When the fight was over, nothing was solved, but nothing mattered.

Pourquoi elle ne lui a pas simplement répondu "rien" aussi, hein? Ou même inventer un truc à la con, du genre "y a de mes nouveaux membres d'équipage qui font chier, c'est tout"? Fuck. Elle ne répond d'abord que par un grognement, l'effet de son combat se dissipant rapidement tout d'un coup, laissant revenir en elle inquiétudes et colères, puis laisse échapper une phrase d'entre ses dents serrées.

"J'ai dû la préparer pendant onze foutues années d'enfer, cette décision-là..."

Et maintenant, elle n'a que quelques jours. Quelques semaines tout au plus, avant que la grossesse de Jézabel devienne trop apparente et qu'elle ne puisse plus la cacher. Hannabeth lance un regard de biais à Zélio lorsqu'il l'enjoint à parler, puis grogne de nouveau, le visage fermé.

"J'parles pas d'ce genre de choses. Jamais."

Alors pourquoi elle a envie de tout lui raconter? Peut-être parce qu'il a cette faculté étrange, dans sa façon unique d'être, de la rendre à l'aise dans ses bras. Peut-être aussi parce qu'il n'est pas de son monde et ne connait rien à la réputation des Alvarez et s'en contre fiche. Peut-être, non surement, parce que depuis ce soir où Jézabel lui a fait sa demande, elle meurt d'envie de demander conseil à quelqu'un, le poids étant trop lourd pour ses seules épaules, mais qu'aucune oreille n'est adéquate. Elle reste donc un moment silencieuse, butée et déchirée, puis lâche un soupire.

"T'as... t'as déjà voulu avoir des enfants?"

Visiblement tout ça la perturbe un maximum et Zélio se demande s'il s'engage pas dans une voie un peu dangereuse. Les sales histoires il connait, mieux que personne. Il se demande donc dans quoi la capitaine s'est engagé. Et soudainement venu de nul part la question qui tue.

Zélio reste silencieux un moment, mais clairement son attitude vient de changer et il se referme comme une huitre l'espace d'un instant. Il respire un bon coup et reprend le fil de la conversation. Sujet délicat avec lui selon ce qu'elle va lui raconter.

- bien sur … comme tout le monde en théorie. dit-il simplement. Pourquoi ?

Zélio ne répond pas tout de suite, et perdu dans son propre cauchemar, Hannabeth à du mal à comprendre pourquoi. Elle réalise bien maintenant, additionnant sa réaction maintenant à celles étranges qu'il a eues lors de leur première rencontre, que le sujet est sensible pour lui aussi. Pourquoi, ça, c'est un mystère, et il ne répond rien pour l'aider à le comprendre. Elle regrette déjà d'avoir posé la question et s'être engagée dans cette direction, mais elle ne sait pas comment s'en sortir maintenant.

La blonde a donc un léger rire triste et ironique, puis sa voix se fait amère et résignée. Il est clair que le sujet fait mal.

"J'peux pas en avoir. Médicalement."

Elle pousse un nouveau soupire, puis ferme un instant les yeux, se passant une main dans les cheveux. Elle ne peut pas croire qu'elle lui parle de ça. Qu'elle en parle tout court.

"Quelqu'un qui m'est proche vient de me demander de prendre soin de son enfant à naître. De l'élever comme le mien. Hell... de mentir à tout le monde, y compris au gamin, en prétendant être sa mère. Il sera pas en sécurité avec sa mère biologique, pour diverses raisons. On tentera surement de le tuer pour atteindre sa mère, notamment."

Elle s'arrête et ne dit plus rien, continuant à marcher en attendant les réactions de Zélio le visage interdit, mais les mâchoires serrées.

Elle lui lâche finalement le morceau et il comprend son désarroi. Ne pas pouvoir avoir son propre enfant, issu de son sang c'est raté tous les moments de joie. Comme les premiers pas, les premières chutes, les premiers mots, le premier "Papa", les câlins, les bisous, les sourires, bref tout ce qui fait que la vie de parent mérite d'être vécu. Ne pas pouvoir faire d'enfant c'est aussi éviter de lui tenir la main dans un lit d'hôpital alors qu'elle est détruite de l'intérieur et qu'elle décide de se laisser aller, de ne plus se battre parce que le monde est moche et que son père ne l'a pas protégé. C'est éviter le deuil, le repli sur soi et la quête de vengeance. C'est ne pas devenir un monstre sanguinaire capable de torturer pour obtenir des informations et ensuite de torturer encore et encore le responsable de tout cela. Difficile de peser les avantages et les inconvénients, mais là dans son cœur noir et brisé il pense que ne pas avoir d'enfant c'est mieux. Mais c'est une autre situation qui nécessite un autre traitement.

