Quand le chat n'est pas là, les souris explosent [w/Eugène de Chateaubriand]

Le Némésis n'avait pas eu à combattre depuis plusieurs jours et l'ambiance était beaucoup plus calme qu'habituellement. Il y avait peut être une petite tension dû au manque d'activité mais rien d'anormal sur un vaisseau pirate. Dans ce genre de situation chacun fait son truc dans son coin. Jezabel est plus occupée que d'habitude à gérer les querelles mineurs de l'équipage et à superviser les tâches qui maintiennent le vaisseau à "l'arrêt" ce qui laisse plus de temps à Jillian pour vagabonder dans le vaisseau, hors de portée de la surveillance de sa maman. Elle aimait beaucoup sa mère mais parfois elle avait besoin de son propre espace, sûrement les débuts de l'adolescence.

La matinée de Jillian avait été consacré à l’étude de la stratégie de combat spatial en compagnie de Miguel. Elle aurait préféré s’entrainer au combat à l’épée, les problèmes sont moins complexes à résoudre. Il est beau Miguel mais il demande des choses compliquées…

Après être passée brièvement par ses quartiers pour déposer ses notes, elle repart de plus belle dans son errance à travers le vaisseau. Son oeil curieux l’amène jusqu’au pont d’armement. L’occasion parfaite pour voir si Loose Canon a le temps de parler ou de lui montrer un truc marrant. Son regard fait le tour de la pièce mais il n’a pas l’air d’être dans le coin, elle s’approche des autres artilleurs qui n’ont pas l’air d’avoir une grosse activité en cours.

« Dites, vous avez vu Eugène ? »

Leur réponse est vague et ils ont l'air un peu agacé qu'on vienne les embêter pour leur demander où est leur boss. Jillian regarde de nouveau autour d'elle mais toujours pas d'Eugène en vue.

« Loose Canon ?! »

Eugène est allongé sur une poutre au-dessus du pont d'armement. Une jambe pendante, ses deux bras derrière sa tête et Bullet qu'il a monté pour l'occasion. En fait il s'ennuie particulièrement, il a déjà réparé et amélioré tous les canons. Les artilleurs ont donc temps libre mais certains sont ici, eux aussi les batailles leur manquent.
C'est là, les paupières closes, qu'il entend une voix familière. Il lève un sourcil mais ne bouge pas pour autant. C'est la petite Alvarez qui s'est encore échappée des jupes de la capitaine. Il l'adore cette petite, fouinant toujours d'un côté ou de l'autre. Quand elle vient, il trouve toujours un petit truc pour la faire rire, lui apprendre. Elle n'a pas peur de lui car elle sait profondément qu'il ne peut lui faire aucun mal.
Bullet était assez timide au début en la compagnie de Jillian mais très vite elle est devenue très proche de la petite. Par souci préventif, Eugène lui a appris à rester sage pour ne risquer de blesser personne et lui obéir à lui seul. Au doigt et à l’œil.
Toujours est-il qu'il la laisse patienter un moment tandis que ses artilleurs le couvrent et quand elle est juste en dessous de lui à l'appeler il apparaît juste devant elle en un salto.

"BOUH !"

Bullet saute dans ses bras.

"Qu'est-ce tu viens faire ici princesse ?"

« KYAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH! »

Un braillement strident de surprise et de peur. Elle allait repartir dans l'autre sens et reprendre sa ronde mais Eugène a atterrit pile devant elle au moment où elle s'y attendait le moins. Son équilibre lui fait défaut alors que mouvant son poids vers l'arrière dans un mouvement de panique elle se retrouve sur les fesses. Surprise dans un premier temps, elle explose d'un rire net et long, les larmes lui montant aux yeux. Si elle n'était pas la fille de Jezabel Alvarez, les artilleurs seraient probablement en train de rire à gorge déployez mais ils n'en font rien, sûrement par peur pour l'intégrité de leur langue.

« Fiou... Grosse frayeur ! »

Dit-elle tout en riant de plus belle. Elle se remet sur ses pieds et époussette sa tenue minutieusement. Son regard se relève ensuite vers Eugène pendant qu'elle va vers lui pour tapoter gentiment Bullet sur le haut de la tête.

