prend pas la peine de refermer totalement.

Elle viendra s'installer de l'autre côté du bureau.

" Le Code... C'est ce qui différencie deux types de pirates. Même si l'armée prétend qu'il n'en existe qu'un seul. C'est une série de règles assez simples, qui évitent généralement l'anarchie dans un équipage sans foi ni loi. "

La cabine est spartiate, décorée simplement, avec goût. Je l'embrase d'un coup d'oeil pour ne pas perdre le contact avec la jeune femme qui est bien ce qu'il y a de plus joli dans la pièce, cela dit sans rien enlever à la décoration, elle est simplement très belle. Et très évasive, je n'arrive pas à avoir de réponses simples à mes questions. Je décide donc de les poser une par une pour ne pas lui laisser d'échapatoires. Il est connu que certains corsaires ont des affinités pirates. Je ne pense pas que ce soit son cas, cependant il ne faut jamais se découvrir plus que de nécessaire. C'est stupide.

"Deux types donc. L'un qui suit le Code. L'autre pas. J'imagine qu'ils ne s'aiment pas ? Et ce sont les Seigneurs Pirates qui mettent ce Code en place ? Que dit-il exactement ?"

Au temps pour l'envie de poser qu'une question mais plus je rentre dans cette organisation, plus je suis curieux. Mia avait raison. Il se passe des choses. Ce ne sont pas de simples criminels.

Elle hausse un peu les épaules, une fois assise derrière son bureau. Elle ne comprend pas vraiment l'intérêt de ses questions. Il n'a pas l'air comme les autres capitaines impériaux qu'elle a déjà pu croiser... Mais ses questions restent compliquées, très précises. Trop pour un Capitaine dont elle n'a pu que faire vérifier rapidement les antécédents avant de le faire monter à son bord.

" Ca dépend. Certains renient le code. D'autres prennent ça comme un simple guide. Les derniers le vénèrent presque. Et tout ça s'entend... relativement. " Comment expliquer ça autrement ? Le chaos qu'est Tortuga, par exemple ? Sans y mettre soi même les pieds...

Mais elle peut pas l'inviter à aller y faire un tour. Vu sa carrure, il finirait en morceau.

" Je ne sais pas qui l'a mis en place à l'origine... Peut-être les Seigneurs. Peut-être d'autres Seigneurs avant eux. " Elle hausse de nouveau les épaules. " Quant à ce qu'il dit... Il parle du partage du butin, de la conduite à tenir à bord : pas de bagarre, pas de jeux d'argent, obéissance au Capitaine... Si on vole, on meurt. Si on reste en arrière, c'est chacun pour soi... " Qu'elle énumère pensivement. " Et les blessés au combat sont rémunérés. "

Elle l'observe, en parlant, un peu plus curieuse maintenant qu'ils sont installés dans son bureau.

" Cela vous éclaire, Capitaine ? "

"Beaucoup." Si je compile les données, je viens d'apprendre que les Pirates dans leur ensemble ont une sorte de gouvernement non officiels, et sont régis par un Code de loi qui leur donne une marche à suivre dont le gouvernement en question se fait garant en punissant ceux qui ne le suivent pas. Lesquels gouverneurs dirigent en sous main des astroports. Cela veut dire une organisation, une base, cela veut dire une faction dans les factions. Cela veut dire plus que des criminels parce que s'il y a une pensée commune, des valeurs communes alors il peut y avoir regroupement. Je n'en reviens pas que personne n'ait jusqu'ici pensé à se renseigner alors qu'il ne m'avait fallu que quelques minutes à questionner un corsaire.

"Il y a donc un système de retraite avec une gestion des blessés ? Connaissons-nous les identités ou des alias de ces Seigneurs ?"

