May those blue lights be fairy lights

111 ADD

Je suis dans la merde... Noire... Pas comme la nuit ici, mais mon état actuel ne me permet pas exactement de profiter du paysage. C'était censé être un bon séjour, juré ! Rejoindre l'équipage du Venimeux sur Renaissance, fêter avec eux l'écoulement de leur putain de butin, faire du tourisme et se barrer. J'avais pas exactement prévu que ces connards se retournent contre moi... Les clients mécontents ça arrivait, okay ! Mais j'avais fait un boulot de dingue pour eux ! Alors comment j'étais censé savoir que ceux-là voulaient juste régler leurs comptes avec un membre de l'équipage de la Vanguardia ? EX-MEMBRE D'ÉQUIPAGE, BORDEL ! Quant à savoir comment ils avaient fait le lien entre les corsaires et moi... Mystère total. Je veux dire... Je ne les avais jamais croisés sous mon vrai nom ! Je te jure, She, si j'en sors vivant tu vas en entendre parler...

J'avais été jeté comme un sac à patates dans le trou du cul de la jungle de Renaissance, sans armes, les mains attachées dans le dos. Merde, merde, merde... Ils avaient fait les choses bien, ces cons-là...


J'avais réussi à bouger mes fesses jusqu'à un grand arbre plein de vignes et j'essayais tant bien que mal de défaire le nœud qui m'enserrait les poignets en essayant au maximum de ne pas penser à la multitude de petits regards qui me fixaient et à ma possible et très probable mort imminente.
Après quinze bonnes minutes, mes mains étaient enfin libres. Couvertes d'égratignures et probablement bourrés d'échardes, mais libres. Elles seraient assorties à ma gueule, tiens. Être jeté dans la jungle n'a rien de marrant, non... Je pensais qu'il ne me restait plus qu'à me faire tout petit et attendre le lever du jour... Quand le PIRE... PUTAIN... De... Calypso me protège, j'ai entendu des bruits de pas se rapprocher... Bête ? Homme ? Aucune de ces deux options ne me rassurait et je priais la Déesse pour que les arbres de cette planète de dingue ne soient pas de ceux qui bougent pour dévorer leurs proies...

Ils n'ont pas vu le temps filer. La nuit est installée maintenant, mais pas de quoi alarmer les deux compères. Scarlett n'en est pas à son premier essai. À la lueur de la jungle, leurs pas prennent la direction de leur foyer. Kero vole devant, tout à la joie de cet environnement. Ici, il abandonne sa timidité et souvent file hors de portée de vue. Pas d'inquiétude pour Scarlett, ils connaissent très bien cette partie de la jungle. Une lourde sacoche en cuir frappe sa hanche en cadence. Elle en a profité pour ramener certains spécimens pour sa mère.

La jeune femme inspire à pleins poumons, s'arrête de temps en temps pour écouter les ténèbres bruissantes. Les lieux sont si méconnaissables à la faveur de l'astre nocturne, qu'il est aisé de replonger dans ses terreurs enfantines. D'ailleurs, en parlant de peur panique, il y en a un qui vient d'avoir la frousse de sa vie. Kero a rebroussé chemin si vite qu'il percute Scarlett avant de chercher asile dans sa chevelure. Cette dernière peine à le rassurer. Des bruits sur sa gauche, elle se fige. Après réflexion, la jeune femme s'enfonce dans la végétation. Elle ne craint pas un animal, non. Au vu de la réaction du Kaiji'Opin, elle opterait plutôt pour un humain. Effectivement, elle ne tarde guère à tomber sur un bipède. Après une rapide inspection, il n'a pas l'air à son aise.

- Tout va bien ?

HA ! Calypso toute puissante ! Vous m'avez foutu une d'ces trouilles !, m'écriais-je en bégayant.

Impossible de remarquer cette femme avant que cette dernière ne sorte des buissons, malgré la clarté prodiguée par la végétation du coin. Heureusement pour moi, ce n'est pas une des membres de l'équipage du Venimeux... Encore que... Quelqu'un d'avisé me répondrait que je peux difficilement connaître un équipage quand ce dernier vient de me condamner à mort. N'empêche...

Qu'est-ce que j'suis content d'vous voir, vous avez pas idée !

On ne m'a pas du tout offert en pâture à la jungle, non. Juste... Un touriste perdu fera l'affaire. Je me redresse contre le tronc de l'arbre et tente tant bien que mal de reprendre mon sang froid.

Vous... N'avez pas l'air perdue.

