Pourparler

Conrad a enfin une occasion de parler avec l'Alvarez. Tant mieux il a des choses bien précises à demander, et des objectifs clairs pour le moment. Il est tombé sur le Némésis par hasard alors qu'il arpentait une zone de l'espace un peu à l'abandon, juste pas mal d'astéroïde et de vielle carcasse de vaisseau. Il a pris contact et demandé des pourparlers, il n'est pas là pour détruire le vaisseau d'un autre pirate. Pas son genre. Il se défend quand on l'attaque certes. Mais sinon les pirates sont a priori des frères ou des sœurs d'armes.

Cette fois il a fait une entorse à la tradition ... Comme toujours dans ce genre de situation en fait. Comme ce n'est pas vraiment une crise il invoque les pourparlers en tant que mesure conservatoire. Normalement il est censé recevoir le capitaine sur son navire et lui offrir le rhum. Mais là il va se déplacer avec son  rhum. Recevoir sur son navire c'est toujours mettre l'autre mal à l'aise.... Son équipage est très expérimentés et tous ont une flamme puissante. C'est une forme de pression subjective et inconsciente qu'il garde comme arme lorsque c'est nécessaire et ce n'est pas le cas présentement.

Il est habillé de noir et de rouge. Avec sa veste cintrée à capuche. Il a pris sa meilleure bouteille, et ses armes les plus efficaces. Deux pistolets et son épée laser. Ses officiers ont un peu râlés comme toujours. Ils détestent le voir quitter le navire... Sans se faire accompagner généralement en plus. "Comme d'habitude les gars. En cas de coup dur .... Vous rasez le vaisseau en face.
Pas de quartier. Et surtout vous envoyez le message sur Providence. Le code n'a pas été respecté, le capitaine Stackborn a été assassiné pendant les pourparlers sur le Némésis." Ne pas respecter le Code avec un homme comme lui c'est une forme de suicide. Les seigneurs pirates ne laisseront pas passer... Enfin peut-être une fois... Mais pas deux.

Il se dirige vers la passerelle entre les deux navires. Grand, le visage ouvert comme toujours et la Flamme scintillante dans ses yeux. Il traverse et atteint le sas du Némésis. Il cogne 4 fois. Et jette un doublon dans l'extracteur qui le propulsé dans l'espace. Toujours remercier la déesse pour ses bienfaits.

Sur le Némésis, mon équipage s'agite. Fait hautement inhabituel, un pourparler vient d'être requis, dans une situation qui n'avait a priori rien de conflictuelle. Le capitaine Conrad Stackborn est quasiment un inconnu à mes yeux. Néanmoins, je suis intriguée par l'étrange tournure des évènements. Nous avons bien assez d'ennemis dans la galaxie, et si m'en faire de nouveaux ne m'effraient pas, je ne saurais minimiser l'importance d'avoir des alliés et encore moins celle de savoir à qui l'on a affaire. Les ordres distribués sont simples : personne n'intervient en la défaveur du capitaine invité et personne ne vient interrompre notre pourparler, quelle que soit la raison. Néanmoins, si le vaisseau adverse démontre le moindre signe d'hostilité, nous riposterons. L'on ne s'attaque pas au Némésis impunément.

Vêtue de mes vêtements habituels, je m'observe une dernière fois dans le grand miroir suspendu dans mes quartiers personnels. Je réajuste une ultime mèche, et m'estime satisfaite : l'image qu'il me renvoie est parfaite. D'un pas lent et toujours avec élégance, je me dirige vers l'endroit où le capitaine débarquera. Je serai seule pour l'accueillir. S'il n'est pas dépourvu de bon sens, aucun mal ne me sera fait. La tête haute, j'arbore un sourire fier, peut-être qualifiable d'arrogant. Mes deux épées sont visibles sous mon imposante cape sombre. S'il l'ignore encore, il apprendra rapidement que je ne suis guère sans défense. Les bras croisés sous ma poitrine mise en avant par un astucieux décolleté, j'attends son arrivée.

Conrad attend qu'on lui ouvre le sas et entre dans le Némésis. Pour le moment il tient la bouteille de rhum dans la main et avance d'un pas ferme la capuche sur son visage et les yeux baissés. Un homme sourire tranquille se dessine sur ses lèvres et il entend déjà les murmures curieux autour de lui. Il suit les coursives et surtout l'homme qui le guide. Le Némésis est un vieux navire rafistolage de partout mais tous ceux qui l'ont sous estimé ne sont plus là pour en parler. La réputation des Alvarez n'est plus à faire dans se domaine. Il n'est pas spécialement inquiet... Il n'a pas besoin d'une réputation... Il a regarder le meilleur et appris par mimétisme.