- c'est en effet une décision difficile. Je te cache pas qu'il y aura des larmes, des cris et du ressentiment, mais aussi des bons moments comme rien d'autre ne peut en apporter. Si tu es assez dure pour encaisser la souffrance qui viendra avec la joie alors accepte. dit l'impérial qui a retrouvé un port de tête altier et une certaine noblesse dans son attitude.

La blonde ferme les yeux. Elle ne réalise pas qu'elle a cessé de marcher. Bordel que les paroles de Zélio font mal.

"C'est pas ça."

Pas tout à fait du moins. Elle réalise à retardement qu'il parle avec les mots de quelqu'un qui connait intimement le sujet et jure intérieurement. Voilà pourquoi elle ne voulait pas en parler dès le départ. C'est son fardeau à elle, pas le sien si celui de personne d'autre. Il a déjà assez de ses propres blessures. Mais il est trop tard maintenant.

"Peu importe les souffrances qui viennent avec, je prendrais la décision d'avoir un enfant sans y penser à deux fois. Mais là, je sais que ça va détruire la mère. Et j'continue à croire qu'il y a d'autres options pour écarter le danger. On a juste... pas le temps."

Hannabeth secoue la tête, rouvrant les yeux, mais le gardant fixé sur la route devant eux.

"J'devrais pas t'dire ça. Je sais pas ce qu'il me prend. Oublie."

- oublie ? Si tu as une formule magique on peut tenter l'expérience, mais crois moi j'ai essayé. Certains sujets ne s'oublient jamais. commence Zélio. C'est simple, il n'y a pas dix questions à se poser, il y en a pas deux non plus. Il n'y en a qu'une. Qu'est-ce qui est le mieux pour l'enfant ? En prenant en compte la très forte probabilité qu'il l'apprenne tôt ou tard.

Rien ne reste caché éternellement, les secrets ne restent des secrets qu'à l'unique condition de n'en parler à personne. Sinon ce n'est plus un secret. Et là il y aura trop de monde au courant.

- notons qu'un enfant élevé dans l'amour finira toujours mieux qu'un enfant mort. fait remarquer Zélio avec une dose de cynisme.

"C'est pas ton problème, pourtant."

Elle se détache de lui et fait un pas en avant avant de s'arrêter de nouveau puis se mord la lèvre. Elle a été sèche avec lui alors qu'il tente de l'aider, alors qu'elle lui balance toute cette bon sang d'histoire à la gueule. Certes il a demandé, mais merde. Hannabeth prend une grande inspiration et tente de ne pas laisser sa colère la submerger.

Puis Zélio parle de ce qui est le mieux pour l'enfant. Il est là tout le foutu noeud du problème. Qu'il soit élevé par Jézabel ou par elle, il sera aimé sans l'ombre d'un doute. L'enfant sera potentiellement plus en sécurité avec elle, mais la seconde ou la vérité éclatera, si réel danger il y a, tout cela n'aura servi à rien. Et comme Zélio vient de dire, la vérité finit toujours par se savoir. Tout le malheur que causerait cette mascarade n'en vaut donc pas le risque.

La blonde a un douloureux serrement à la poitrine alors qu'elle sent sa décision se cristalliser en elle au même rythme que la possibilité d'avoir un enfant à elle s'envole. Le mieux pour le bébé, ce n’est définitivement pas de venir combler ce vide dans sa vie. Lorsqu'elle reprend, sa voix est plus douce, plus résignée aussi.

"T'as raison. Je le sais. Et c'est justement pour ça qu'j'ai foutrement peur de me tromper de décision."

