Veritas et virtus. [w/Lodewijk Lazare]

- Monseigneur-Capitaine. dis-je avec respect en pénétrant dans le bureau et en me plaçant au garde-à-vous sans attendre que la porte claque derrière moi.

Je tiens sous mon bras les détails du plan d'escorte pour la mission d'aujourd'hui. Une des nombreuses choses qui m'avait tenu éveillé cette nuit, la sécurité de Monseigneur étant primordial à mes yeux et à quai de Port-Salem mieux vaut redoubler de vigilance. Sans le regarder directement, j'attends patiemment qu'il me donne mon repos pour m'approcher de son bureau et poser le document papier sur son bureau puis je fais un pas en arrière.

- Voici les détails de l'escorte pour l'enquête Monseigneur Lodewijk. Mon nom apparaît sur la feuille de mission, ce qui est rare pour une simple mission d'escorte et de protection, je serais son œil vigilant et son arme punitive si nécessaire. J'ai également choisi mes deux meilleurs éléments : Vauclair et Defrene.

Lorsque j'entends toquer à la porte, je repose ma plume dans son encrier et invite à entrer. La carrure puissante et massive de Père Vérité se glisse alors dans l'entrée de mon bureau.

> Vérité, je vous attendais. Dis-je en rangeant le parchemin sur lequel je travaillais dans mon bureau. Après quelques secondes nécéssaire à inspecter son uniforme, je lui donne le repos. Il pose alors l'objet de son travail, que je regarde attentivement.

Port Salem, un lieu de débauche et de corruption, une tâche sur un drap immaculé.
> Bien, très bien. Vauclair et Defrene sont de très bons choix, de voir deux Inquisiteurs en mission leur sera sans doute inspirant et formateur. Si bien entendu je ne comptais pas faire de chacun de mes membres d'équipage un Inquisiteur, je comptais bien inciter les meilleurs éléments à le devenir. Plus forte sera l'Inquisition, plus puissant sera notre levier.

> Si nous devions nous saisir d'individu, envisagez-vous de les interroger sur place ou de les faire rapatrier ? De plus de note plusieurs issues, à combien estimez-vous la probabilité de rencontrer de l'opposition ?
Je serai moi-même armé, même si j'étais bien moins entraîné et adapté aux affrontements que le serait mon escorte.

Il serait possible de faire appel aux prévôts en cas de forte affluence ou en cas de difficulté, même s'ils rechignaient à s'afficher aux côté d'Inquisiteurs.

- Je préférerais les rapatrier. Certains captifs ont besoin de moyens techniques plus... poussés pour se montrer coopératif. Ils sont rares ceux qui résistent à l'intimidation et encore plus rare ceux qui résistent aux coups, mais ces choses-là demande du temps et de la mise en scène et le simple fait de les amener en territoires inconnus peut faire son effet.

- Vous savez comme moi, Monseigneur, que Port-Salem est un lieu de vice où rôde des êtres abjectes. Il est donc difficile de déterminer la probabilité d'une attaque, mais le danger est omniprésent. Je marque une pause, la détermination se marquant sur mon visage. Mais soyez assuré que tant que vous serez sous ma protection et sous l'œil de l'Unique, aucun danger ne saurait vous atteindre.

A sa réponse, je prends le temps de peser les forces en jeu :

> Père Vérité, je ne me soucie que peu de ma sécurité, mais plutôt de notre mission. Passer de vie à trépas est une chose, de manquer à notre devoir en est une autre. Il m’est inutile d’argumenter, car Vérité sait pertinemment de quoi je parle, étant lui-même Inquisiteur. Notre mission consiste en l’identification de présumés hérétiques, en leur purge et purification du lieu. Bien entendu il nous appartiendra de juger pièces et âmes trouvées sur place, afin de remonter leur réseau.