« Je tue l'ennuie avant qu'il ne me tue... Eeeeeet ton aide serait la bienvenue Loosy-K. »

Eugène ne peut s'empêcher d'exploser de rire quand il voit la petite par terre et tend sa main pour la relever. Main qu'elle ignore pour se relever superbement. Une copie conforme de sa mère. Évidemment c'est le seul à rigoler avec elle, les autres artilleurs préfèrent se taire. Eugène est familier avec la petite alors il reste naturel et il ne la regarde pas avec la déférence qu'il a pour sa mère. Il ne peut pas la voir autrement qu'une fillette. Elle devra gagner son respect en grandissant, en s'illustrant.

Bullet ferme les yeux face à la caresse mais ne bouge pas et Eugène en est d'autant plus fier. Son Kao est bien dressé, ça ferait plaisir à la capitaine, ou à feu Jack Beadle. Elle est d'une nature plus timide qu'elle ne l'était quand elle était petite. Les batailles et l'agitation ont eu raison de sa curiosité, elle reste très souvent dans les jambes d'Eugène qui a du apprendre à l'esquiver et ne pas trébucher. En une courbette, Eugène mime un valet qui exauce tous les caprices.

"Miss Alvarez j'suis à vot' service. Qu'est-ce qui vous plairait ? J'peux vous montrer l'nouveau canon qu'on a. Ou p't'être que mademoiselle veut qu'j'lui montre des joujoux d'ma collection personnelle pour lui faire passer l'envie d'ces épées des clowns de l'abordage ? J'peux aussi lui apprendre quelques p'tits trucs de visée mais j'veux pas m'faire toper par la cap'taine alors ça s'ra déchargé pour c'te fois. Qu'est-ce que mad'moiselle a envie ?"

« Gngngn... Arrête de me parler comme si j'étais une princesse... Je suis une pirate, comme toi. »

Elle avait horreur de ça. Même si Eugène rigole, ça l'agace qu'on lui offre des traitements de faveur parce qu'elle est la fille du capitaine Alvarez et elle apprécie justement sa compagnie parce qu'il n'a pas l'habitude de lui en offrir. Elle recul en sautillant dans la direction de l'armement lourd du Némésis.

« Ça te ressemble pas d'avoir peur de mam. Et puis c'est pas comme si t'essayais de me tirer directement dessus. »

Bras croisés, elle toise Loose Canon avec un petit air de défi. Il a l'air de bonne humeur, si il en était autrement elle n'oserait pas faire ça.

« J'aimerais bien apprendre à tirer avec un "gun" si t'as la patience... Mais je suis aussi curieuse de voir le nouveau canon et d'en apprendre à ce sujet... Quel dilemme. »

Ses mains viennent triturer le bout de sa natte, elle a tendance à faire ça quand elle réfléchit ou qu'elle est tiraillée entre deux options.

Eugène a un sourire malicieux, comme ses compagnons autour. La petite se prend déjà pour une pirate. C'est mignon.

"Tu s'ras pirate à ta première bataille. Sois pas trop impatiente petite, ça arrivera d'jà assez tôt."

Eugène en a vu des gamins traumatisés par les pirates, par les batailles, par la violence. Lui, c'est sa vie, sa passion, la flamme qui le dévore, mais il protègera les enfants de ce qu'il s'y passe. Et puis il finit par ricaner en s'accrochant à une poutre pour faire quelques tractions. Un ricanement qui prend de l'ampleur et qui grince comme une porte brisée.

"Tu penses que j'ai peur de la capitaine ?"

Il est maintenant en cochon pendu très proche de Jillian. Son ricanement s'est arrêté pour la fixer un instant, elle et ses bras croisés, son audace, elle n'a pas peur de lui sortir ça. Puis il regarde en l'air, y voit sa propre réponse, hausse les épaules et sourit. Après tout c'est une gamine, pas la peine de lui faire une démonstration.

"C'est plutôt qu'tu pourrais t'blesser toi. C'la qu't'es pas douée mais ta mère tient trop à ta p'tite tête pour que j'prenne le risque que tu t'égratignes. Donc on va commencer avec le canon..."

Il lui tend la main.

"T'veux monter sur ton transport préféré ?"

Il lui propose de monter sur ses épaules assez larges pour en porter au moins deux comme elle.

