A qui la faute ? [Tad]

Il s'était écoulé un peu plus d'une semaine depuis l'attaque des mutants et je n'arrivai toujours pas à me sortir les événements de la tête. Le Liberty était de retour dans le vide spatial et je faisais mon boulot au mieux, ça, ça n'avait pas changé, quand je bosse, je concentré sur ce que je fais et je n'ai pas le temps de penser à autre chose. Ce qui a eut pour conséquence de me voir bosser même à des moments où je n'étais pas de quart. Quand je ne bosse pas, on me retrouve de plus en plus souvent au bar du Liberty.
C'est ma faute, j'en presque sûr... Si seulement j'avais pu faire plus pour Jude... Si seulement j'avais vraiment su me battre... Si je n'avais pas mis autant de temps à faire exploser ce putain de truc... Si...

Je pourrai passer des heures entière à me morfondre, "heureusement", ça, c'est que dans les pires moments. L'attaque à laisser des traces et elles mettrons du temps à s'effacer. Je dois avancer, je ne vais pas laisser cet événement me faire plonger, mais ça va prendre du temps... Surtout, si j'arrive pas à me sortir la mort de Jude de la tête... Même Carl à l'air de s'être rendu compte que quelque chose me tracasse, il va moins jouer avec les autres animaux du vaisseau, il reste avec moi en ce moment, on dirait qu'il tente de me réconforter.

Aujourd'hui, mon quart fini, je commence à errer dans les couloirs du Liberty, avant de m'arrêter pour contempler l'espace, d'attraper mon paquet de clopes et d'en mettre une dans ma bouche, je sors ensuite mon briquet et l'allumer. Je reste là pendant plusieurs minutes à contempler l'espace.

T'es content d'avoir r'trouvé l'espace, tu t'y sens invariablement mieux qu'sur n'importe quelle planète ou astéroïde, ça t'enlève un poids désagréable d'sur les épaules.

Il y a eu une Cérémonie pour les victimes d'l'attaque sur Tortuga et quelque part, ça t'as fait du bien d'savoir Ludivine à nouveau dans l'espace. Elle était une pirate fort douée, un esprit libre, lorsque vous vous êtes rencontré, t'as l'impression qu'ça l'y ramène un peu. Et ton fils... Son premier et seul voyage. T'as aucune idée d'quoi est faite la mort, mais t'espères qu'il est bien.

L'équipage assure, mais il y a ces miettes de deuil qui flottent, beaucoup on perdu un collègue, voir un proche. Et toi, t'essais d'garder tout ce p'tit monde à flot, d'calmer un peu les esprits. Et parlant d'ça.

Tu vois John Davis plus loin, l'chef mécano, loin d'sa salle des machines, clope au bec. C'était lui qui était avec Ni'oh et Jude lors d'l'attaque. Ni'oh s'en veut, t'imagines sans mal qu'lui aussi. Tu t'approches, t'allumant une clope pour l'accompagner.

- Hey, John. Comment vous allez ? Ça vous gêne pas, un peu d'compagnie ?

Je suis sorti de ma contemplation par Thaddeus.

-Salut Thaddeus. Ça peut aller. Sinon ça ne me gêne pas d'avoir de la compagnie.

Bon, petit mensonge, parce que non, ça ne va pas, mais ça ne me gêne vraiment pas qu'il me tienne compagnie.

Tu t'avances à ses côtés, ton regard s'portant un instant sur l'vide intersidéral. Tu prends l'temps d'tirer sur ta clope, puis d'laisser la fumée monter vers l'plafond.

- Après tout c'bordel, ça fait du bien d'être d'retour dans l'espace.

Ton regard s'porte sur l'chef mécanicien. Tu doutes que ça aille si bien. T'as eu un peu vent d'ses nouvelles habitudes et elles t'semblent pas aller dans l'sens d'ce qu'il te dit. Après, tu vas pas aller lui mettre ça sous l'nez.

- Votre équipe s'porte bien ?

C'qui t'empêchera pas d'tâtonner gentiment tout autour du sujet.

-Je ne peux pas dire le contraire. Ce qui est vrai, je suis content que le Liberty reprenne son chemin dans le vide spatial.

Je tire sur ma clope et le regard tourné vers l'espace, je ne fais pas attention au regard du quartier-maître.

-Oui, plus ou moins, comme vous le savez sûrement, les mécanos aussi ont souffert, alors on fait le deuil de ceux qui ne reviendront pas et gère les nouveaux. Après, avec le travail qui a à faire, on reprend rapidement le rythme et l'ambiance normale. Donc je dirai que mon équipe se porte bien dans l'ensemble.

Je ne parle pas de moi, faut dire qu'il me pose la question pour mon équipe, aussi c'est son boulot en temps que quartier-maître de voir l'état de l'équipage non ? C'est pour ça que je réponds sans trop me poser de question.

