Le Passeur trinitaire et la Teigne Mo'at

Enguerrand regarde le capitaine et se dit que les impériaux sont parfois bien stupides avec leur idée sur l'honneur. D'autant plus que ça n'empêche pas leur nation d'être corrompue comme les autres au final. On voit bien qu'il a mal malgré son visage impassible.
Il reste impassible à la question. Il n'est surpris de rien, il s'attend à tout de la part des capitaines pirates.

Un seul. A la manche de ma veste. dit simplement le pirate qui en effet ne porte pas sa veste qui n'est visible nulle part.

Il a beaucoup d'armes sur lui. Couteaux, épées et au moins trois pistolets. Tous d'un type différent. Mais c'est les bras noirs comme la nuit et parcouru de petites coupures en tout genre. Visiblement l'homme n'a pas les moyens pour un entretien cosmétique de ses prothèses.

La veste, il s'en souvient, il l'a vue lors de leur premier entretien, un trenchcoat noir qui n'est pas visible pour le moment. Connaissant Seik'el, elle a probablement devancé sa demande et l'a confié aux tailleurs. Après tout, ils étaient là aussi pour ça. Aussi idiot que cela pouvait paraître, c'était le manque de praticité et de confort d'habits de moindre qualité qui l'avaient le plus dérangé dans sa transition entre Asturia et Nieves et il appréciait de se dire que son équipage, lui, ne souffrait pas de ce genre de désagrément stupide. En cherchant le manteau, il remarque les armes ainsi que le mauvais état des prothèses. Mais il ne dit rien. Lui-même est venu sans même un bouclier personnel. Il serait facile de le tuer. Moins de sortir d'ici vivant après.

« Avez-vous pu attraper les papiers que je vous avais demandés ? »

C'est une des raisons pour lesquelles il avait demandé la présence de Seik'el. Malgré tout ce que l'on pouvait dire ou penser d'elle, elle était d'une efficacité redoutable pour éplucher les livres de compte.

Des papiers ? Oho. Intéressant, ça. Seik'el observe à nouveau l'armurerie ambulante, en attente d'une réponse qui, sans doute, va l'impliquer d'une façon ou d'une autre. A moins qu'elle soit là juste pour servir de bouclier humain au cas où Cassagnac déciderait d'utiliser l'un ou l'autre de ses joujoux. D'un côté, ça lui va aussi.

Enguerrand va chercher ce qu'il a trouvé et qu'il garde dans son dos à coté des chargeurs. C'est un simple Hcom. Vieux et décrépi.

- pas de papier. Mais une station d'accueil pour son HCom. dit simplement le pirate.

Qui dit station d'accueil dit travail bureautique dessus. Maintenant il va falloir lui faire cracher son mot de passe ou trouver un hacker digne de ce nom. Elle fait pas la couture d'intendante, peut-être qu'elle a des compétences cachées. Ou pas.

Il hoche la tête. Il avait prévu l'éventualité de données numériques même s'il avait toujours une préférence très "hors système" pour le papier et l'encre. Il fait signe à l'intendante de prendre doucement l'appareil au pirate.

"Ce sera parfait. Merci Monsieur. Seik'el, vous irez voir un des programmeurs de bord et vous m'analyserez personnellement les données. C'est un comptable, s'il a engagé des mercenaires, cela se verra d'une façon ou d'une autre sur ses comptes. S'il a simplement reçu un paiement pour des informations, cela se verra également. Je veux que vous me rapportiez toute anomalie, tout renseignement qui pourrait me servir de levier lors de l'interrogation. Vous avez douze heures. Ne mettez personne d'autre sur le coup, ces documents sont sensibles et doivent rester entre nous. Si vous avez besoin d'un délai supplémentaire, prévenez moi le plus tôt possible. Monsieur de Cassagnac, souhaitez-vous avoir le fin mot de l'histoire ou préférez-vous retrouver votre indépendance ? Cela peut prendre un certain temps. L'attente tend à rendre les prisonniers plus bavards."

Seik'el préfère aussi le papier, le concret, la redécouverte de la valeur des efforts fournis pour apprendre à lire et à écrire, le souvenir du Zéphyr, voilier de papier à la coque marbrée par ses doigts fébriles et première pièce de sa collection d'origamis. Les documents électroniques restent néanmoins la norme, largement plébiscités par des gens qui oublient un peu trop qu'on peut faire parler les appareils vidés plus sûrement qu'un livre où manquent quelques feuilles.