Pas une pirate ? Elle ? Jillian ne se vexe pas facilement mais la réponse d'Eugène a changé son humeur du tout au tout. Son sourire s'efface et ses bras se croise à nouveau alors qu'elle pousse la main tendu de Loose Canon.

« Ok. Je vais au canon. »

Elle comprend le code comme lui, le respecte comme lui, depuis son premier jour elle respire pour la liberté et n'a vécu que dans les crédos transmis par sa mère. Lui dire qu'elle n'est pas encore une pirate c'est pire que de lui cracher au visage. Soudainement, elle en a assez qu'on la traite comme une gamine innocente et incapable. Elle voit la violence, les blessés, les morts aussi et si un jour elle doit devenir capitaine du Némésis elle aimerait bien qu'on arrête de la prendre pour une gosse.

Elle part seule en direction du canon sans piper un mot de plus, sans vérifier si Eugène la suit. Et elle s'adosse au bord de ce truc gigantesque.

Spoiler:

Eugène a bien l'impression qu'il l'a vexée. Il la suit en crapahutant mais elle ne se retourne pas, elle est aussi sèche que sa mère. Il grimpe alors sur le canon immense sur lequel elle est adossée.

"Eh bien tu m'fais la tête maint'nant !?"

Il essaie de réfléchir.

"C'est parce que j't'ai fait peur ? Ou qu'j't'ai dit qu'tu tirais mal ? T'sais que ta mère si y'a une minuscule chance qu'tu t'prennes une balle perdue ben elle s'rait pas d'accord et moi j'tiens à mes fesses ! Pis elle sait qu'j'pourrais perdre l'contrôle. C'pas contre toi du tout !"

Elle fait mine de l'ignorer dans un premier temps et tourne la tête dans la direction opposée quand il lui parle.

« J'ai peur de rien et je sais très bien que je tire mal. Et c'est normal puisque personne ne veut m'apprendre à tirer sur ce foutu vaisseau. » lâche-t-elle sèchement au bout d'un moment.

Mais ça fait l'effet de lâcher un tout petit peu d'air d'une cocotte minute, ça continue à gronder et si elle ne laisse pas échapper plus de leste ça va exploser d'ici quelques instants. Elle se tempère un peu plus en se rappelant qu'elle est avec Eugène et que c'est peut être pas à lui qu'il faut faire une scène, surtout parce qu'il risque de perdre le contrôle aussi.

« Je suis une pirate Eugène. Même si tu penses différemment. Par mon nom, mon sang mais aussi par mon vécu. »

Elle souffle longuement comme pour lâcher plus de leste car des larmes se sont formés au coin de ses yeux. La tension est retombée aussi vite qu'elle est montée. Elle cherche à rester forte et à ne pas montrer qu'elle est affectée émotionnellement.

Entendre les gens dire qu'ils n'ont peur de rien amuse en général Eugène mais il écoute seulement Jillian sans l'interrompre. Elle ne réagit plus vraiment comme une enfant ces temps-ci. Elle s'énerve souvent pour pas grand chose. Il la préférait avant.
Il se retient de la couper. Il n'a jamais vécu ça alors il a du mal à comprendre mais la frustration doit être grande que chacun cherche à la protéger et n'ose pas dépasser certaines limites avec elle.

Vu l'intensité du soupir suivant, Eugène devine que Jillian vient de crever l'abcès. Elle se considère pirate par héritage... et par expérience. Il n'ira pas plus loin au risque de la braquer. Et puis il s'en fout lui du terme pirate. Elle n'a pas prouvé sa valeur même si elle le pense et elle le découvrira bien assez tôt.

"D'accord p'tite pirate j'retire c'que j'ai dit !"

Chaque pirate est mousse avant d'être pirate mais il se retient vu l'air soulagé enfin de la jeune fille.

"Et pis la capitaine va t'apprendre à tirer t'inquiète pas pour ça. Mais tu t'doutes bien qu'si y'a quoi qu'ce soit qui s'passe mal c'est not' tête qui va flotter dans l'espace..."

Puis il tape sur le canon qui résonne en un bruit de métal.

"Alors v'là la bête. Avec ça tu peux faire un trou dans une cale aussi vite que j'ai eu pour dire c'te phrase !"

Il regarde amoureusement la machine.

