Histoire
Bertrand Pellerin était un homme d'action, un directeur d’import-export efficace et prospère, membre d'une famille puissante ayant donné au clergé pléthore de prêtres et nombre d’évêques. Bertrand aurait pu avoir une vie paisible et simple au sein de son peuple si Bertrand n'avait pas eu un goût terrible en matière de femmes. Les femmes de Bertrand lui ont bouleversé sa vie.
Pour Bertrand, tout commença par sa sœur. Enfin, sa demi-sœur. Sa demi-sœur à demi Mo'at. Sa demi-sœur, sœur de lait à demi Mo'at. Puis cela continua par sa compagne. Et enfin, cela finit par sa fille.
En gros, Sophie, la mère de Bertrand, était une grande bourgeoise qui, si elle voulait bien se plier à l'obligation sociale d'avoir des enfants, se refusait à mettre la main à la patte pour les élever, les torcher ou même les allaiter. Donc Didier, le père de Bertrand, avait acheté une esclave Mo'at pour servir de nourrice à son futur fils. Et pour qu'elle ai du lait, il avait eu la bonne idée de lui faire un enfant. La Nourrice, Ge'del avait donc eu une petite fille, Laeticia (dont, vous vous en doutez, le nom n'avait pas été choisis par Ge'del).
Bertrand avait donc vécu ses premières années dans le giron de Ge'del, en compagnie de Laeticia. Et, aussi terrible que cela puisse paraître, il avait grandi avec l'idée que les Mo'at étaient des personnes. Pas des choses. Terrible handicap social. Quand Sophie et Didier s'en rendirent compte, vers les six ans du gamin, ils reprirent vite leur fils en main et envoyèrent la nourrice et sa fille dans une plantation. Sophie se retrouva forcée de nourrir elle-même ses enfants suivant, mais pour leur bien, elle accepta cette lourde tâche. Il fallut à Bertrand une rééducation stricte, mais il cessa bientôt de dire s'il vous plaît et merci au personnel de maison.
Mais bien qu’il ait cessé d’en parler, sous la désapprobation d’une mère réduite au rôle de mère au foyer qu’elle abhorrait, Bertrand ne sut pas oublié Laetitia. Ge’del était resté relativement distante, vis-à-vis de lui, bien consciente de sa place d’esclave, mais Laeticia avait été une camarade de jeux aussi enthousiaste et entière que peuvent l’être les enfants. Laeticia, c’était sa jumelle métis, sa sœur de cœur autant que de sang. Il apprit à ne pas parler d’elle, à ne pas demander quand elle reviendrait, mais il n’oublia pas.
Et quand, vingt ans plus tard, un accident de navette tua Sophie et Didier, le propulsant seul à la tête d’une fratrie de dix, dont six enfants, il n’avait toujours pas oublié. Une fois l’enterrement terminé et la succession démêlée, Bertrand se rua sur les archives familiales pour retrouver où avaient été envoyé Ge’del et Laeticia.
Laetitia n’était pas loin, toujours dans la plantation, propriété d’un oncle prêtre de la famille, où on l’avait envoyé. Ge’del… Ge’del était morte des travaux forcés. Mais elle avait donné naissance à une autre fille, Aya’el. Née en captivité, mais issue d’une relation amoureuse avec un autre esclave, cette fois, et non d’un viol. Et qu’elle avait put nommer elle-même.
Bertrand fit venir sous son toit les deux demi-sœurs. Il fit d’elle ses femmes de chambre personnelles, laissant courir la rumeur qu’elle étaient ses maîtresses afin que personne d’autre n’ose les toucher. Et ils vécurent ainsi ensemble. Il ne retrouva cependant pas la même complicité avec Laetitia qu’il avait eu avec elle enfant. Elle était marquée par l’esclavage et la mort de sa mère, il s’était perdu dans sa tour d’ivoire et était désormais incapable de baisser la garde devant deux esclaves.
Pendant ce temps, Bertrand devait gérer ses petits frères et sœurs. Jules, Dominique et Claudine étaient déjà établis (son frère Jules était évêque.) ou marié (pour ses sœurs Dominique et Claudine), mais il fallait encore élever Joëlle, Augustine, Hugues, Yann, Élie et Ophélia.
Il ne se débrouilla pas trop mal les deux premières année, mais fin 94, une épidémie de grippe fit des ravages dans l’E-cole où étudiaient les deux petits, Hugues, neuf ans et Yann, six ans. Ils ramenèrent la maladie à la maison où es jumeaux, Élie et Ophelia, trois ans, la contractèrent également. Les deux petits garçons en moururent, mais les jumeaux, bien que plus petits et plus frêles en réchapèrent. Les voies de l’Uniques sont parfois impénétrables.
La perte de deux des petits garçons laissés à sa garde par l’Unique porta un rude coup à Bertrand. Si rude qu’il finit par baisser la garde devant ses deux “femmes de chambre”. Adoucie par sa détresse et par trois ans de bons traitements, Laetitia fut la première à percer la barrière sociale qui les séparait et à faire un pas vers son frère de lait. De là, tout alla très vite. En quelques jours, ils retrouvent une solide relation fraternelle. Et Aya’el s’ouvrit à son tour à son sauveur.