"Bien Capitaine." elle répond fermement, refermant les doigts sur l'objet. Elle sait qui aller voir pour que rien ne s'ébruite, elle sait que ses insomnies seront mises à profit pour accomplir la tâche dans les délais - si elle prend quelques minutes de sieste pendant que le gars lui décrypte le bazar, parce que la journée à poireauter en attendant Cassagnac commence à se faire sentir même pour elle.

En attendant qu'on lui donne son congé ou des consignes complémentaires, elle étudie l'aspect du com pour se faire une première idée du degré de maniaquerie du bonhomme.

Enguerrand tend le Hcom à la Mo'at. C'est un appareil ancien, mais apprécié à l'époque pour son système intégré de chiffrement des données. Le pirate réfléchit ensuite rapidement., il a mis le pied dans l'histoire et le commanditaire pourrait prendre mal son intervention alors il préfère connaitre son nom .... et son avenir.

- Je suis patient. dit simplement le Passeur. C'est le Naughty dog que j'ai entraperçu tantôt ?

Il tire une nouvelle bouffée de son cigare. Si le Ichabod est sur ce navire c'est que les rumeurs disant qu'il avait tourné épave ne sont plus d'actualités .. ou fausses. Ça ne ferait pas de mal d'avoir une discussion avec cet homme. il avait apprécié l'entraîner à l'époque.

"Ichabod nous a rejoint il y a quelques temps. C'est notre Quartier-Maître." Le reste, ce sera à l'homme lui-même de le raconter à son camarade s'il le désire. Ne connaissant rien des relations entre les deux hommes, Jaziel préfère ne pas s'en mêler et laisser les choses se faire. Il aurait bien l'utilité d'un homme comme Enguerrand à bord. Peut-être. S'il le désire déjà. Et si ce qu'il voit lui continue à lui plaire. Pour le moment, il reste neutre. Il ne fait pas de proposition, il attend de voir et le laisse inspecter l'équipage. Il ne cherche pas un équipage qui flambe, il cherche une vraie alchimie entre les êtres. Il veut des gens fidèles à l'Iceberg autant qu'à lui. Et cela ne se fait pas sur une réputation, c'est quelque chose qui se construit sur le temps.

"Seik'el, trouvez une cabine à notre invité." Il y en avait quelques unes pour les passagers occasionnels. "Celle de Laylia fera très bien l'affaire. Monsieur de Cassagnac, vous pouvez circuler librement dans la majeure partie de l'Iceberg. Je vous demanderais seulement de ne pas aller en salle des machines, dans l'armurerie ou près des cellules sans être accompagné d'un officier. Votre manteau vous sera rendu dans votre cabine dès qu'il sera réparé."

Seik'el plisse légèrement les lèvres, déjà concentrée sur la tâche à venir. Il a quelques années ce truc, le mec est prudent mais pas assez pour suivre l'évolution des technologies, à ce qu'il semblerait. Et il a des choses à cacher. Elle préfère ça qu'un modèle récent qui serait plus délicat à faire céder. Du coin de l'oreille, elle note qu'Enguerrand connaît Ichabod, au moins de réputation. Elle aime pas trop le surnom d'Ichabod, elle. Elle aime pas trop les surnoms en général. Les gens sont tellement plus que ça. Même les deux glaçons à table, là. Elle relève la tête en entendant son nom.

"Tout de suite Capitaine." qu'elle répond en se levant pour s'exécuter. "Si vous voulez bien me suivre ?" Comme s'il veut pas c'est pareil, elle attend pas la réponse, mais interroge le blessé en silence. Elle aimerait bien qu'il vienne lui aussi, histoire qu'il soit pas tout seul dans son état, mais c'est pas comme si elle pouvait l'obliger. De toute façon, le souvenir de la fois où il a cru qu'elle lui faisait des avances est encore suffisamment cuisant pour la retenir de poser la question à voix haute.

Enguerrand se lève avec la fluidité d'un chat. Il n'a pas vraiment une grande carcasse, il est grand sans être immense et musclé sans être musculeux. C'est un guerrier parfait selon les normes des maitres d'armes. Il jette un oeil au capitaine.

Le faire attendre c'est bien. Il stresse pendant qu'on se repose. dit Enguerrand.

Ça pourrait être une phrase comme il les déteste. Les phrases évidentes. Mais il y a un deuxième sens vaguement caché. Il n'a pas besoin de vraiment se reposer lui. Le capitaine têtu comme une mule en face de lui par contre. Normalement c'est un homme subtil alors il saisira le message. Après il en fera ce qu'il en veut. Il n'est pas capitaine le duelliste et ne connait pas la pression que subissent les capitaines. Calypso l'en préserve d'ailleurs.

Il suivra la Mo'at quand elle se mettre en route.