Consultant un registre des crimes commis à Port Salem, j’essaie d’identifier quel itinéraire serait le moins problématique, bien entendu, les informations sont trop incomplètes pour en tirer un véritable schéma. C’est avec un soupir que j’ajoute :

Il ne nous sera pas possible de rapatrier une cible avec une équipe aussi restreinte, les riverains risque de nous poser problème. Nous allons emmener avec nous du matériel, un infirmier interrogateur sera parfait pour cela. Dis-je en réfléchissant tout haut, puis je regardais de nouveau Charles droit dans les yeux : Vous allez sélectionner le matériel que vous jugerez pertinent et pouvant intégrer le barda dont sera chargé l'infirmier. Si cela ne s'avérerait pas suffisant, on pourrait toujours le rapatrier.

Couchant l'ordre sur papier, avant de refermer la missive et le sceller à la cire, je la tendais à Père Vérité :
> Trouvez l'infirmier qui sera le plus apte à cette mission. Autre chose ?

- Bien, mon Capitaine. Il sera fait selon vos demandes. Je n'ajoute rien. Il sait ce que je pense du devoir et de l'Unique nous avons déjà eu l'occasion d'élaborer sur la question. Je sais simplement que dans une situation de vie ou de mort, sa vie vaut plus que la mienne et je suis prêt à faire mon devoir. Je n'entre pas non plus en alignement avec l'idée de l'infirmier interrogateur, je trouve que leur travail manque de poésie et pousse bien souvent le sujet dans un état de léthargie dans lequel il est difficile de distinguer la rêverie de la vérité. Néanmoins, je prends mon ordre de mission, lance un signe de tête entendu à Monseigneur et quitte le bureau d'un pas décidé.

Je rejoins Vauclair et Defrene à l'arsenal où nous nous dotons du même équipement. À savoir : un pistolet AE, un pistolet à impulsion, deux grenades assourdissantes et une grenade de désencerclement. J'ai pour ma part ma hache monofilament et mon couteau, Vauclair et Defrene sont tout deux armés de fusil à impulsion et de sabres monofilament.

Nous nous dirigeons ensuite tous les trois vers l’infirmerie pour réquisitionner la présence d'un l’infirmier interrogateur. Le choix est rapidement fait et je lui demande de prendre le nécessaire pour soigner des blessures en urgence et pour faire parler rapidement un détenu puisque nous ne comptons pas nous attarder ou le ramener.

Puis nous allons rejoindre Monseigneur Lazare à la passerelle de débarquement. Prêt pour notre mission.

Au départ de Vérité, je clos mes dossiers et scelle ce qui se doit. Je fais ensuite venir mon secrétaire ainsi que deux assistants pour m’équiper pour la mission. Changeant ma cape pour une cuirasse de cuir stylisé et blanc immaculé, intégrant un bouclier personnel, je regarde fièrement les symboles gravés de l’Inquisition. On me passe ensuite mon étui où est rangé ma précieuse arme, un pistolet à impulsion stylisé acquis lorsque je fus assermenté Inquisiteur. L’un des assistants se saisit alors d’une grande cape grise, que je stoppe d’un mouvement de la main.

> Laissez-moi me rendre à la passerelle ainsi, laissez notre équipage voir leur capitaine dans ses atours de combat. Dis-je paisiblement, avec une pointe de fierté.

Saisissant ma canne, j’hésite un instant à faire un premier pas, me sentant plus lourd que de coutume. Finalement je reste sur mes jambes, une douleur fuse, mais je m’y suis accoutumé depuis longtemps. Un second pas me conforte dans ma maîtrise, le troisième trop ambitieux m’oblige à m’appuyer sur ma canne. Après un sixième pas, j’ai trouvé mon équilibre et arrive à atteindre la porte de mon bureau sans autre accroche. Les regards attentifs de mon secrétaire et des assistants ne me pèsent pas, ils m’accompagnent.

Déambulant fièrement dans le vaisseau, je salue l’équipage, souriant, agréable, ils me le retournent, m’aident à continuer.

Sur la passerelle, j’arrive en même temps que Vérité.

> Sommes-nous prêt mon Père ? Demandais-je, en revêtant la cape grise à l’aide de l’assistant.

