Putain Wulf c'est la merde

Il s'en est passé des choses depuis... quelques jours.

J'ai été voir le directeur de l'hôpital, on a pas mal discuté, mais il a pas pu me débaucher à cause de mon contrat avec Anthema. Il avait l'air de penser que c'était du gâchis, mais j'ai plein de numéros utiles dans mon com maintenant, et une promesse que si j'avais besoin d'une lettre pour à peu près n'importe quoi, il était prêt à m'appuyer. On verra c'que ça vaut, mais ça fait plaisir. J'me suis un peu renseigné sur l'état des gens aussi, mais j'ai pas voulu aller leur parler. Des esclavagistes, c'est comme des pirates. C'est comme si j'avais sauvé des pirates. Comme si j'avais sauvé les assassins de papa. Et autant sur le moment ça m'semblait la chose à faire, autant après coup... j'me demande si j'ai bien fait. En sachant très bien que si l'occasion s'présentait, j'referais exactement pareil. Mais je veux pas qu'elle se représente. Jamais.

J'ai gardé contact avec les Mo'ats aussi un peu. J'ai pas compris le quart de la moitié de c'qu'y disaient, comme d'habitude, mais ils avaient l'air super contents. Et moi aussi du coup, surtout quand l'interprète des services sociaux de l'UC ou je sais pas quoi m'a dit qu'ils étaient bien soignés - ça j'l'ai vu, et ça m'a fait tellement mais tellement plaisir de voir ces gamins sans ces horreurs aux poignets - et qu'ils allaient bientôt pouvoir retourner sur Renaissance. J'ai demandé si par hasard j'pouvais pas emprunter les volontaires en attendant, et la femme m'a regardé d'un drôle d'air.

C'est que j'ai mon frère qui rentre bientôt et que son gagne-pain est virtuellement inutilisable, là, alors comme c'est eux qui ont tout cassé à part les portes j'me suis dit qu'ils pourraient aider à nettoyer et tout remettre en place. Par chance ça s'est bien passé.

Avant de nettoyer, évidemment, on a pris douze mille photos. Entre ça, le rapport de la police, et quelques témoignages qu'on a rassemblés des voisins et tout, si le frangin est assuré, ça devrait être bon. Normalement. Je suppose. Je sais pas s'il est assuré.

Et là aujourd'hui j'suis à l'astroport, nerveux comme un Wynnstan au sommet de sa gloire. Pourquoi ? Parce que Cathwulf rentre. Enfin. Plus tôt que prévu, mais enfin. Déjà. Déjà, parce que j'sais pas du tout c'qu'il sait, et que j'sais pas du tout en combien de morceaux il va vouloir me mettre en apprenant le reste.

La vie, c'est la merde. Cette leçon, Cathwulf l'a apprise très jeune quand son père s'est soudain transformé en loque humaine et qu'il a fallu se battre avec l'Union, se battre contre le racisme, se battre contre les gens qui râlent - quatre enfants ça la fout mal, se battre pour rapporter à manger, pour forcer les petits à travailler pour l'avenir même si l'avenir, pour le coup, il n'était devenu qu'un nuage. Cette leçon, la vie l'a rappelée au garçon l'année passée lorsqu'il a perdu son bras et son équipage. Cette leçon, il ne l'a jamais oubliée. Alors son établissement détruit par des esclavagistes alors qu'il était POUR UNE PUTAIN DE FOIS allé faire un truc perso, ça ne l'a pas surpris.

Ca ne veut pas dire qu'il le prend bien.

Il a ébouriffé les cheveux de Noor alors que les informations passaient un reportage sur le Runny, jeté un coup d'oeil à la militaire qu'il ne connait pas assez et a lancé un "faudra remettre notre verre à une autre fois", avant de se tirer. Parce qu'il est comme ça.

Hope, arrive donc déjà, enfin, à ses pieds. Il est le premier à descendre de la passerelle, toujours en Grand Habit noir de deuil et son sac sur l'épaule. Il ne lui faut pas longtemps pour repérer son imbécile de cadet qui n'a pas su protéger son trésor. Et Sarrazin qui n'est pas là... haut les coeur.