Tu l'écoutes avec attention, sans rien dire. Tu expires un filet d'fumée avant d'reposer les yeux sur lui.

- Oui, j'suis content d'savoir qu'ça s'replace doucement pour ton équipe et qu'elle va d'l'avant.

Tu laisses passer un moment de silence...

- J'ai pas eu l'occasion d'te l'dire. Mais j'suis désolé pour Jude. J'sais qu'ça occupe beaucoup les pensées d'Ni'oh. J'me doute qu'toi aussi.

Tu l'regardes encore quelques secondes, puis ton r'gard r'tourne s'accrocher aux étoiles de l'autre côté du hublot, contemplatif.

Je reste silencieux pendant de longues secondes, le regard perdu dans le vide, avant de finalement lâcher un soupir.

-Pour tout dire, vous avez raison, je n'arrive pas à oublier ce qu'il s'est passé...

Je dois être en train de suinter la mélancolie là...

Tu l'presses pas, et puis... Voilà. C'est là. Juste là.

- C'est normal, t'sais. J'pense pas qu'grand monde qu'était là va oublier. Tu l'sais au moins qu'c'pas d'votre faute, à Ni'oh ou toi ? Faut pas vous laisser gruger par ça.

Tu tires sur ta clope, l'regard songeusement perdu dans le vide intersidéral avant qu'il n'revienne sur John. Jude n'est plus là. Mais lui ou Ni'oh auraient pu tout aussi bien connaître l'même sort.

Une pointe d'compassion s'glisse dans ton regard. Pas d'la pitié. T'en a peu, mais la compassion, oui. Tu tires lentement sur ta clope, prenant l'temps d'méditer sur ses mots avant d'répondre.

- Peut-être. Tout comme si elle avait agi autrement, plus vite, ou su se battre, peut-être que. Sauf que les responsables, John, ce sont ces créatures qui se sont jetées sur Tortuga comme ailleurs. Sans ça, ça ne serait jamais arrivé. Ce sont eux, les responsables.

Je reste silencieux, tentant d'assimiler les paroles du quartier-maître... Il a raison, au plus profond de moi je le sais, mais... Mais je n'arrive pas à m'y faire... Enfin, un peu plus déjà, ça me fait vraiment du bien que quelqu'un, et pas n'importe qui, me dise ça...

-Vous avez raison, mais... Je ne sais pas... J'ai du mal à me faire à cette idée...

Je tente de me ressaisir, tout en perdant mon regard dans l'espace et en tirant sur ma clope. Je lâche un petit nuage de fumet avant de reprendre.

-Comment ça a put arriver ? Je veux dire, je ne connais pas les raisons de leur attaque, mais ce n'est pas ça qui me tracasse le plus. Comment ça se fait qu'ils aient pu faire cela sans rencontrer de réelles résistances ? Ils ont eut le temps de s’écraser sur Tortuga et de s'y déverser avant que qui que ce soit n'agisse... Il n'est pas censé y avoir des défenses ? Ou même juste une alarme ?
Parce que de là ou j'étais, j'ai juste eut l'impression qu'ils avaient pu agir à leur guise.

Il est comme toi. La raison parle, mais le cœur n'veut rien savoir, dans une tourmente inutile, mais lourde et culpabilisante. Vos regards restent perdus sur les myriades d'étoiles, loin d'ici.

- J'comprend ce sentiment, c'est très humain, mais malheureus'ment, c'douloureux pour rien. Vous vous êtes fait jeter des monstres à la tête. Qu'vous soyez encore là, Ni'oh et toi, c'déjà quelque chose. Que l'Capitaine soit encore là aussi. On a perdu des gens, mais c'était impossible en étant à Tortuga d'ne pas en perdre.

Tu soupires légèr'ment aux questions du chef ingénieur, pas qu'elles t'agacent, mais elles soulèvent des soucis... qu'il sera complexe d'régler.

- L'soucis, avec les pirates, c'est qu'c'est trop souvent du chacun pour soi. C'pas comme les factions qui laissent des patrouilles au d'ssus d'leurs astroports. Les pirates sont trop désorganisés et n'sont qu'sous leur propre bannière. Il n'y avait pas d'quoi stopper sensiblement leur avancer. Il faudra qu'ça change, car j'n'doute pas qu'on en ait pas fini avec ces créatures.

Étrangement, sa réponse ne me surprend pas, pourtant, ça ne m'étais pas venu à l'esprit... Pourtant, c'est assez flagrant que pour les pirates de vaisseau différends, c'est chacun pour soit.

-Ouai, ce n'est pas faux... Mais si elles reviennent, je compte bien leur en faire voir de toutes les couleurs... Je n'ai pas d'armes et je ne sais pas vraiment me battre, mais on a confié le Liberty à mon équipe et moi, alors on va faire en sorte que rien ne puisse l'arrêter. Je dis avec détermination, avant de reprendre. En tout cas, c'est vrai que ce n'est pas comme chez l'UC... Mais il y a vraiment des possibilités que ça change ?