- Tu es partagée entre ton envie d'avoir un enfant, certainement d'un proche parent et donc presque de ton sang. Et le bien de l'enfant que tu estimes plus à sa place auprès de sa vraie mère qui saura selon toi l'élevé aussi bien que toi et dans des conditions aussi saines que toi ? demande Zélio.

Qui confierait son gosse à une capitaine pirate ? Quelqu'un qui a plus d'emmerde que ça et qui vit d'une manière encore plus dangereuse.

- Qui pourra assurer le rôle de mère pendant toute l'enfance du gosse ? Parce que tu n'as rien dit sur la mère mais si son environnement est pire que le tien… alors elle aime vivre très dangereusement. fait remarquer Zélio.

- et t'éloigner physiquement de moi résoudra pas ton problème. fait remarquer le combattant.

Oui et non. Il y a de ça, bien sûr, de son envie d'avoir un enfant vis-à-vis ce qui est le mieux pour ce dernier. Mais si c'est effectivement ce qui lui fait le plus mal, c'est assez secondaire dans sa prise de décision. Le vrai problème, c'est qu'au contraire de Jézabel, elle ne croit pas que son enfant serait réellement plus en sécurité avec elle. Ses raisons, néanmoins, elle ne peut pas les partager avec Zélio au risque de dévoiler l'identité de sa soeur, et elle en a déjà beaucoup trop dit. Elle se contente donc de répondre, la voix un peu éteinte :

"Elle pourrait. Elle le fera. J'ai aucun doute là dessus. Elle a peur et voit son environnement pire que le mien, mais c'est pas vrai si on m'demande."

Merde, elle a quand même la totalité de l'UC au cul, et un capitaine de leur armée ayant juré de l'envoyer en prison si elle osait les trahir. Mais ça, Jézabel n'a pas voulu le voir, même lorsqu'elle le lui a crié au visage.

Sa remarque sur le fait qu'elle se soit détachée de lui la fait tiquer et elle reste un instant immobile. Elle a une foutue horreur qu'on la voit ainsi, qu'on voit ses faiblesses et à quel point elle n'est peut-être pas aussi forte qu'elle le laisse paraître. Elle finit néanmoins par se retourner vers Zélio et risque un regard vers lui, ce qui en soi est une réussite pour lui.

Elle revient vers lui alors il repose sa main là où elle est censée se trouver, sur les fesses de la belle. Il sourit à Beth rassurant.

- c'est mieux… elle se sentait orpheline ma petite mimine. dit-il avec son ton désinvolte habituel.

Bon elle ne parle pas du père c'est qu'il est exclu de l'équation, soit qu'il est mort, inconnu ou pas au courant. Où qu'il s'en fiche, parait que ça existe ça. Mais bon il préfère s'en assurer sinon c'est compliqué de comprendre l'ensemble de la problématique.

- et le père il en pense quoi ? demande ensuite Zélio plus gravement.

Il a été père et le mettre hors de ce genre d'équation c'est grave. Si le père est écarté et qu'il a l'instinct paternel les choses pourraient mal tourner. Mais bon il sent que la petite vieille a déjà une idée sur la chose. Ne pas séparer la mère de sa fille. Parce que si on lui demande… la situation de la mère n'est pas plus dangereuse que celle de Beth.

Il la reprend dans ses bras et Hannabeth se sent un peu rassurée. Déjà, il ne semble pas lui en vouloir malgré la gueule qu'il tirait. Ensuite parce qu'avoir une présence rassurante, malgré qu'elle réchigne à se l'avouer, est peut-être ce dont elle avait le plus besoin finalement. Il parvient d'ailleurs à lui arracher un sourire amusé avec sa connerie et elle le pousse sans grande conviction de l'épaule, pour la forme, avant d'appuyer son front sur la sienne quelques instants.

"J'en sais peu sur le père. Ils sont pas amoureux ni rien, mais je sais qu'il veut être présent pour le gamin, qu'il le suivra. Et apparement il est d'accord avec l'idée que je sois sa mère."

Elle prononce ces derniers mots avec le ton de quelqu'un qui énonce une absurdité, puis se redresse en reprenant son aplomb.

"J'sais déjà qu'elle décision j'dois prendre. J'suis certaine que c'est la bone, depuis le début, mais y a toujours une partie de moi qui a peur que j'me trompe. Mais... merci. C'est débile mais voilà. Et t'aurais pu t'en contre foutre ou m'laisser en plan."