Mon regard capte notre capitaine dans ses vêtements de combat entré sur la passerelle au même moment que nous. Tout l'équipage semble s'arrêter pour nous admirer et je ne peux m'empêcher de ressentir une grande fierté à l'idée de servir sur la Pierre au Fusil et sous les ordres d'un homme tel que le Capitaine Lazare. Je lance un regard entendu à l'adjudant Vauclair qui me le rend aussitôt et vérifie une dernière fois son équipement en faisant le même signe à Defrene et à l'infirmier qui nous accompagne. Pour ma part, j'examine une dernière fois le matériel accroché à ma ceinture et passe ma main derrière mon dos pour m'assurer de la présence de mon bouclier personnel puis, je passe ma cape blanche pour masquer autant que possible tout ce matériel militaire.

- Nous sommes prêt, Monseigneur.

Nous quittons la passerelle pour pénétrer dans l'astroport de Port Salem. Comme prévus dans nos plans, nous optons pour une formation protectrice autour de Monseigneur-capitaine. Vauclair ouvre la marche, tandis que Defrene et moi protégeons les flancs, je m'occupe de celui le plus exposé et l'infirmier ferme la marche. Sur l'astroport même les regards ne se fixe pas sur nous, chacun s'occupe de ses petites affaires, la difficulté commencera probablement à l'intérieur de la ville elle-même.

Revêtus de nos capes, nous n’avons l’air que de pauvres hères frigorifiés, aussi nous ne nous encombrons pas d'un scénario d’entrée particulier, nous prenons toutefois la peine de faire assez de détour pour forcer à se dévoiler un éventuel suiveur.

L’ambiance ici est infâme, pauvre. Trop de gens suintent le péché, trop règles sont bafouées, trop de codes rompus. Alors que nous passons à côté d'une femme édentée et ivre morte dans un caniveau, je jette à mi-voix :
> Quelle indignité, ce paysage n'est pas digne d'un gouverneur Trinitaire. Je m’approche de la femme, me penche sur elle, elle sent l'alcool, la gerbe et la sueur. De ma main ganté je lui saisis le visage, lui jetant un regard écœuré. Si cela ne tenait qu’à moi, de grands feux envahiraient les places, des échafauds de Tricifiction borderaient les avenues. On y brulerait et saluerait les vices et hérétiques qui hantent Port Salem. Ouvrant la main, son menton retombe aussitôt. Malheureusement pour eux cette décision ne m’appartient pas. Dis-je, inspiré, imaginant un instant le grandiose d'une telle scène et le calme qui suivrait un tel orage.

Me relevant, je jette un regard à Père Vérité :
> Que cela évoque-t-il chez vous, mon Père ? Dis-je en indiquant l’épave humaine qui gisait dans son jus.

Mon regard ne s'attarde que peu sur le spectacle qui s'offre à nous alors que nous slalomons dans les rues pour éviter ou déceler plus facilement un éventuellement danger. Les rares fois où je baisse la tête pour observer mes alentours, ce que je vois me dégoûte. Ici gît la raclure de l'humanité. Nous nous arrêtons et je reste sur mes gardes, j'ordonne par des signes à mes hommes de couvrir Monseigneur, mais mon œil reste vigilant. Captant chaque mouvement autour de nous. Quelqu'un me semble suspect et fort trop intéressé par ce que nous faisons ici. Je trouve tout de même le temps de suivre la conversation de mon Capitaine.

- J'aimerais voir cette vision se réaliser, Monseigneur. La purification par le feu et la mort. La seule digne pour ce genre de lieu. Je vous aiderais à la réaliser. Par Sa grâce, nous mettrons fin à la corruption et à la débauche en ce lieu.

Je ne fais guère attention à la femme allongée sur le sol car mes yeux captent à nouveau la présence de l'homme suspect. Lorsque mon regard insistant se fixe sur lui, il semble mal à l'aise et rebrousse chemin, fuyant dans la direction opposé. Je fais un signe de tête à Monseigneur en direction du fuyard.

- Quelqu'un s'intéresse à notre présence. Restons sur nos gardes, Sa main nous protégera. Je tire discrètement la hache mono-filament de ma ceinture et la dissimule sous ma cape.