Il s'avère qu’Aya’el était tout ce que Bertrand cherchait chez une femme. Simple, aimante, modeste, affectueuse. Mais aussi, une fois qu’elle eut compris que Bertrand acceptait d’elles plus qu’un trinitaire n’acceptait de ses esclaves, capable d’obstination et ne cédant pas facilement du terrain quand elle était sûre d’avoir raison.
Sous l’œil mi-figue mi-raisin de Laetitia, les deux jeunes gens tombèrent amoureux, à l’abri des portes closes. Aya’el devint effectivement la maîtresse de Bertrand.
La vie de Bertrand continuait cependant. En Odacer 95, il maria Joëlle, mais quelques mois plus tard, en Velcer 96, ce fut le drame:
Aya’el était enceinte. Naissance prévue en Encer 95 ou Odacer 96
Les deux futurs parents perdirent pied. Il leur était aussi insupportable à l’un qu'à l’autre d’imaginer donner naissance à un enfant esclave. Ils envisagent toutes les possibilités, à commencer par l’avortement. Bertrand ne serait pas le premier à faire avorter sa maîtresse Mo’at, n’est ce pas?
La décision fut presque prise. Ils aimaient déjà ce foetus qui grandissait dans le sein d’Aya’el, mais…
Mais Laetitia proposa une autre solution: Et s’ils émigraient tous à Espoir? C’était un astroport mixte, donc ils ne seraient pas totalement hors de la Trinité, Bertrand aurait encore la possibilité de prier l’Unique, mais en temps qu'astroport mixte, Aya’el et Laetitia y seraient libres.
L’idée les enchanta. Effectivement, ils pourraient vivre heureux ensemble, à Espoir.
Décision fut prise de s’y installer au début de l’automne. Officiellement, Bertrand devait étudier l’intérêt de déplacer le siège de la Compagnie familiale à Espoir ou la négociation avec les autres factions était facilité par leur proximité. Tout semblait parfaitement prévu, mais Bertrand eu un mauvais pressentiment. Il entreprit d’envoyer une grande partie de ses capitaux dans une banque corporatiste et de s’expédier des stocks de marchandises à son nom dans des entrepôts corporatistes. Au cas où ils se retrouvent obligés de prendre la fuite.
La petite famille, à savoir Bertrand, Augustine et Ophélia déménagèrent, accompagnés de seulement deux esclaves, Aya’el et Laetitia, vu la législation particulière d’Espoir. Bertrand aurait bien emmené et libéré plus de monde, mais cela aurait éveillé les soupçons, selon lui. Là, il passait juste pour un gros pervers, incapable de se séparer de ses maîtresses. À la place, ils embauchèrent du personnel de maison. C’était plus cher, mais ils pouvaient largement se le permettre.
Tout se passa bien pendant quelques semaines. Bertrand s’enhardit même au point d’accepter d’épouser Aya’el en une courte cérémonie Mo’at secrète, malgré les risques. En effet, avoir épousé une esclave faisait de lui un hérétique. Ils eurent encore quelques semaines de tranquillité puis tout s’effondra.
Un après-midi, Bertrand reçu un message d’un de ses contacts (rémunéré) dans l’administration trinitaire. Le mariage avait dû se savoir car il était déclaré hérétique. Sans attendre l’équipe chargée de l'arrêter, Bertrand s’enfuit de son bureau et prévint sa femme et sa demi-sœur. Il essaya bien d’aller chercher les deux petits à l’école, mais du bout de la rue, il put voir les uniformes blancs de l’inquisition qui l’attendaient devant l'école. Il fit donc demi-tour, la mort dans l’âme. Comme prévus en cas d’urgence, ils se replièrent vers l’astroport. Ils auraient dû prendre un vaisseau pour Vanguard aussitôt, mais Bertrand insista pour appeler d’abord Augustine par Hcom. L’adolescente répondit normalement… Puis demanda très vite s’il était vraiment un hérétique avant de se faire arracher le téléphone par un homme qui menaça de s’en prendre à la jeune adolescente. Il fallut à Bertrand toute la volonté du monde pour ne pas se rendre, mais il ne crut pas l’inquisition capable de faire du mal à une adolescente innocente. Il monta dans la navette. Direction Vanguard.
Bertrand prit très mal la perte de ses sœurs, mais il ne pouvait rien faire. Déclaré hérétique, s’il retournait en terre trinitaire, il serait condamné. Il ne pouvait rien faire pour elles. Il essayait de se consoler en se disant que désormais, sa demi-sœur et son épouse étaient libre. Et que ses petites sœurs avaient du bien et de la famille qui veillerait sur elles pour lui. Et l’Unique en soit remercié, il avait pensé à mettre des capitaux de côté en UC. Il avait perdu une partie de son niveau de vie, mais il en restait beaucoup. Ayant une bonne réputation dans le milieu du commerce, il fut embauché par l’antenne locale de Fushi en tant qu’agent d’import/export. Lui qui dirigeait précédemment l’entreprise familiale, cela lui fut pénible de se retrouver sous les ordres de quelqu’un, mais il s'adapta.