Ah. Enfin. Déjà. J'essaie d'avoir l'air à peu près décontracté, vaguement, de pas être roulé en boule dans un coin en me protégeant la tête, mais euh... j'y arrive qu'à moitié. En fait j'ai sûrement l'air d'avoir avalé un balai. Avec le râteau, la pelle, et la bêche. Et lui il a l'air de revenir de... bah d'un enterrement. Ah. Alors c'était pour ça le départ précipité et l'humeur pas commode au bout du com l'autre jour. Suuuper. Allez Wynn, respire. Au pire tu te fais remettre la mâchoire en place, t'as l'habitude. J'arrive à passer au-dessus parce que... ben il faut bien. Mais aussi un peu parce que j'ai sûrement jamais été aussi content d'le voir. Un tout p'tit peu.

J'me décolle de mon pilier et j'vais vers lui. Plus vite ça sera fait...

"Qu'est ce que tu fiches ici ?" Il aurait ajouté "Petite tête" d'habitude mais ça c'est quand il va bien. Quand il est vraiment énervé, les gentils surnoms passent à la trappe. C'est pas comme s'il n'avait que ça à faire de faire le glandu avec un cadet incapable d'aligner deux mots. Ce qu'il se dit surtout c'est qu'il y a probablement une masse de boulot à faire au RA, qu'il aurait pu être en train de faire, que Maman doit être paralysée de terreur, et qu'il aurait du être près d'elle et qu'il a du boulot, qu'il devrait faire au lieu d'attendre "Grand Frère" à la sortie du vaisseau. "T'as peur que je ne me souviennes plus du chemin ?".

Crétin.

"..."

Bon d'un côté fallait pas s'attendre à c'qu'il soit content, hein. De l'autre, j'aurais bien aimé qu'il fasse au moins un peu semblant de s'inquiéter.

"Bonjour à toi aussi, oui je vais bien, non j'ai pas été blessé." je grince. J'ai plus la main bandée mais ma coupure que j'me suis faite tout seul comme un con, on la voit encore. "J'en déduis que t'as vu les infos ?"

Ils ont interviewé des gens, les voisins, tout ça. Moi j'ai rien dit. J'me suis caché dans un trou d'awäk à chaque fois que j'ai vu un com à moins de cent mètres. Il aurait plus manqué qu'on m'demande de dire un truc, tiens.

"Ouais, je suppose qu'on t'a pas expliqué les coms d'urgence interplanétaires dans ton école de grosses têtes." Il est de mauvaise foi et il le sait. C'est pas forcément toujours possible et surtout ça coûte un REIN et si Wynn l'avait fait, il l'aurait senti passer mais la mauvaise foi, ça fait du bien et puis il a besoin de ventiler. Il s'avance et prend le chemin du Runny, passant devant son frère sans lui tendre la main, sans lui faire la bise, sans même lui poser la main sur l'épaule. Au moins il va bien le petit. Enfin il a l'air d'avoir tous ses membres et même tous ses doigts et il l'a pas vu boiter. Plutôt mourir qu'avouer qu'il s'est inquiété. La vie, elle ne peut pas lui en vouloir à ce point LA.

"J'savais même pas où t'étais," ducon, "et ose me dire que tu m'aurais pas arraché la tête de toute façon."

Comme s'il avait besoin d'un prétexte pour ça, tiens. J'me fais complètement snober d'ailleurs, il va vite voir son bébé. Putain. Limite si j'dois pas lui courir derrière pour le rattraper. Bon. Puisqu'il a l'air de déjà plus ou moins savoir à quoi s'en tenir, on va oublier la phase de préparation psychologique. Ca m'aidera à oublier aussi que j'aurais bien aimé avoir un grand frère un peu plus normal, avec qui j'aurais pu parler un peu de tout ça et peut-être, j'sais pas, être un peu écouté et rassuré pour une fois ? Nynniaw est beaucoup trop occupé pour que j'l'embête avec ça... il risque sa peau et tout, avec ces foutues tensions.

"On a commencé à nettoyer. C'est presque nickel. Les réparations et le stock par contre c'est pas encore terminé. J'ai commencé à constituer un dossier au cas où, avec photos et témoignages et tout, mais euh... j'sais pas si t'es assuré ?"