Elle n'a que peu l'habitude de s'ouvrir ainsi et l'effet est étrange. Ni désagréable ni le contraire. Juste étrange, comme une gamine qui viendrait de violer un interdit sans trop comprendre comment ni pourquoi. Elle hésite puis, sur ses gardes, demande finalement :

"C'est un sujet qui te tiens à cœur, non?"

Etrange le père qui n'a pas de problème avec la supercherie proposée par la mère biologique. Après il ne connait pas toute la situation et n'est pas capable de juger précisément. Il a rappelé le seul point important à la belle. Le bien de l'enfant. Le reste c'est sans intérêt.

Elle vient s'appuyer un peu contre lui, visiblement elle apprécie sa présence et les conneries permanentes qu'il peut raconter. C'est un bon point. Sans doute qu'elle se lassera avec le temps. Mais pour le moment ce n'est pas le sujet, tant que ses bêtises la font sourire il n'a pas de raison d'arrêter.

- c'est un sujet qui tient à cœur de toute personne normalement constituée non ? demande-t-il sincèrement.

Ces derniers temps il a rencontré pas mal de personne n'ayant pas le moindre intérêt pour les enfants. Ni pour ceux des autres ni pour les leurs. Il ne comprend pas bien le concept mais c'est leur vie après tout. Lui aura toujours les enfants à cœur c'était inscrit dans ses gènes sans doute et Lucia l'a gravé à vie. La question est s'ouvre-t-il à la pirate qui vient de lui ouvrir son cœur, enfin ses problèmes du moment. Dans son cas ce n'est plus un problème, il a réglé ça dans le sang.

Il ne fait pas de remarque sur ce qu'il vient de se passer non plus, et la blonde est rassurée. Déjà qu'elle a l'impression d'avoir fait une connerie et qu'elle a horreur de s'ouvrir ainsi, si en plus il en avait profité pour se fouttre de sa gueule, elle aurait sortit les crocs. Mais non. Et c'est bien.

Lorsqu'il lui répond, Hannabeth ne le lâche pas des yeux. Elle sait pertinemment que c'est faux, que les gens qui pensent ainsi sont trop rares à son goût. Sans même parler du fait qu'elle vient de lui dévaler une histoire impliquant de possibles tentatives de meurtre sur un nouveau né, elle a elle-même vécu la preuve du contraire. Néanmoins, elle vient de lui dévoiler un secret, alors celui de sa mère attendra au moins le 3e rendez-vous, si par miracle il lui prend la folie d'en parler. C'est donc sur un ton particulièrement sincère qu'elle rétorque simplement :

"Pas comme ca."

Elle ne le questionne pas d'avantage néanmoins, se contentant de garder ses yeux gris-bleutés sur lui en silence. S'il veut s'ouvrir à son tour, elle lui en laisse la place. Elle lui doit au moins ca, maintenant.

- on a tous un passé compliqué je pense, c'est sans doute l'effet Dorado. Ou simplement la vie. dit-il doucement. Alors en effet les enfants sont un sujet sensible chez moi.

Il n'en dira pas plus cette fois, pas du genre à s'ouvrir facilement et ce n'est pas comme s'il en avait besoin. C'est le passé et le sang de l'assassin et permit de refermer la plaie. Il ne reste qu'une horrible cicatrice dans le trou béant du cœur de Zélio. Un trou que rien ne pourra remplir. Du moins c'est ce dont il est persuadé.

- mais je comprends que ce soit un sujet sensible et d'actualité pour toi. Tu as une famille compliquée. dit-il ensuite.

Il s'est renseigné sur les Alvarez. C'est pas compliqué tellement la mère et la sœur sont connues. Le père un peu moins cependant et il y a pas grand détail sur les circonstances de leur séparation.

- Pourquoi tu n'adoptes pas ? Des gamins perdus en manquent de parent aimant c'est pas ce qui manque ici bas. demande Zélio

Zélio est honnête avec elle, et ce même s'il ne lui dit pas tout. Comme elle, en somme. C'est assez. La blonde se lève alors sur la pointe des pieds et vient déposer un court baiser sur ses lèvres. Une manière sans paroles de dire qu'il n'a pas besoin d'en dire plus. Qu'elle est là aussi, aussi ridicule et risible ce soit vu leur situation.