Bravo, quelle répartie, non, vraiment. Je remarque l'étrange créature qui tente désespérément de se faire passer pour la pince à cheveux de la rouquine... Et les cicatrices impressionnantes, rendues étonnamment visibles à la lumière de la mousse, qui balafraient tout le côté droit de son visage. Le genre de cicatrices causées par une bête enragée.

Belamy. C'est moi. Et je crois que n'ai jamais été aussi heureux de rencontrer quelqu'un.

J'aurais bien tendu ma main pour serrer la sienne, mais je préfère éviter de trop attirer l'attention sur son état déplorable.

Scarlett ne peut s'empêcher de sourire face à la réaction de l'homme. Il parle vite, bégaie un peu. Le soulagement est plus que clair dans toute son attitude. Il semble reprendre un peu contenance, tant mieux. Il est plus facile de converser avec quelqu'un de calme, enfin si l'on peut dire. Surtout de nuit et dans un tel environnement.

- Scarlett et, effectivement, je ne suis pas perdue.

Kero ne sort pas la tête de la chevelure de la jeune femme, seule sa queue tombe sur son épaule. Calé contre son corps chaud, doucement il se calme. Scarlett s'approche un peu du dénommé Belamy et note le piteux état dans lequel il se trouve. Depuis combien de temps est-il perdu ? Ce n'est pas vraiment le temps des questions de ce genre. Toutefois, elle évitera à l'homme de quérir son aide. Il paraîtrait qu'ils n'aiment pas ça, demander leur chemin...

- Vous venez d'où exactement ? Histoire que je ne vous perde pas un peu plus ?

Un sourire espiègle étire ses lèvres. Non pas qu'elle se moque, elle imagine seulement la situation. Jetant un œil aux alentours, elle se déplace sur le côté pour chercher d'éventuelles traces. Sa main glisse dans sa sacoche et en ressort une lampe. Elle éclaire le sol, mais aussi les buissons ras. Par moment, elle reporte son attention sur l'homme.

Que c'est bon de rire ! L'espièglerie de ma sauveuse me fait reprendre contenance et me tire un rire léger. Pour ce qui est de mon itinéraire, on m'a traîné ici de force, comment suis-je censé pouvoir me rappeler du chemin emprunté, hein ?

A vrai dire, je n'en ai pas la moindre idée.

Son lézard ne me quitte pas des yeux alors que sa maîtresse commence à sortir une lampe de poche et se met à scruter le sol. Argh... Il fallait que je tombe sur une curieuse, hein ?

Vous... Cherchez des champignons ? Il me semble en avoir vu là-bas.

Jouer au touriste idiot, pourquoi pas ? Après tout, c'est dans mes cordes. C'est donc avec une candeur absolue que je désigne un endroit à l'opposé de l'endroit où ces crétins auraient bien pu me faire sauter la cervelle. Rencontrer un type pas net dans la jungle a de quoi en faire flipper plus d'un et sincèrement, je n'ai aucune envie que la prénommée Scarlett m'abandonne à mon sort vraiment peu réjouissant.

Scarlett se fige à sa question et tourne la tête pour voir la direction qu'il montre. C'est à son tour de rire, tellement cela lui paraît incongru. Quelques secondes lui sont nécessaires pour taire sa légère hilarité.

- Des champignons ? Non pas vraiment. Je cherchais plutôt des traces pour éventuellement déterminer la direction d'où vous veniez. Mais avec cette obscurité, je ne vais pas surestimer mes compétences.

À bien y réfléchir, cela doit pouvoir se faire, mais elle n'a pas la capacité de voir dans le noir et que dire de la lueur d'une torche. Elle finit par éteindre sa lampe et la ranger. La jeune femme en profite pour récupérer quelques baies destinées à Kero. Ce dernier ne se fait pas prier.

- Le plus simple est de regagner mon speeder, je pourrai ensuite vous déposer dans la ville la plus proche.

La jeune femme va pour ouvrir la marche puis se ravise. À nouveau, elle se tourne vers Belamy.

- Je manque à mes devoirs. Voulez-vous boire un peu d'eau ?

Ce faisant, elle active son Hcom afin de prévenir ses parents. Pas question qu'ils ne s'affolent.

Une mystérieuse sauveuse, qui arrive en speeder dans la jungle pour venir à la rescousse des abrutis dans mon genre perdus dans les bois ? Et qui apporte de l'eau avec ? C'est trop beau pour être vrai !