La réponse de Charles me laisse un sourire aux lèvres, une fierté teinté d’amusement. Je savais que depuis qu’il avait posé un pied sur la Pierre au Fusil, il me suivrait jusqu’en enfer s’il le fallait. Toutefois le manque de poésie du prêtre était regrettable et je me figurais qu’avec lui à mes côté, le chemin jusqu’en enfer risquait d’être long et fort peu artistique.

L’alerte soulevée par Père Vérité me sort de ma rêverie et me replonge dans la mission, me remémorant pourquoi son pragmatisme m’avait tant intéressé. Les informations que j’avais pu rassembler sur la zone allaient enfin servir, et nous aider à considérer les cas de figure :

> Il s’agit probablement d’un éclaireur, nous pouvons continuer sur cette rue sur 600 mètres, il n’y a pas assez de possibilité pour nous tendre une sérieuse embuscade. Ou alors nous pouvons entrer dans ce bâtiment Dis-je en désignant un porche. Probablement squatté, il communique via de frêles cloisons aux bâtisses mitoyennes. Là nous pourrons le forcer à nous suivre, là nous le pousserons à aller là où nous le voudrons. Dis-je en regardant tour à tour Vérité, Vauclair et Defrene. Je n’oublie pas l’infirmier, mais il n’a pas son mot à dire en cette situation.

Pendant que je parle, ma main libre glisse doucement jusqu’à se poser sur la crosse de mon arme.

La zone est déjà observée et je ne fais que jauger en quelques instants les propositions de Monseigneur. Qui, malgré son inexpérience, dans la tactique d'infanterie semble de bon conseil. Cela confirme encore une fois que Votre main invisible guide ses pas car nous sommes les justes.

La rue n'offre probablement pas d'espace d'embuscade, mais je n'aime pas les espaces ouvert, ils laissent trop de champs de tir et de distance à couvrir en cas d'affrontement, même direct. Le bâtiment offre plus d'avantages, en nous séparant, il est facile de déterminer s'il est occupé et les espaces restreints nous laisse plus de chance de nous débarrasser d'un éventuel poursuivant. Mon pas s'amorce donc vers le bâtiment en faisant signe au groupe de me suivre et de se remettre en formation.

Une fois à couvert à l'intérieur, je m'approche du Capitaine.

Defrene et Vauclair ouvriront la marche en éclaireur, s'occuperont de déloger d'éventuel squatteur et de nous signaler une menace. Vous et l'infirmier suivrez exactement leur parcours, mais en tenant vos distances de manière à pouvoir vous mettre à couvert rapidement. Je fermerais la marche et m'occuperais de nos poursuivants.

Car c'est presque certain, ils vont nous suivre et dans ce dédale, ils seront à ma merci.

Que Père Vérité me parle aussi franchement est rare, mais il est des situations où l’efficacité prime sur le décorum. Aussi je suis les instructions de mon Maître d’Abordage.

Le sol est jonché de traces de passages, de survie, de séjours prolongés. Alors que Vauclair se saisi d’un squatteur pour le jeter hors de notre passage, je l’arrête d’un mot.

> Vauclair, tenez-le en respect. Ordonnais-je respectueusement, avant que mon regard se fasse de métal incandescent en le tournant vers l’engeance de ces lieux. Vous qui n’êtes rien et n’avez que votre vie pour tout bagage. Dites-moi comment passez-vous par-delà ces murs. Dis-je en désignant le mur porteur à ma gauche.

En effet, j’avais lu des registres indiquant des fuyards qui évoluaient de bâtisse en bâtisse sans en sortir. Notre objectif étant à trois bâtiments du notre, d’emprunter ces passages serait un avantage stratégique.

Soudain des bruits de fracas derrière nous, non loin de Père Vérité, je dégaine aussitôt mon arme, calme, prêt à faire feu.

> Vauclair, faites-lui comprendre qu’il sera récompensé s’il nous aide, mais qu’il sera jugé pour Opposition à l’Inquisition si sa contribution devait être trompeuse, malveillante ou insuffisante. Dis-je par-dessus mon épaule, à couvert derrière un pilier en triste état, arme au poing.