C’est dans cette atmosphère douce-amère que naquit le bébé le 01.01.96. Une adorable fillette brune. Aya’el décida de l’appeler Joie. Bertrand grinça des dents à un prénom aussi… trinitaire. Aya’el ne voulait-elle pas donner un prénom Mo’at à leur fille? Non répondit-elle, elle voulait l’appeler Joie parce que le mojat, elle ne le parlait pas. Les Mo’at donnent souvent des prénoms signifiants à leurs enfants, et Joie cela signifiait quelque chose, pour eux. Joie était leur joie, malgré les épreuves. Bertrand céda, heureux de voir que, bien que sa vie à lui se soit effondrée, celle d’Aya’el commençait.
Ils apprirent quelques jours après la naissance de Joie que leurs têtes étaient désormais mises à prix par Jules Pellerin, le cadet de Bertrand. Effrayé par la perspective que des pirates ou des mercenaires ne les kidnappent pour les vendre à son frère, Bertrand paya pour une protection rapprochée pour sa famille. Cela les gena les premiers mois, mais ils apprirent vite a vivre avec.
Aya’el fut une excellente mère, très aimante, comme Bertrand l’avait deviné, et Joie fut longtemps très fusionnelle avec sa mère et sa tante. Elle réagissait peut-être ainsi en réaction à la mélancolie puis à la franche dépression que subit son père les premières années de sa vie.
Malgré la dépression, ou peut être à cause d’elle, Bertrand s’enferma dans le travail. Il devint directeur des imports/exports pour une grosse corporation et démontra ainsi son talent dans ce domaine. (La Corporation pris dès lors, au vu de ses excellents résultats, la charge de la protection rapprochée de la famille.)
Lors des deux ans de Joie, ils fêtèrent la naturalisation de toute la famille en plus de l’anniversaire de la fillette. Bertrand et Aya’el se remarièrent, par un mariage officiel de l’UC, cette fois et il put reconnaître sa fille officiellement. Cet objectif atteint, Bertrand ralentit le rythme jusqu'à s'arrêter complètement, vaincu par la maladie. Il passa quelques semaines dans une clinique de grand luxe de Vanguard, puis il en sortit et passa un an en convalescence chez lui. C’est à ce moment-là que Joie se lia réellement avec son père. Aya’el et Laetitia estimèrent pour leur part que puisque Bertrand était à la maison avec la petite, elles pouvaient en profiter pour rattraper leur retard scolaire. Elles s’inscrivirent donc à des cours pour adultes illettrés (principalement fréquentés par d’anciens esclaves ayant pour objectif de s’intégrer dans la société corporatiste).
Cette période de convalescence fut une chance pour le père et la fille, qui se rapprochèrent beaucoup. (malgré les colères de la petite au début, quand elle appelait sa mère.)
Après cette année sabbatique, Bertrand retourna travailler, mais le lien avait été noué avec Joie qui grandit entourée de l’amour de ses parents et de sa tante.
C’est en 100, quand Joie avait 4 ans, qu’une première tentative d’enlèvement eu lieu sur la personne de Laetitia. A ce moment là, plus personne ne croyait aux menaces de Jules. La protection était sur le point d’être levée quand l’évènement eu lien. En effet, la demi-sœur de Bertrand avait tendance à sortir seule, accompagnée d’un seul garde du corps, quand elle ne supportait plus le bonheur conjugal de son demi-frère et de sa demi sœur. Heureusement, elle fut exfiltrée efficacement par ledit garde du corps qui la jeta dans un taxi. De ce jour, les mesures de protection furent renforcées.
Il y eu trois autres tentatives au fil des ans, confirmant le besoin constant de protection de la famille. Bertrand se rendait bien compte que le problème ne venait pas de l’inquisition, qui l’arrêterait volontiers s’il passait à portée, mais sans prendre la peine d’intervenir sur le terrain d’une autre faction. Non, le problème venait de son frère devenu archevêque donc puissant, qui ne supportait pas l’idée d’avoir un hérétique dans la famille et qui voulait très probablement lui faire la peau à lui, l’hérétique, ainsi qu’aux trois femmes qui l’avaient sortit du droit chemin.
La vie trouva bientôt sa monotonie, entre le boulot, la famille et les occasionnelles tentatives d’enlèvement de l’un ou de l’autre. (Heureusement toutes sans succès). Joie grandit, faisant comme prévu le bonheur de ses trois parents. Bertrand prit un Kao de garde, pour être aux aguets la nuit.
Avec le temps, il monta peu à peu les échelons de Fushi jusqu’au poste de directeur des imports/exports pour le Système de Dorado.
Puis arrivèrent les Mutants, à la fête du Sommeil. Les Pellerins étaient ensemble à la fête et ils furent bien heureux de leur protection rapprochée qui les défendit et les exfiltra bien vite de la zone de danger.