Puis, lorsque le brun commente le caractère complexe de la famille Alvarez, la blonde tire une grimace, mais pouffe de rire avant de lâcher :

"T'as même pas idée."

Hannabeth exerce une légère pression sur la fesse de Zélio ou sa main à elle aussi est revenue se poser, afin de l'inciter de se remettre à marcher. C'est pas qu'ils viennent d'avoir un épilogue émotif au beau milieu de la route, mais c'est à peu près ça. Sa question suivante la fait sourire, et si des relents d'amertume peuvent y être remarqués, il est principalement doux et sincère.

"T'as remarqué les gamins à bord de l'Albatros, quand j't'ai montré la sortie la dernière fois? La moitié sont les enfants de membres de l'équipage. L'autre est composée de gamins qui n'ont nulle part d'autre ou aller."

Elle hausse les épaules et ajoute :

",Mais réellement adopté... j'en sais rien en fait. Pourtant ça a du sens."

Peut-être parce que malgré tout, les paroles d'Erszébeth se sont gravées dans sa tête au fer rouge et qu'elle n'arrive pas vraiment à croire qu'elle serait une bonne mère?

Il reçoit le baiser avec plaisir, la corsaire est facile à vivre somme toute pour le moment et pleine de petit geste mignon et surprenant. Puis le pilote de cette marche nocturne dans les rues de Tortuga commande aux jambes de Zélio de se remettre en marche. Alors il s'exécute poliment.

- j'avais noté. Je me faisais la réflexion qu'ils seraient mieux à terre… mais je connais pas vraiment les façons de vivre pirate. Je connais rien aux pirates en fait. dit-il en souriant. Je pense que je voudrais sans doute faire enfermer la majorité d'entre eux. Une chance que je sois pas dans les forces de l'ordre et que l'arrestation citoyenne ne soit pas mon genre.

Il avance toujours sans savoir où elle le guide, il n'est pas curieux et verra bien quand ils arriveront à destination.

- il faut deux choses pour être une mère. La volonté et avoir de l'amour à revendre pour les autres, sans rien attendre en retour, juste de l'amour à dispenser pour permettre à une vie d'éclore et de se développer. dit simplement Zélio.

Il faut aussi pouvoir protéger cette vie… mais les parents aussi incapable que Zélio ne sont pas monnaie courante. Généralement la plupart des enfants atteignent l'âge adulte s'ils ont des parents aimant qui tiennent à eux et les mettent à l'abri le temps qu'ils grandissent. Clairement ce qu'il n'a pas su faire.

Ses réflexions la font rire. Et rire aussi fait du bien, finalement.

"J'en doute pas. J'collerais mon pied au cul à beaucoup d'entre eux aussi, et j'suis pirate dans le sang moi-même, c'est pour dire."

La blonde lui lance une œillade espiègle et resserre un instant sa prise sur la fesse de Zélio avant d'ajouter :

"Et ouais, on va dire que j'ai d'la chance, allez."

Elle se sent mieux maintenant que le sujet à quitter les eaux de tempêtes pour des courants moins houleux. Celui des enfants, même abordés ainsi, reste particulièrement sensible pour Hannabeth, mais l'hypothétique rend la chose moins personnelle. Les paroles de Zélio lui arrachent même un bref sourire lorsqu'elle réalise qu'il décrit à très peu de choses près comment elle agit envers son équipage. Au final, elle a déjà plusieurs enfants. Quelque 130 gamins perdus, dépareillés et autres moutons noirs. Parce que si elle n'est pas démonstrative, elle les aime tous, de tout ce qu'elle est capable de donner, et ne souhaite que les protéger et les voir heureux. Serait-elle capable d'abaisser ses dernières barrières pour un enfant?

"Un jour, peut-être."

La manière dont il aborde le sujet, impersonnelle, mais pourtant intimement et avec assurance, lui donne la vague impression qu'il sait pertinemment de quoi il parle. Elle se demande alors s'il n'a pas des enfants à lui quelque part. Peut-être laissés sur sa planète natale pour une raison trop compliquée à imaginer.