"Avec ça ... font pas long feu... BOUM plus d'bateau."

« Mouais... » lui répond-t-elle, le regard perdu dans le vide, pensive. Elle ne veut pas qu'il retire ce qu'il a dit mais qu'il comprenne que pirate c'est plus que faire partie d'un équipage pour elle, c'est son identité.

Un sourire timide réapparait sur son visage quand le bruit de métal résonne dans ses oreilles. Le canon. Un bel objet, c'est bizarre de voir du neuf dans un vieux vaisseau comme le Némésis. L'attention que porte Eugène aux armes de l'appareil est sans doute sans pareil et le regard qu'il porte sur le canon fait pouffer Jill.

« Des fois tu regardes les canons de la même manière que les hommes regardent mam ahahah »

Elle en rit mais en vérité elle admire la passion d'Eugène. Son rire s'efface assez vite et elle tapote le canon, du dos de la main en fixant son regard vers l'extérieur, se perdant dans les étoiles.

« On peut tirer jusqu'où avec une bête comme ça ?  »

Eugène voit qu'elle a arrêté de bouder. Elle sourit. Il la préfère comme ça même s'il sent bien qu'elle va grandir, qu'elle va perdre cette innocence qu'elle a encore. Il ne la verra jamais comme une femme il en a peur. Tant mieux pour elle vu comment il drague les femmes. La voir devenir adulte ... c'est un déchirement, les adultes sont compliqués, tortueux, cruels. Par nature, Eugène ne leur fait pas confiance. C'est peut-être pour ça qu'avec Azel c'est plus facile, il se sent bien et qu'il se dit qu'il pourrait rester avec elle.

Et il rigole, c'est vrai que la capitaine fait tourner la tête à de nombreux hommes. Et son canon c'est ... encore mieux qu'une femme, avec lui chaque coup qui fait mouche est une délivrance, une jouissance, un rire. Un canon ne ment pas, permet de venger, d'avoir le pouvoir.
Il réfléchit donc à la question de la petite.

"Mmh ça dépend .. le but c'est pas d'aller loin mais plutôt d'frapper fort avec c'te bête là."

Il mime avec sa main la trajectoire d'un projectile, l'accompagnant d'un sifflement. Et finalement face à son autre main la première main explose en un boum buccal bruyant.

"J'pense qu'il ouvre la carrosserie bien comme il faut. Pis la portée c'est du 1km en pleine puissance."

Jillian écoute Eugène avec la plus grande attention, des yeux brillants fixés sur son visage. La passion avec laquelle il parle de son canon enflammerait presque l'adolescente. C'est pour ça qu'elle l'aime tant, il a beau être un peu spécial, quand il parle d'armements elle pourrait l'écouter pendant des heures.

« On pourrait tirer sur un astéroïde ?! Juste pour voir ! »

Elle sait qu'il y a des règles sur un vaisseau, surtout quand il s'agit des canons mais pour l'instant elle les ignore purement et simplement. Jillian a juste envie de voir exploser quelque chose. Son petit corps sautille sur place d'excitation et ses mains se joignent à son regard pour supplier Eugène.

Un grand sourire s'étire doucement sur son visage. Eugène enfile ses gants et donne ses lunettes de protection à Jill. Il s'asseoit et laisse de sa place entre ses jambes pour que Jill puisse voir le spectacle.

D'un coup d’œil il vérifie que personne ne le voit, un tir à rechargement minimal c'est bien innocent, il dira que c'était un essai.

"Juste un petit alors..."

En fermant son œil humain, il vise ce petit caillou volant en face d'eux, réduit la largeur du rayon et augmente la portée. Retenant son souffle, concentré, il appuie et la flèche d'énergie dézingue l'astéroïde.

Jillian enfile les lunettes de protection et vient se placer entre les jambes d'Eugène pour mieux voir l'astéroïde. Elle observe son déplacement linéaire. Ziouuuuuuu ! Craaaaaaack ! En une fraction de seconde il pulvérise un minuscule astéroïde. Elle saute en levant les bras, extatique.

« Wouhouuuuuuuuuuuuuuuuu ! »

Puis elle tape dans la main de l'artilleur pour le congratuler.