Là j'avoue, j'reste un peu en arrière, pour avoir le temps d'esquiver une éventuelle paire de baffes. Wulf, les assurances et les sous...

"Evidemment que je suis assuré imbécile." Il s'arrête d'un coup sous l'idée et se retourne mais Wynn est loin. Et puis il n'a pas levé la main mais franchement, c'est pas possible d'être à ce point déconnecté des réalités. Est-ce qu'il a oublié c'est des histoires d'assurances à la con qui ont foutu la merde avec papa ? Il inspire et se souvient qu'il n'a jamais rien dit aux petits. Pour les protéger de ces crétins de fonctionnaires coincés et étroits d'esprits. Il est assuré mais il les connait les assurances, elles veulent jamais payer. Elles trouveront le moyen de se dédouaner. Il expire. Contrôle, Cathwulf, contrôle. Laisse passer la colère sur toi. Essaie au moins. Saloperies.

"Raconte moi ce qu'il s'est passé. Oublie RIEN. T'es sensé être bon à faire des rapports non ?"

Iiih. Non ça va. J'crois. Il est assuré, bon, tant mieux, j'avais peur qu'il ait décidé qu'ça servait à rien vu les soucis qu'on avait déjà eus avec eux. J'ai pas du tout envie de tout raconter par contre. Genre du tout. Du. Tout. C'était déjà dur quand il a fallu en parler à m'sieur Palomino juste après, alors à lui des jours plus tard... Euh.

"J'fais des rapports écrits sur des trucs qui impliquent pas ce genre d'horreurs, d'habitude." je marmonne. Mais ce que Wulf veut... "J'suis arrivé à l'heure, Audrey était déjà là, on a coupé des tomates. Y a des gens qui sont arrivés, des clients quoi. Normal. Y avait m'sieur de Cassagnac là d'ailleurs. Tu sais j'crois qu'tu pourras lui dire merci la prochaine fois qu'il vient à lui." Comprendre "tu pourrais le laisser bouffer à l'oeil jusqu'à la fin de tes jours, ça serait pas cher payé", mais c'est pas le moment de ce genre de... d'initiative, on va dire. "Et puis d'un coup ils sont tous arrivés, les Mo'ats j'veux dire. Ils étaient... je sais pas. Plein." Un geste vague. "Ils avaient peur, mais genre peur tu vois ? Genre plus que moi. On a un peu réussi à les calmer avec Audrey. Elle leur a donné les tomates et euh... y avait un petit qui pleurait, genre deux-trois ans ? J'sais pas ? Alors j'lui ai chanté une comptine de maman." Je sors les premières notes, juste pour qu'il voie.

Ouais il voit. Il a pas très envie d'en entendre plus. Des comptines de maman, hein, pas du reste. Leur donner des tomates. Pauvres Mo'at. Genre des tomates quoi. T'es prisonniers et qu'est ce qu'on te donne, même pas des oranges, des tomates. En plus, les tomates ça coûte cher et ça se garde pas. Crétins. Enfin, Audrey a fait ce qu'elle a pu hein, il peut pas VRAIMENT lui en vouloir. Il aimerait bien. Il a besoin que sa haine se fixe sur quelque chose. Quelque chose d'autre que cette chienne de vie qui s'obstine à lui pourrir la vie. Il reprend sa marche, plus doucement pour laisser son frère rester à son niveau. Pas envie de gueuler. "Au fait. Y a quoi de cassé, combien de sous de pertes, une estimation du temps avant réouverture ? Comment va maman ? Elle est au courant ?"

Ah il veut plus que j'raconte on dirait. Tant mieux. Sauf que euh...

"Maman va bien. Elle était à l'appart, j'suis allé la voir le soir. J'crois pas qu'elle ait vu dans quel état j'étais alors j'ai rien dit." Ca m'a pas empêché de retourner - délicatement - la maison pour essayer de trouver des papiers utiles, sans grande conviction mais elle gère avec Wulf officiellement, donc j'risquais rien de faire un tour. Et le reste euh... on va faire comme si j'avais oublié qu'il avait posé la question ?