Un jour peut-être… il est obligé de lui donner le coup de grâce. C'est mal mais c'est plus fort que lui.

- a ton âge tu devrais pas repousser ça à plus tard. Tu es vieille tu sais. lâche-t-il finalement en sachant pertinemment qu'il est un horrible personnage pour le coup.

Mais ça lui fait du bien de tout tourner en dérision. Le sujet des enfants est trop lourd pour qu'il reste grave et sérieux. Trop de stress et de colère y sont associés et ce n'est pas ce qu'il désire montrer.

"J't'emmerde, de Alvadaro. J'te rappelle que t'as qu'un an d'moins que moi, ce qui fait de toi une tout aussi vieille bique si j'en suis une."

Malgré ses paroles, elle rit à sa nouvelle connerie puis, délaissant les sujets douloureux, elle se penche vers lui et fait mine d'examiner sa barbe. Elle pointe finalement un endroit au hasard sur sa mâchoire et lâche :

"Ouai, désolé d'te l'apprendre papy, mais t'as des cheveux et des poils blancs. C'est pour tout bientôt la purée et le déambulateur."

Marchant toujours sans but précis, leurs pas les ont menés vers une espère de parc qui a autrefois de l’être vert. Une initiative ratée de mettre un peu de verdure sur ce caillou tout gris. Au vu de la motivation des permanents du coin pour ce genre de projet, il est même étonnant qu'il ait vu le jour. L'endroit possède également une sorte de belvédère surplombant la ville, mais une belle vue sur Tortuga... ça reste une vue sur Tortuga, quoi.

Il sourit aux réactions de la belle et ne réagit pas à son insinuation sur ses poils et cheveux blancs.

- tu sais bien que la nature est mal faite voyons. Les hommes murissent avec l'âge là où les femmes vieillissent. Je vais devenir de plus en plus craquant pour les femmes. dit-il serein et pas inquiet du tout pour le coup.

Il regarde le parc, enfin ce qu'il en reste et s'étonne même de son existence. Sans doute un pirate ayant gagné beaucoup d'argent mais tellement recherché qu'il n'a pu faire autrement que finir ses vieux jours ici. Il devait vouloir un lieu un peu différent qui lui rappelle ses origines. L'initiative n'a pas du lui survivre… décidément les pirates ne comprennent rien à rien.

- c'est un endroit sympa… d'aucun dirait romantique. Tu me sors les violons biquette ? demande Zélio avec un sourire narquois.

Est-ce qu'elle vient de lui marcher sur les orteils, là? Oups, désolé, ce n’était pas voulu.

"À dire des conneries pareilles, t'as le charme d'une vieille barre de nutrisoja, alors rêve pas trop en couleur."

C'est sympa de se chamailler comme ça. Elle n'a pas eu l'occasion de le faire depuis trop longtemps. C'est simple, pas compliqué et ils ne se font pas chier avec de possibles blessures d’orgueils. Ça les amuse et puis c'est tout.

"Romantique?"

Beth pointe le parc du doigt, soulignant l'absurdité du propos.

"Cet endroit est une décharge, et y a que des plantes mortes. Dois-y avoir des chats morts dans les coins en plus. Ou des gens, tiens."

Une idée lui vit et un air de défi caractéristique vient se glisser sur ses traits.

"Par contre, biquet, si tu veux me chanter la sérénade au clair de lune, ça pourrait bien rendre cet endroit plus romantique. Mais j't'en voudrais pas si t'as voix de vieux croûton te gêne et que tu préfère pas."

Aie… elle vient de lui marcher sur les pieds. Mais bon à son âge c'est normal de plus se contrôler totalement. Tant qu'elle ne se fait pas pipi dessus c'est le plus important. Il jette un œil au parc et le trouve pas si moisi que ça si on excepte l'absence de verdure là où elle est pourtant attendue dans ce genre d'endroit.

- je t'ai dit que je connaissais rien aux pirates. C'est peut-être votre définition d'un rencart romantique, alors je voulez pas te vexer. Mais visiblement on a les même critères en fait. Et j'en conclue que tu m'as embarqué dans ce parc moisi avec l'intention de me faire découvrir le pire endroit du coin ? Tu veux me faire fuir ? Ca marchera pas, j'ai d'abord un ou deux trucs à faire avant de disparaitre. dit-il en venant serrer lui aussi le postérieur de la belle. Et soit certaine que comme la dernière fois elles se souviendront de mon passage.