" La gestion de l'équipage revient à son Capitaine... Alors, tout dépend du Capitaine. "

La voix est un peu monocorde. L'ennui la gagne, alors qu'elle continue pourtant de répondre sans sembler agacée, juste ennuyée. Elle croise ses belles jambes, et s'installe un peu plus confortablement dans sa chaise. Elle n'a pas la discipline militaire, et elle s'en fiche bien qu'elle soit face à un Capitaine Impérium pour cela.

" Peut-être que vos supérieurs les connaissent. Je ne tiens pas de rapport sur eux personnellement, ni d'enquête. Ils sont loin d'être mes cibles. Je ne tiens pas à perdre la vie. Moins j'en entends parler, mieux je me porte. "

Déjà que certains pirates sont bien plus dangereux que son équipage et la Vanguardia... Elle évite de les approcher de trop près eux aussi.

" Mais dites moi, Capitaine, votre curiosité a un but particulier ? "

Non parce que... S'il souhaite courir après les Seigneurs, elle peut commander le cercueil tout de suite, s'il veut ?

J'ennuie la jeune femme, clairement, mais aussi galant que je puisse être en temps personnel, lorsque je suis en mission comme ici, même non-officielle, je ne me laisse pas détourner aussi facilement alors je continue à noter les réponses qui deviennent plus évasives, moins exhaustive, jusqu'à ce qu'elle se décide - déjà ? enfin ? - à me retourner la question. Par chance, je m'y attendais. Je hausse les épaules.

"Déformation professionnelle. J'arrive dans un nouvel écosystème, j'ai des nouvelles missions, j'aime connaître la réalité du terrain au delà des rapports officiels. C'est mon côté Capitaine, même si en tant que Maître Artilleur, ce ne sera probablement pas utile, j'ai ce besoin de savoir où j'emmène mes hommes et adapter ma réponse en conséquences." Je ne parle pas des soupçons de Mia ni du besoin d'en savoir plus sur l'organisation des ennemis. Cela me parait logique et j'ai du mal à comprendre que mes compatriotes ne se soient pas donné cette peine. Il faut croire que les corsaires ont vraiment mauvaise réputation. "Accessoirement je me disais que la Milice ayant une réputation proche des corsaires, il était intelligent de se connaître les uns les autres pour travailler de concert. Ne sommes-nous pas tous des serviteurs de l'Empire ?"

Le voilà enfin un peu plus loquace et un peu moins interrogateur. Alors, elle se détend un peu. Elle n'aime pas les serial questionneurs. Surtout ceux qui ont cet accent si particuliers. Ca lui rappelle juste de mauvais souvenirs.

Ses arguments sont toutefois légitimes. Sans doute. Elle n'en sait rien. Elle n'est pas spécialiste de l'armée. Et si elle a fini par comprendre comment ils fonctionnent en général, leurs motivations politiques lui restent inconnues. Si elle est bien encline à partager quelques secrets pas bien gardés de la société pirate, ils sont bien moins enclins à retourner la faveur en général.

" En effet, nous le sommes, Capitaine. Et j'ai déjà eu un entretien avec le Capitaine de Moya pour unir nos forces. Je suppose que vous ne l'ignorez pas, sinon vous ne seriez pas ici ? Vous voulez boire quelque chose ? "

Elle se lève à nouveau, pour se diriger vers un meuble en bois contre le mur à côté du bureau, lui tournant à moitié le dos pour se servir dans le bar improvisé en attendant sa réponse.

" Ne vous approchez pas trop des Seigneurs. Ils sont dangereux. Même pour toute la Milice réunie. "

"Un verre de rhum ne serait pas de refus." Cela beau être une boisson de pirate, elle a un gout qui me plait bien, épicé comme la femme qui me fait face et me met en garde. Je hoche gravement la tête. "Je n'ai pas l'intention de foncer étourdiement dans le tas, ne vous en faites pas. Et vous placer en mauvaise posture ne m'apporterait rien, ni personnellement ni pour l'Empire. Mes questions ne sont vraiment que pour mieux comprendre la géopolitique de l'endroit." J'inspire. "Le Capitaine de Moya ne m'avait pas informé de cette union. Je ne prendrais mon poste sous ses ordres que dans quelques jours. Cependant je suis ravi d'apprendre que nous pourrons travailler ensemble."