J'éclate de rire.

Allez, avouez tout, vous veniez enterrer un cadavre et je suis le prochain sur votre liste de tueuse psychopate, c'est ça ?... Enfin si vous avez de l'eau ce serait pas de refus. Vous pourrez me tuer après, promis.

Maintenant que je ne me sens plus exactement en danger de mort imminente, le spectacle de la jungle nocturne est à couper le souffle. Difficile de croire que cet endroit est peuplé de bêtes sauv...
Un cri semblable au bruit que ferait un arbre dans sa chute retentit et son écho fait résonner la jungle toute entière. Il a l'air loin, certes... Mais je me rapproche quand même de Scarlett. En plus j'ai vu des petits yeux jaunes clignoter dans l'arbre et ça me fout un peu les jetons.

Scarlett le regarde un moment, puis sourit, amusée. À le voir faire le malin ainsi, on sent bien qu'il est plus que soulagé de ne plus être seul. La jungle ne doit pas être son terrain de prédilection. Du moins, surtout la nuit. Arriver en speeder dans la jungle, c'est très drôle et ça confirme qu'il n'a pas dû y mettre souvent les pieds.

- Allez savoir.

Elle lui tend une gourde réfrigérante.

- Je n'ai pas l'habitude de me promener ici sans quelques réserves. On peut se perdre facilement.

Elle est toute fière de cette petite pique, mais n'en montre rien, enfin si un peu. La jungle, c'est son truc après l'espace et elle y est aussi à l'aise qu'un poisson dans l'eau. La jeune femme se tend légèrement au cri qui résonne dans la nuit. Probablement des swiryas, il est temps de se mettre en route.

- On devrait atteindre mon speeder d'ici une petite heure. Peut-être moins, enfin ça dépendra de votre rythme.

La gourde retrouve sa place dans la sacoche alors que Scarlett ouvre le chemin.

Aouch, touché. Mais elle était facile, celle-là, répondis-je en grimaçant. Encore un peu et j'aurais cru que ma remarque avait fait un bide. Pas très bon public, celle-là. Merci pour la gourde.

Hey, on va pas être ingrat avec celle qui vient sauver sa vie.

Une heure ? Un vrai jeu d'enfant. Au cas où ce ne serait pas évident, la jungle est mon élément naturel.

Et c'est pour ça que je me trimballe fringué en putain de comptable. Parce que ce serait beaucoup trop simple sinon. Mais bon, l'ironie me permet de soulager un peu l'atmosphère. Boosté par le cri du monst... de la charmante bestiole, là-bas, mon instinct de survie se remet en route.

Je vous en prie, passez devant. ça fait longtemps que vous habitez ici ?

Je baratine pour cacher mon stress qui vient de me donner un grand coup de pieds au cul.
... Et ma question ne fait aucun sens...

Pas... Là, exactement. Juste... Qu'est-ce que vous foutez dans la jungle à une heure pareille ?

Je mets enfin le doigt dessus : c'est bizarre. Je suis vivant. Pourquoi se donner la peine d'abandonner un type en pleine jungle alors qu'on aurait pu lui trancher la gorge ? Personnellement, je sais ce que j'aurais fait. Soit ils l'ont fait exprès pour foutre la trouille aux autres membres d'équipage... Soit l'un d'entre eux s'est foiré et ils reviendront me finir plus tard. Dans tous les cas, mieux vaut se presser et déguerpir le plus vite possible.

Le sourire de Scarlett s'élargit à la remarque de Belamy. Il n'a pas tort, elle était plus que facile, mais si tentante.

- Votre élément naturel ? Parfait, on devrait y être dans une demi-heure alors.

Nulle moquerie dans ses dires. Leur progression se fait d'abord naturellement, Kero a repris son envol et les devance. Scarlett a les yeux rivés sur la jungle. Au sol dans un premier temps puis autour d'eux.

- Depuis que je suis née à vrai dire et je finissais ma cueillette. Rassuré ?

La jeune femme s'immobilise et se pousse un peu sur le côté. Elle tend le bras vers plusieurs monticules phosphorescents, parsemant ce qui ressemble à un sentier ténu.

- Evitez de mettre les pieds dessus. C'est une sorte de plante carnivore et les filaments sont enduits d'un anesthésiant assez puissant et un peu hallucinogène.

Reprenant la tête du convoi, elle enjambe chaque tas, sautille à des endroits précis. Ayant fini de traverser, elle se tourne afin de voir la progression de son partenaire nocturne.