« Sacré feu d'artifice ! Tu m'apprendra un jour ? »

Elle croise les doigts de ses mains, s'apprêtant à le supplier et à faire les yeux doux pour qu'il lui dise oui. Et à la limite de sa vision elle remarque les autres artilleurs accourant vers eux.

La voilà la Jill qu'il aime depuis toute petite. Le sourire, l'énergie qui la caractérisent. Il aime la voir comme ça. Eugène tend sa main qui claque dans celle de la petite. Une grande main de travailleur contre une petite main toute pâle. Il a les yeux qui brillent. Enfin son œil naturel.

"Ah ouais hein ! Une p'tite merveille n'est-ce pas ? C'pour ça qu'j'suis sur c'vaisseau. On a les plus belles bêtes d'toute la galaxie. Pis on nous laisse nous en servir. On peut les faire chanter souvent et ça ... Pis y'a toi, y'a mes gars, mes frères, la capi. Et ..."

Azel. Il se tait un instant.

"Ah ça ... si tu d'mandes à ta mère pourquoi pas ? Moi j's'rais ravie de t'montrer tout c'qu'on peut faire dans l'ventre du Némésis... Mais t'es p't'être un peu p'tite pour qu'elle veuille. Les canons s'raient pas adaptés. Pis t'as d'autres choses à apprendre avant ça. Tu fais quoi en c'moment ?"

Ils se font interrompre par des artilleurs qui arrivent. Eugène lève les mains en souriant.

"Calmos les gars, j'vérifiais qu'ça marchait. Ben ça marche, merci d''être v'nu voir. La prochaine s'ra une belle bataille avec ce machin là. R'tournez à vos affaires RAS."

Evidemment les artilleurs sont loin d'être bêtes et connaissent leur officier autant que la petite, ils ne demanderont rien de plus et feront semblant de croire à cette histoire en souriant. Eugène sait qu'il ne sait pas mentir non plus.

« Eeeeeeet... ? Qui d'autre ? »

Son sourire s'accentue encore, si une telle chose est possible. Elle sent un ragot croustillant derrière cette interruption d'Eugène, non pas qu'elle essaie de lire son comportement ou quoi que se soit mais elle est curieuse de savoir pourquoi il n'a pas fini sa phrase. Elle fait fit de la remarque une nouvelle fois sur sa mère... Le temps viendra-t-il un jour qu'elle ne doive plus demander la permission à mam ?

Jillian attend pour lui répondre qu'il ai fini son petit manège avec ses hommes en le regardant, amusée. Eugène a un grand talent pour les commander, très différent de celui de sa mère mais présent tout de même. Elle l'admire vraiment pour ça aussi.

« Mouais... Je prends toujours des cours de tactique avec Miguel et d'épée avec mam... Même si j'ai l'impression de stagner. » répond-t-elle de nouveau un peu boudeuse.

Quand elle mentionne Miguel ses joues rougissent légèrement, le simple fait de l'évoqué lui fait battre le coeur plus fort. Pas étonnant qu'elle stagne, il est si beau qu'elle a du mal à se concentrer quand il lui fait la leçon. En plus, elle ressent le besoin irrépressible de se faire plus bête qu'elle n'est pour qu'il lui explique et lui apporte plus d'attention. Et après coup elle ne comprend pas trop pourquoi elle agit comme ça, ça ne lui ressemble pas.

"Et ... Bullet bien sûr. Qu'est-ce tu crois ..."

Il lève les yeux au ciel en se frottant l'arrière du crâne. Il sait qu'elle sait qu'il ment. Mais il préfère garder ça pour lui. Et il la connait, elle va l'espionner, et ça lui prendra pas longtemps pour comprendre. Maisil va pas lui rendre les choses faciles.

Eugène ne peut s'empêcher de froncer les sourcils en entendant le nom de Miguel Belasko. C'est toujours son premier réflexe. Il sait que depuis, le temps a passé, qu'ils ont communiqué... mais le stratège restera souvent associé à la mort de Jack et ça fait hérisser ses poils. Mais après tout il s'est vengé, il l'a frappé une fois, ils se sont expliqués et la capitaine ne tolérera pas un autre écart. Alors si Eugène veut frapper quelqu'un ça sera sur terre et pas un membre du Némésis. Si aujourd'hui Miguel est un collège, il n'est ni un frère ni un ami. Il rigole avec lui mais les deux savent que ça pourrait dégénérer. Et surtout Eugène ne comprend pas cette fascination que les femmes ont pour Miguel. C'est un stratège, elles devraient s'en méfier...