Ensuite elle le regarde d'un air de défi. Chanter… même pas en rêve. Enfin si mais à une condition. Il tire un doublon et le jette en l'air.

Pile, je chante … et c'est pas un cadeau. Face, tu lapes dance à mon profit. dit-il en montrant le banc. Il rattrape la pièce et la garde caché sur son avant bras en attendant l'accord de la belle.

La blonde secoue la tête, faussement exaspérée. Mais en vérité, plus il débite de conneries plus elle s'amuse, et c'est aussi pour cela qu'elle lui donne si facilement la réplique.

"On t'a déjà dit que t'avais le QI d'un radis? Nous sommes pirates, Zélio, pas une nouvelle sorte d'humanoïdes étranges ayant pour habitudes reproductives de chercher l'endroit le plus crade possible! Non, mais... En plus j'ai jamais foutu les pieds ici. Je sais à peu près où on est, mais c'est tout. Ça m'semblait pas important d'regarder le nom des rues."

Puis elle hausse les épaules, désinvolte, égale à elle-même. Puis vient le défi qu'elle lui lance et qu'il ne manque pas de rendre à double tranchant. Ah le con. Il mériterait une baffe juste pour avoir proposé qu'elle lui fasse une telle danse dans un lieu public. Mais elle croise les bras et le toise avec fierté et défi.

"Moi qui croyais que t'aimais pas les trucs de chance pure... Allez vas-y, lance."

Conrad découvre donc la pièce sur son avant bras. Et …. c'est face. Il a un sourire rassuré subitement, il avait vraiment pas envie de chanter. Il aime pas ça. Il chante faux en général, dommage car il a une belle voix.

- j'aime pas. Mais parfois dans les moments les plus graves la chance est là pour moi. Sans doute pour compenser mon QI de radis. dit-il avec un grand sourire satisfait.

Il se rapproche ensuite de la capitaine pirate et vient lui voler un baiser.

- tu es sûr que tu peux relever le défi ? qu'il demande alors les yeux pleins d'étincelles amusées.

Face. Fuck. Hannabeth ferme les yeux en rejetant la tête vers l'arrière dans un grognement dépité. Il vient l'embrasser et si elle lui retourne son baiser, c'est avec l'expression de quelqu'un fait la tête.

"T'as de la chance d'avoir une belle gueule, toi..."

Elle grogne de nouveau, l'idée de faire une lapes dance dans un lieu public, même si ce dernier est actuellement désert, ne l'enchantant absolument pas. Pas question qu'elle se désiste néanmoins, un défi est un défi. Aussi, Zélio n'avait pas besoin de la défier davantage, mais sa dernière phrase a au moins le mérite de requinquer la blonde qui redresse alors les épaules avec une lueur presque mauvaise dans ses yeux clairs.

"Tu m'as rencontré? Bien sûr que j'peux. Depuis quand j'relève pas un défi?"

Comme si on venait d'insulter sa fierté personnelle, Beth attrape le collet de Zélio et le traine derrière elle jusqu'au banc désigné pour l'y asseoir. La malice revient néanmoins rapidement dans ses yeux lorsqu'elle lui glisse à l'oreille au passage :

"Dommage pour toi, si t'avais pas précisé de faire ça en publique, j'aurais pu joindre la lapes danse a un strip-tease."

Il se laisse faire et emmener jusqu'au banc. Il ne doutait pas une seconde qu'elle pouvait relever ce genre de défi. C'est pas comme si le lieu était l'embarcadère devant l'Albatros non plus. Le voilà donc installé sur son banc avec la belle capitaine pirate qui vient lui mettre l'eau à la bouche.

- tu pourras te rattraper plus tard. dit-il avec un sourire amusé. Et si tu es sage j'en ferais de même.

Il sait danser, et après moult paris gagnés et perdus il a appris quelques trucs de strip teaser. Il en use rarement mais pour le coup ça peut être amusant. En attendant il compte bien profiter du spectacle durement gagné. Pour une fois qu'il gagne contre elle.