Du rhum ? Elle lui jette un coup d'oeil, gardant bien pour elle ses impressions et laissant son expression neutre lui faire face une seconde avant de se tourner vers le bar, l'ouvrir et se pencher pour prendre une bouteille de rhum parmi toutes celle qu'elle a. Puis deux verres, tout simplement, et revenir vers le bureau.

" C'est commun de visiter un corsaire pour prendre des nouvelles de la géopolitique de Dorado ? " Qu'elle demande, en ouvrant la bouteille, prenant appui sur son propre bureau sans prendre la peine d'en faire le tour, en l'observant, posée à moins d'un mètre de lui. Son regard n'est pas haut, mais clairement curieux, alors qu'elle verse le rhum dans les deux verres.

Elle semble néanmoins un peu étonnée à la nouvelle. De Moya ne l'a donc pas prévenu ? Enfin, s'il n'a pas encore pris son poste à bord, cela n'est pas très étonnant. Et pourtant le voilà à sa porte ?...

" Si votre Capitaine ne vous a pas indiqué mon navire, qu'est-ce qui vous amène chez moi et pas chez un autre ? "

Simple curiosité.
Du moins, ça en a l'air.

Je la regarde me servir un verre, un petit sourire aux lèvres. Elle est vraiment très jolie et la regarder se mouvoir a quelque chose d'hypnotisant mais pas au point, heureusement, de me faire perdre mes moyens. Je hausse les épaules. "Je ne sais pas si c'est commun. Je ne suis pas vraiment un modèle de..." je cherche mes mots. Commonitude ? Banalité ? Banalité. "banalité. Si ça avait été le cas, je serais général à l'heure actuelle." Ce n'est même pas une vantardise, au contraire, la simple évocation d'un fait. "Je pense qu'il est plus efficace de se renseigner auprès de ceux qui sont au milieu des conflits, ils ont en général plus objectifs que les rapports officiels qui sont envoyés à l'Etat Major. Or les corsaires, de part leur position particulière sont en plein milieu du conflit, d'où ma requête. Quant au choix de votre vaisseau... et bien vous étiez là, j'étais là, et c'est à peu près tout." Nouveau sourire. Elle est bien curieuse d'un coup. Et bien froide. Elle ne doit pas tellement apprécier les officiels. Intéressant.

Assise sur le coin de son propre bureau, son attitude n'est toutefois pas de celles qui font d'elle la femme fatale qu'elle aurait pu être avec son physique. Elle est simple et peu versée dans la séduction d'ordinaire déjà... Alors avec un officiel impérial, effectivement, séduire n'est certainement pas à l'ordre du jour. Même si son physique s'en occupe déjà tout seul sans lui demander son avis.

Elle viendra prendre une gorgée de rhum en l'observant tranquillement.

" D'accord, je comprends mieux "

Comme s'il y avait eu un déclic ou une révélation, elle se pare tout d'un coup d'un sourire. Il n'est pas flamboyant, mais simple et tranquille. S'il est réellement là par "hasard" et non pour la surveiller et mettre une nouvelle épée de Damocles au dessus de sa tête, il mérite un sourire au moins.

" Voulez-vous profiter de votre passage à bord pour visiter ce vaisseau, Capitaine ? "

Je prends une gorgée en miroir, la laissant apprécier mes mots. Elle est tranquille, comme si elle n'avait pas conscience de sa beauté. Et je suis ici en qualité officielle aussi je ne fais pas de commentaires. Je laisse le silence parler pour nous et la forcer à se dévoiler un peu. Quand elle me propose enfin de visiter le vaisseau, j'ai un sourire satisfait mais ni condescendant, ni moqueur. Je hoche la tête, simplement. "Ce serait un plaisir et un honneur."