"T'as bien d'la chance, Miguel c'est l'plus grand stratège d'toute la piraterie. Et la cap'taine elle a un d'ces coups d'épée ! Faut pas qu'tu baisses tes bras. T'sais qu'j'ai entendu qu'faut 10 000 heures d'entraînement pour d'venir un expert. P'tite graine d'viendra grande comme on dit."

Il observe les joues rouges de Jill.

"T'as chaud ?"

Bullet... Mouais. Elle sait qu'il lui ment et il sait qu'elle sait qu'il lui ment mais elle ne relève pas, Eugène est le pire menteur qu'elle connaisse et elle finira bien par savoir de qui il parlait. Tout se sait sur le Némésis, et rien ne lui échappe.

Quand il évoque Miguel elle répond juste par des mh d'acquiescement mais intérieurement c'est la folie. Quand il évoque sa mère elle n'écoute même presque pas ce qu'il raconte tant elle est concentré à avoir l'air normal. Puis elle a un mouvement de recul, en essayant de cacher son visage quand il lui demande si elle a chaud.

« Hein ? Oui... Enfin non, ça va. » souffle-t-elle d'un coup tout en soufflant tout l'air présent dans ses poumons.

Elle se redresse progressivement.

« J'ai besoin de marcher. On va aux cuisines, manger un truc ? »

Il s'approche d'elle et met la main sur sa joue. Eugène ne sachant jamais respecter l'espace vital des autres, soit trop proche soit trop loin. Soit trop bruyant soit trop silencieux, soit trop amical soit trop agressif, trop cruel ou trop protecteur.

"T'es sûre... t'as l'air pas bien t'es toute rouge..."

Et quand elle lui propose d'aller aux cuisines, il ne dit pas non. A vrai dire il apprécie Anouk et adore manger.

"Ah ouais bonne idée ça va t'faire du bien d'manger un peu."

S'il voyait les artilleurs autour pouffer. D'abord quand il a parlé de Bullet parce qu'ils le charrient déjà tous avec la guimauve de service. Et ensuite quand elle est devenue rouge. Il n'y a bien que lui pour ne pas connaître les affres de l'adolescence. Après tout il ne les a jamais connu. Il n'a jamais été amoureux comme ça. Même aujourd'hui l'amour c'est une notion tellement déformée, qui change, qu'il n'a aucune idée de ce qu'il peut ressentir pour les autres. Rien n'est constant.

"J'sais pas c'qu'il a d'ailleurs Anouk. En c'moment on fait qu'manger des légumes. On est pas des vaches. Moi j'suis un carnivore, faut qu'j'nourrisse ces biceps là."

« Moi j'aime bien ça les légumes. C'est toujours meilleur que le nutri-soja. »

Enfin elle suppose, comme elle a toujours été au régime du Némésis et de ses cuistots elle n'a jamais vraiment eu la "chance" de goûter. Après une courte pause, une large sourire se dessine sur son visage.

« Si tu manges trop de viande c'est plutôt ces biceps là que tu vas nourrir » ricane-t-elle en tapotant le ventre du maitre artilleur.

Elle part en courant dans les couloirs du vaisseau, probablement poursuivit par un Loose canon furieux de sa moquerie. Son pouffement devient un rire frénétique et elle manque de tomber une nouvelle fois en riant. L'adolescente s'arrête à bout de souffle en plein milieu du couloir. Elle peine à retrouver son souffle et les larmes lui montent aux yeux alors que le fou rire s'arrête progressivement.

"L'nutri-soja ... j'en ai trop mangé ça a même plus d'goût pour moi. Après c'est c'qui t'maintient en vie quand t'as plus rien donc j'vais pas trop l'critiquer. Surtout qu'c'est fade. Les légumes ça m'va mais dans la sauce. Sinon j'croirais manger des p'tits arbres."

Quand elle le critique pour son ventre, il prend un air choqué, outré et tâte son ventre. Et alors qu'il regarde son ventre elle s'échappe en riant.