Sa récompense sera un examen devant l’Inquisition, qui déterminera s’il devra être tué ou réinsérer dans la société, mais cela, nul n’avait à le savoir pour l’instant.

J'attends qu'ils s'éloignent dans le dédale des couloirs et sortent de mon champ de vision. Puis je suis leurs pas le temps de m'enfoncer dans le bâtiment avant de trouver une alcôve dans laquelle je peux m'enfoncer. Je me colle au mur et active mon bouclier personnel. Ils sont au moins deux sur nos traces. Leurs pas sont trop lourd pour être discret et malheureusement pour eux, ils ne m'ont pas vu embusqué hors de leur champ de vision.

Le premier ne me voit pas et la lame de ma hache lui décroche proprement la tête du reste du corps. Celle-ci s'en va voler un peu plus loin dans le couloir alors que son corps s'écroule.

Le second, arme en main et sans doutes pris d'une poussée d'adrénaline, se jette sur moi et je n'ai pas le temps d'esquiver. Dans la confusion de la chute, nos armes et nous échappe. Nous nous retrouvons alors dans une mêlée à main nue au cours de laquelle je prends rapidement l'ascendant, mes réflexes câblés me permettant d'esquiver plusieurs coups. Le laissant inconscient sur le sol pour ramasser ma hache puis trainer son corps par le pied pour rejoindre le reste du groupe.

Je fais craquer mes articulations et lâche son corps devant mon capitaine.

- Son camarade est mort. Au vu de leurs vêtements et équipement, j'estime qu'ils sont mercenaires. Si l'infirmier peut le réanimer, on doit pouvoir l'interroger ici. Je tourne la tête vers le squatteur. Et de votre côté ?

Lorsque je vois Père Vérité revenir hache au poing, traînant un corps inanimé, je relâche quelque peu ma pression et réenclenche la sécurité de mon arme.

A la question de Vérité, je regarde Vauclair qui venait d’en finir avec le squatteur qui c’était empressé de révéler tout ce qu’il savait, plus par crainte de la sanction qu’appâté par la récompense. Il nous révèle que c’est par les sous-sols que nous devrons passer, où certaines parois ont été abattues. Certaines sont aménagées, parfois même défendues, mais grâce aux informations, nous obtenons un itinéraire sans trop de heurts, à priori.

> Que présagez-vous que nous en tirions ? Il serait regrettable que nous consacrions notre temps précieux et notre peu de matériel à un suspect qui n’en vaille pas la peine.

> Avons-nous des charges anti-personnelles ou équivalent ? De piéger nos pas serait un moyen efficace de décourager nos poursuivants, d’alimenter leur paranoïa et nous donnerai plus de temps pour intervenir.

> Rendons-nous dans les sous-sols, en restant ici nous nous exposons inutilement. Nous aviserons sur place. Dis-je en laissant mon regard aller sur le corps inanimé.

- Difficile à dire, mais ce type de vermine n'est pas payé suffisamment pour taire l'intégralité des informations en sa possession, surtout si on l'encourage à nous révéler ce qu'il sait. Analytique, je parle tout en réfléchissant et remisant ma hache à ma ceinture.

J'en profite aussi pour recoiffer mes cheveux d'un geste de la main et épousseter mon uniforme. Un grognement presque inaudible traverse ma gorge alors que je remarque qu'il me faudra le recoudre pour réparer une déchirure du tissu. J'avise ensuite de notre stock d'armes. Nous ne disposons pas de charge antipersonnel mon capitaine. L'expertise de Vauclair dans ce domaine lui permettra, sans difficultés, de fabriquer le nécessaire avec les équipements à notre disposition. Il restera en arrière avec Defrene pour mettre en place le dispositif pendant notre avancée dans les sous-sols. Je confirme d'un signe de tête à l'adresse des concernés et attend l'ordre de Monseigneur.

- Bien, Monseigneur Capitaine. Dis-je en soulevant l'hérétique inanimé pour le porter sur mon épaule. J'ouvre la marche et dégaine ma hache, prêt à toute éventualité en m'engageant dans la direction qu'il m'indique.