"ouais, j'irais la voir quand même ce soir, on sait jamais. Elle dit rien mais elle a oublié d'être conne." La mère dont il se souvient laissait pas grand chose passer. La nouvelle...il ne sait jamais ce qu'elle pense. Il fait semblant comme ça, pour que les petits imaginent que quelqu'un au moins sait gérer et puis ça lui donne une autorité mais c'est comme tout depuis l'accident du père, c'est de l'impro totale. En vérité, Wulf ne sait pas vraiment ce qu'il fait ni comment il va se sortir de ce merdier.

Il aurait bien aimé en vouloir à son cadet, du coup, mais il faut croire que ça aussi, ça va pas être possible.

Ca fait chier.

"Et le Runny ?"

Sur un malentendu, ça aurait pu passer, mais... faut croire que non. Allez Wynn, courage. T'as survécu à tout ça... en faisant un malaise, en te tassant dans un coin et en ouvrant pas la porte de l'étage... mais t'as survécu. C'était quand même vachement plus dangereux que Wulf, non ?

Meh. Pas sûr.

"Y a la moitié des bouteilles cassées, les trois portes qu'ils ont explosées, explosées avec des explosifs, une partie des chaises, y a des tables qui ont pris des coups quand ils les ont utilisées comme barricade, je sais pas à partir de quel point tu veux les changer. Et le coin du comptoir. Il va bien mais..." Mais y avait des trucs vraiment glauques sur le coin du comptoir. "...j'aimerais bien qu'tu l'changes quand même. Le temps avant réouverture je sais pas. On avance bien, mais je sais pas."

Ouais, "on". Le personnel et moi et une bonne partie des Mo'ats. Et des gens que j'ai jamais vus de ma vie. Et les pertes euh... on réessaie de les faire passer sous le tapis ?

Cathwulf ne dit rien. Il aligne, il calcule. Toutes les bouteilles n'ont pas la même valeur par exemple mais les mo'at, ça, ils ne le savent pas et on du prendre au hasard. Donc la moitié peut-être, sur un prix moyen ? Des. C'est quoi comme nombre, ça, des ? On voit bien qu'il n'a jamais fait d'inventaire le petit. Et Sarrazin qui n'est pas là, deuxième prise. Il soupire encore, avec un grognement qui va bien et qui se niche au milieu. Et puis, soudain, LA question.

"C'est qui, ON ?"

Ouais, il est ptet lent, le Wulf, mais faut pas lui expliquer longtemps. A moins que ce soit le contraire ?

Ouf, souci détourné - provisoirement. Ca j'peux répondre.

"Bah moi." L'évidence. "Audrey. Les autres employés. Pis j'suis allé chercher les Mo'ats, maintenant qu'ils sont calmes et pris en charge et qu'on peut prendre le temps de leur expliquer. Comme ils ont cassé pas mal de trucs et qu'ils nous en doivent une belle, ils aident à nettoyer, faire le ménage, tout ça. Pis les filles de l'étage aussi j'crois, 'fin certaines en tout cas vu qu'elles peuvent plus bosser. Elles font la traduction. Pis euh, des clients j'imagine, et des gens qui ont dû voir cette histoire aux infos. Là y a plus grand-chose à faire alors on est moins, pis ils ont livré et monté les portes neuves alors on a plus besoin de monter la garde."

"Tu laisses des gens qu'on ne connait pas s'occuper des stocks et des marchandises alors qu'on pas fait d'inventaire ? Des esclaves qu'on fait bosser pour rien ? Des CLIENTS ?" Sa voix est devenu plus grave, et on y sent la colère qui la fait trembler. Saloperie. Qu'est ce qui leur passe par la tête aux jeunes ? A quoi pensent-ils ? Il aurait espéré mieux d'Audrey... mais peut-être n'avait-elle pas osé râler ou dire quoi que ce soit.