T'aimes vraiment c'qu'il t'dis. La détermination dans sa voix, l'éclat dans son r'gard. C'est juste c'qu'il faut, t'aime comment il tourne ça, comment il fait d'ce drame une motivation constructive. T'lui adresses un sourire bourré d'approbation.

- C'est exact'ment d'ça qu'a b'soin le Liberty. Vot' motivation fait plaisir à voir.

Quant aux pirates. Tu tires sur ta cigarettes alors qu'ton sourire s'fait en coin.

- C'pas impossible les alliances, au moins temporaires. L'attaque sur l'chargement de Durilium trinitaire avec le Liberty, l'Abatros, l'Iceberg et l'Némésis l'montre ben. Après j'pense pas qu'on puisse réunir tous les pirates et les coordonner comme ça s'rait l'cas dans une armée, mais il y a certain'ment moyen d'arriver à un compromis qui garantisse une meilleure sécurité pour Tortuga.

-J'espère qu'il y aura un compromis, parce que sinon ce n'est pas dit que la prochaine, s'il y a une prochaine fois, on arrive à reprendre le dessus... Enfin bref...

Je tire une nouvelle fois sur ma cigarette, j'arrive au bout cependant, j'écrase alors ce qu'il reste dans ma main de métal et je mets le mégot dans le compartiment de celui-ci, pas envie de laisser mes clopes traîner par terre, je la jetterai plus tard.

-Dites, vous croyez que quelqu'un sur le vaisseau accepterait de m'apprendre à me servir d'une arme ? Une arme de tir de préférence. Ne me jugez pas sur ce choix s'il vous plaît.

- C'est plus qu'souhaitable. Reste plus qu'a espérer qu'd'autres soient d'cet avis aussi.

Et surtout des cap'taines. La question d'John t'fait hausser un sourcil... Surtout son commentaire à la suite. S'attend-il vraiment d'toi qu'tu rabaisses c'genre de démarche ? C'mal t'connaître.

- J'vous juge pas. C'est louable d'vouloir acquérir quelques bases, qu'ce soit à l'arme blanche ou d'tir.

T'prends quelques secondes pour réfléchir à qui tu pourrais l'référer. C'est qu'il y en a plusieurs, qui savent faire.

- Il y a Hex, un d'tes mécano qui est plutôt doué... T'hésites, rajoutes quelques noms en frottant ta barbe du bout des doigts, songeur, avant d'reposer l'regard sur lui. J'sais viser juste aussi, au besoin.

Pas d'quoi en faire un plat, mais t'es capable d'lui montrer les bases.

Je prend note, mentalement bien sûr, des noms qu'il me donne, je pense que je vais commencer par aller voir Hex. Il se propose lui-même également.

-Merci, je vais sûrement aller demander à l'un d'eux de m'apprendre. Sinon, si ça ce ne vous dérange pas, je veux bien que vous me montriez les bases.

T'hoches la tête avec un sourire, avant d'éteindre ta clope dont il reste rien pour la fourrer dans un p'tit cendrier portatif qui r'trouve vite l'fond d'une d'tes poches.

- D'accord. Ça m'f'ra plaisir alors si vous trouvez pas, hésitez pas.

Certes, personne semble s'en être tiré tout à fait indemne, d'cette attaque, même ceux dont les blessures sont pas apparentes, mais tu tombes sur peu de désespoir, l'équipage sachant s'r'monter les manches et continuer d'avancer et ça glisses des miettes d'fierté supplémentaire dans ton r'gard. T'es content d'ces hommes et d'ces femmes vaillants qui s'en laisse pas montrer.

-Merci, j'y penserai.

Je n'oublie pas Jude, je me sens encore un peu mal, mais heureusement que le quartier-maître est venu m'en parler, ça m'aide beaucoup, je trouve. Il me faut m'accrocher, je dois continuer d'avancer.

T'lui adresses un sourire et ta main trouve son épaule, y serrant légèrement les doigts dans un geste d'soutien. Il y a personne qu'est seul, dans c'bordel, et c'pas parc'qu'il faut qu't'aille tous les voir et leur faire comprendre qu'tu vas lésiner. C'est p't'être une part d'ton boulot, mais t'y vois une sorte d'vocation, preuve qu'c'est dans ces bottes-là qu't'étais destiner à atterrir.

- D'toute façon, hésitez jamais à m'faire signe, peu importe pour quoi. Personne m'dérange jamais.

T'lui souris, l'regard chaleureux.

- Si vous m'permettez, j'vais r'tourner à mes tâches. Passez une bonne journée, John, et faite attention à vous.