Dès que nous serons plus au calme, Charles d’Ombrétoile pourra illustrer ses propos avec l’assistance de l’infirmier, je ne doute pas de la coopération de cette prise, aussi je hoche la tête à ses mots.

J’ai une totale confiance en l’expertise de Vérité quant aux capacités de ses hommes. Je connais leurs affectations, mais lui connait leurs expertises. La présence des deux hommes pour sécuriser nos arrières me parait proportionnée, d’autant plus qu’en termes de combat, Vérité se suffit à lui-même.

Nous descendons les escaliers, Vérité déplaçant seul sa prise, tel un vulgaire mannequin. Arme à la main, je suis toutefois surtout concentré à la descente des escaliers, obstacle mettant mon handicap à rude épreuve.

Arrivés en bas, quelque peu haletant pour ma part, nous trouvons rapidement un endroit facile à garder pour procéder à l’interrogatoire.

> Vous pouvez procéder mon Père, infirmier, réveillez le. Ordonnais-je en regardant tour à tour Père Vérité et notre Infirmier de terrain.

Le corps de l'hérétique tombe sur le sol avec violence. Il laisse échapper un râle de douleur, tousse, mais ne se réveille pas. Je regarde l'infirmier, dans l'attente, pour appuyer l'ordre de Monseigneur. Pendant qu'il s’affaire, j'étudis avec efficacité le reste de la pièce. L'endroit est fréquenté de toute évidence, la poussière est soulevée formant plusieurs chemins et les traces de pas y sont facilement lisibles. Il y a eu du passage récent, confirmant les informations soutirées plus tôt.

Le prisonnier s'éveille. L'infirmier l'a redressé et appuyé contre un mur. Je ne tarde pas et me mets immédiatement au travail. Comme prévu, celui-ci ne résiste pas beaucoup. Il n'est pas nécessaire d'utiliser de moyens techniques poussés pour faire parler un mercenaire. Leur loyauté est bien moins importante que leur vie ou leur intégrité physique. La somme d'information est mince mais suffisante pour avoir une vue d'ensemble de la situation.

Nous n'étions a priori pas leur cible initiale, mais notre présence dans les environs aurait pu perturber un échange de biens de contrebande. Il ignorait le nom des deux parties, mais son contact était un membre du clergé trinitaire de Port-Salem.

Hache en main, je tourne la tête vers mon capitaine. Attendant son ordre.

Pendant que l'interrogatoire est mené à bien, je tiens à jour le rapport de mission avec nos ressentes découvertes, je consigne aussi notre situation et nos objectifs à venir. Cela peut paraître fastidieux, mais une étape nécessaire à l'accomplissement de la mission, si nous devions échouer, pour permettre à nos successeurs de saisir au mieux la situation. On ne prévoit pas plus la mort que la réussite ou l'échec, aussi j'accomplis mon devoir avec dévouement.

L'interrogatoire terminé, mon regard croise celui de Père Vérité, je regarde brièvement sa hache et nos prisonnier :
> Ne nous encombrons pas. Je vis l'homme avaler sa salive avec difficulté. Rangeant mon arme dans son étui, de ma main libre j'accompagnais mes mots.
Si Tu retiens les fautes, Seigneur,
Seigneur qui subsistera ?
Mais près de Toi se trouve le pardon
Pour que l'homme Te craigne.

Main posée sur mon insigne Inquisitorial, je regardais de nouveau Vérité :
> Finissons-en, tuez le. Je n'étais pas de ceux qui laissaient les sales besognes aux autres pour m'en protéger, aussi je regardais le condamné droit dans les yeux, jaugeant sa terreur, sa souffrance, jusqu'à l'ultime instant où la ferveur de Père Vérité s’abattit sur lui.

> Poursuivons à présent. Ma voix ne laissait transparaître aucune émotion, aucune vibration. Ce n'était pas le premier, ni le dernier homme à mourir par mon verbe.

Dans le couloir souterrain, régnait la poussière et la crasse. Observant cela, mon regard tomba sur une silhouette tremblante et fuyante.