"Mais non pas des stocks ducon ! Est-ce que j'ai parlé des stocks ?!" Je craque. C'est pas vrai, mais qu'est-ce qu'il est con ce type, ils l'ont adopté ou quoi ?! "J'ai parlé. Du. Ménage. T'as pas vu comment c'était, toi. Y avait du sang partout. Et d'autres trucs qui sont censés rester dans les gens et pas couler par terre. On était pas trop de tout c'monde pour tout nettoyer, tu peux m'croire. Pis on a réparé c'qu'on pouvait réparer. Audrey a surveillé qu'y ait pas des voleurs qui s'ramènent en attendant qu'y remettent les portes, et ça c'est elle qu'a géré alors tu verras avec elle. C'est pas moi qu'allais m'en charger, je surveille plus jamais rien pour ta gueule pour tous les crédits du monde !"

Inspire. Allez. Du calme. Pas la peine de se donner en spectacle et de hurler dans la rue non plus. Pas la peine de se foutre à chialer non plus.

"Tu penses bien que le stock on l'a vite recompté et mis sous clé, et la caisse avec, on est pas débiles non plus merde."

Pas des stocks ? Ah bah ça va mieux. Juste le nettoyage c'est...c'est pas beaucoup mieux parce que quand on est redevable a des gens, ensuite ils abusent et ça à l'air d'être BEAUCOUP de gens. Alors devoir des trucs à Audrey qu'il adore, ça le dérange pas mais des Mo'at...à la rigueur, mais des CLIENTS ? Ca lui plait nettement moins. Et ce qui lui plait encore moins c'est le ton du gamin.

"DEJA" qu'il grogne "TU BAISSES D'UN TON WYNNSTAN SEARUWEARD. Maman elle t'a pas élevé comme ça ! Alors tu te REPRENDS EN MAIN et TU LA FERME." Déjà. Bon. Après, il a vu lors des abordages les dégâts que pouvaient faire du "dedans de gens" sur un parquet ou simili. Il soupire. "Audrey a été blessée ? Il a fait quoi Cassagnac exactement ?"

Oh putain. Maman elle t'a pas élevé comme ça non plus ducon !

"T'as qu'à lui demander, à Audrey, puisque visiblement elle est plus importante que moi." je siffle.

J'étais presque prêt à la fermer. Presque. Mais là ça va péter, et à ce stade je m'en fous de me prendre une beigne. Non c'est pas gratuit, moi il m'a pas demandé comment j'allais, pas une fois il a demandé un truc pour moi, il arrête pas de m'engueuler, et elle...

"Cassagnac j'ai rien vu de c'qu'il a fait, mais Cassagnac il a tué tous les morts, moins trois que c'est Audrey, et moins le gérant de l'hôtel que c'est les esclavagistes, et blessé tous les blessés. Cassagnac c'est un monstre mais au moins il était pas avec eux. Oh et d'ailleurs la police c'est des connards, ils ont dit que c'était pas une urgence. Deux fois. Y aurait pas eu Cassagnac, ça se serait passé beaucoup plus mal, la police elle est arrivée je sais pas pourquoi mais une fois que tout était terminé alors c'est pas grâce à elle si on est encore vivants, alors tu vas pouvoir aller les engueuler eux, au lieu de passer tes nerfs sur moi !"

Oui, je craque. Il a ce don de me faire péter une durite dès qu'on passe plus de deux minutes à côté.

"Nan, la police de l'UC ? Des crétins ? SANS BLAGUE ! TU M'APPRENDS QUELQUE CHOSE PROFESSEUR GARDENIA !" Des gens qui ont dit pour l'attentat qui a tué papa 'c'est des pirates' genre on sait même pas si ça a été revendiqué. Des gens qui ont dit 'on peut rien faire' quand on a demandé des attestations... "De toute façon, l'UC EN ENTIER EST COMPOSEE DE CRETINS." Et de racistes. Et d'intolérants. Et de stupides petits fonctionnaires coincés dans leurs cases plus bornés que des robots. Il reprend son calme. Plus doucement. "N'oublie jamais Wynnstan. On a RIEN à attendre d'eux. Ils ne nous aideront jamais. Ils s'en fichent pas mal de ce qu'on vit nous qui sommes à l'extérieurs de leurs jolies cases. Alors oui, ils payent tes études mais c'est pas le quart de ce qu'ils nous auraient filé si l'accident nous avait été remboursé. Je prendrais contact avec Cassagnac. Le Runny, il peut se réparer. Mon petit frère nettement moins."