"TU VAS VOIR C'QUI TE DIT LE GROS !"

Evidemment pour Eugène être gros c'est plutôt bon signe, ça veut dire qu'il devient volumineux, mais il faut qu'il fasse attention s'il ne veut pas perdre sa souplesse. Et gros en gras c'est hors de question. En attendant il court après la petite qui a une longueur d'avance. Il entend son rire et il la rattrape facilement en faisant attention à ne pas faire de bruit. Il la voit trébucher une fois et quand elle s'arrête il passe effectue un roue suivie d'un salto.

"BOUH !"

Il reprend lui aussi un peu son souffle. Il a plus l'habitude de travailler la force que l'endurance.

"Eh beh c'est qu'tes jambes ont grandi !"

Il l'attrape à bout de bras et la porte en trophée.

"Alors comme ça j'suis gras ?"

Sa voix se fait presque menaçante. Joue-t-il encore ?

Une fois pas deux, quand il arrive en salto devant elle, elle l'attend cette fois et lui fait une belle grimace.

« Même pas peur ! »

L'adolescente se redresse fièrement, les mains sur les hanches. Sa croissance peine à venir et elle le sait mais elle prend avec fierté le compliment d'Eugène. Ses jambes ne sont certes pas beaucoup plus grande mais elle court vite, comme toujours.

« Et ouais, c'est parce que je mange bien mes légumes ! »

Elle se laisse soulever en riant de plus belle. Confiante dans le fait qu'Eugène ne la blesserais pas délibérément même en entendant son ton. Bien sur elle le charriait juste mais ça l'amuse de savoir qu'Eugène doute de lui, alors qu'il n'a pas l'air d'avoir un poil de graisse. Sa souplesse en témoigne.

« Maaaaaais non ! Allez, pose moi qu'on aille aux cuisines ! J'ai faaaaaaaim ! » se plaint-elle tout en se débattant exagérément.

"Ah des légumes..."

Sa grimace est sans équivoque pendant qu'il la soulève.

"Tu manges pas assez aux r'pas... r'garde tu pèses rien du tout."

Il la lance quelques centimètres en l'air avant de la rattraper.

"T'sais quoi...moi aussi j'crève de faim... Mais j'sais c'que j'vais manger."

Eugène porte Jill comme sa prisonnière sur son épaule.

"T'as des derniers aveux à faire avant d'passer à la cass'role ?"

Il marche fièrement, la fille de la capitaine comme un sac à patate sur son épaule, saluant les membres qu'il croise avec un sourire de défi en faisant semblant de vouloir les manger aussi. Ils sont habitués à ses extravagances et il tire des regards de pitié, des sourires et des yeux qui se détournent. Bullet suit en sifflant et en essayant d'attraper les pieds de Jillian.

« Lâche moi Eugène ! C'est... C'est un ordre ! » cri-t-elle sur un ton qui commence à s'agacer.

Elle commence à se débattre des bras et des jambes, frappant le ventre et le dos de Loose canon, mais sans la moindre force. Difficile de dire si c'est du théâtre ou si ça l'énerve vraiment mais elle continue non-stop. L'indice et la clef pour le savoir, c'est le fait qu'elle "ordonne", ce n'est pas son genre du tout et elle a l'habitude de jouer à la petite capitaine uniquement pour rire. Elle ne prend pas ça au sérieux, pour l'instant.

L'adolescente s'arrête subitement et contracte tout ses muscles en avançant tout son poids vers l'avant et, profitant du fait qu'Eugène ne la serre pas trop fort et de son petit gabarit, se laisse glisser en avant. Touchant le sol elle roule avant de se redresser dans un mouvement, qui certes manque d'élégance, mais a été efficace pour s'échapper des griffes de l'artilleur. Jillian se redresse en projetant sa longue chevelure en arrière, encore un mouvement qu'elle utilise pour en rajouter, et tire la langue à Eugène en gonflant les joues et en soufflant de l'air pour faire vibrer ses joues blblblblblblbl.

« C'est grâce aux légumes ! »

Sa posture redevient normale, elle avance jusqu'à Eugène et lui tape dans le dos. Son ventre gargouille encore.

« Cuisine ? Je te garantis que je ne mangerais pas de légumes. »

Son choix risque plutôt de se porter sur des sucreries.