"La police tout court, j'm'en fous que c'était celle de l'UC ou de n'importe qui ! C'est des Impériaux qui sont venus t'façon."

Et puis le reste bah... j'étais prêt à gueuler encore plus fort que ça sert à rien de rabâcher le même disque rayé que depuis quinze ans, et que merde y a pas que le fric dans la vie, mais... bon, au moins il a l'air d'avoir un peu réalisé qu'il inversait les priorités. Un peu. Pas trop en d'mander non plus. Du coup j'dis plus rien et j'tire la gueule. Ca change.

La police, l'armée, l'UC, les impériaux, c'est tous les même, pas un pour rattraper l'autre et les trinitaires c'est bien les pires du lot. Mais devant son frère qui boude, Wulf se tait soudain. Qu'est ce qu'il peuvent bien dire de toute façon ? Ils sont pas foutus de causer sans se hurler dessus et il sait bien qu'il est d'une humeur de dogue mais c'était pas le moment quoi, avec la mort de Marali et tout. Qu'est ce qu'il en sait, Wynn, du revers que c'est pour Wulf ça ou à quel point il avait associé sa taverne à un vaisseau pirate qui serait à lui ? Rien. Il en sait rien et il n'est rien sensé savoir. Ca ne le regarde pas.

"Tu vas me raccompagner à la Taverne et puis tu retourneras à tes études."

Non il dit pas merci. Tout comme il n'avoue pas qu'il a eu peur. Tout comme il ne dira pas qu'il est soulagé que son imbécile de frère soit vivant, tout comme... bref.

Ah, j'croyais qu'il connaissait le chemin.

"Je retourne à que dalle. J'bosse le soir pour rattraper les journées à essayer de sauver les meubles..." ...d'un vieux con aigri, figure paternelle ratée de mes deux... "...du Runny. J'ai des choses à m'sortir de la tête. J'ai cru que..." ...que j'allais y rester ? "...que j'arriverais pas à les sauver, ces trois types."

S'il avait vaguement regardé, il aurait vu mes cernes. J'veux pas dormir avant d'être crevé, genre HS. J'ai vraiment, vraiment pas besoin de faire de cauchemar. Surtout que j'dors chez maman. Elle a pas besoin que j'me réveille en hurlant, elle non plus.

Il grogne. Pour lui c'est une évidence. Wynnstan est super intelligent, il a des bourses et tout et des études pour soigner les gens. C'est le meilleur médecin qu'il connaisse, un des seuls qui ne soit pas totalement corrompu. Et qu'on ai confronté son awäk de cadet à la violence, il en est encore tout retourné. "Ben tu vas passer tes journées à apprendre tes cours maintenant. Et peut-être que du coup tu pourras DORMIR la nuit. J't'ai jamais demandé de nettoyer ou de faire ce genre de choses. Va pas me faire passer pour plus méchant que je ne le suis."

Mauvaise foi encore. Evidememnt qu'il aurait gueulé si son frère l'avait abandonné. Sauf qu'il n'en doutait pas, Wynn était un Searuweard, un VRAI. Un qui n'abandonnait pas. Jamais. Ni ses proches, ni ses principes. Pas comme ce faux jeton de Niaw.

"J'ai PLUS de cours putain, j'ai des séminaires à chaque fois qu'il pleut des grenouilles et le reste du temps je bosse et je cherche des trucs et j'écris des articles et des comptes-rendus et... t'as toujours rien capté en fait hein ?" Gros soupir. "Ecoute Wulf. Ca me gêne pas de récurer. J'ai servi à rien dans cette histoire, j'veux pas revoir du sang et des tripes par terre et... et des bouts d'os et d'cervelle sur le coin du comptoir. Pour l'amour de maman, Wulf, change ce comptoir. Et pour une fois, pour une fois dans ta putain de vie, fais pas chier, tu veux ?"

Quand j'aurais eu besoin d'une mère poule, y avait personne. Juste Audrey. Que j'veux plus approcher à dix mètres tant que ce comptoir sera pas changé et que j'aurai pas pu me chasser de la tête que c'est elle qui a fracassé ces trois types.