Il arrive finalement devant la capitaine. Diantre... Ça aussi ce n'est pas surfait. Ébloui un instant par la capitaine et sa beauté subjugate il en oublie presque son devoir. Finalement il rejette sa capuche et salut la femme parfaite en face de lui. "Capitaine" il a fallu se concentrer, les femmes plus vielles c'est traditionnellement "madame" pour lui. Ensuite il toise les membres d'équipage présent et sonde leur âme. Il sait combien son regard paisible et plein de vie enflamme le cœur de ses compatriotes pirates. Sans doute sa meilleure assurance de ressortir vivant d'ici désormais.

"Il est bien conservé et entendu ce navire.... Félicitations." ajoute-t-il finalement.

Lorsque le capitaine arrive devant moi, je l'observe avec un vif intérêt. Il n'est pas le plus bel homme qu'il m'ait été donné de rencontrer, mais il m'est difficile de nier que je ne suis guère insensible à ce qu'il dégage. Il ne fait nul doute que sa flamme est puissante. Bien plus puissante que celle de la majorité des capitaines que j'ai déjà rencontré par le passé. Les membres de mon équipage présents, pourtant difficilement impressionnables, semblent eux aussi subjugués par l'homme et son impressionnante carrure. Cet entrevue promet d'être fascinante. D'un geste calculé, je tends ma main gantée pour venir serrée la sienne avec force et vigueur. Certes, suis-je une femme, cependant je n'ai rien à envier aux hommes. Je ne suis guère de petite taille, mais à ses côtés, je ne dois pas paraître bien grande.

- Capitaine, je réponds avec tranquillité.

La neutralité de ma voix ne laisse rien transparaître. J'apprécie ses compliments sur le Némésis. En ce qui concerne notre vaisseau, ma famille met énormément de coeur à l'ouvrage depuis toujours. Nos discussions se feront uniquement dans un cadre privé, et si je ne suis jamais insensible aux flatteries, il n'en saura rien pour l'instant. Aussi, je me contente de lui répondre par un léger signe de tête, sans abandonner mon sourire. Elégamment, je me décale légèrement sur le côté, et d'un geste de la main, je l'invite à me suivre.

- Si vous le voulez bien, nous allons nous entretenir dans mes appartements.

Un premier contact intéressant, elle ne le prend pas de haut... Tant mieux... Il adore se faire horripilant avec ceux qui le prennent de haut... Sauf les seigneurs pirates. Trop dangereux.... Mais il se connaît il n'est pas à l'abri selon la situation. Il serre doucement mais fermement la main tendue et vient naturellement se mettre au côté de la femme. Visiblement l'entrevue se fera en privé et c'est tant mieux. Pour le moment il est un peu désarçonné par son physique époustouflant ... Heureusement ça ne durera pas. Un seul amour et il est mort.

Il avance donc sereinement dans les coursives inconnues sans la moindre protection que le Code... Que certains considèrent plus comme un guide..... Une direction d'ensemble à suivre... Si possible. Bref, ce n'est pas une assurance, loin de là. "J'espère que je ne vous dérange pas ?" demande-t-il histoire d'être poli. Ça ne mange pas de pain. C'est une femme après tout.

Nous marchons côte à côte. Une méfiance naturelle semble émaner de lui, mais je ne peux que le comprendre. S'isoler dans un vaisseau inconnu est forcément impressionnant. D'autant plus lorsque le vaisseau en question a la réputation du Némésis, et qu'il a un capitaine telle que moi à sa tête. Néanmoins, il parait sûr de lui. J'ose espérer qu'il ne me sous-estime pas, sous prétexte que je suis une femme. Je hais profondément les machistes décérébrés. En revanche, je suis amusée par la question qu'il me pose. Sans cesser d'avancer dans les couloirs, je m'autorise à le dévisager.

- Eh bien, je dois avouer que votre demande m'a prise au dépourvu. Elle fut aussi soudaine qu'inusuelle. Néanmoins, l'imprévu fait partie intégrante du quotidien d'un capitaine, n'est-il pas ?

Mes talons claquent avec régularité sur le sol lustré du vaisseau, tandis que nous entrons dans la zone moins fréquentée qui recèle mes appartements. Nous ne croisons déjà plus personne depuis le début de notre progression dans les couloirs du Némésis. Je me suis assurée que nous serions seuls. Je marque un instant de silence, avant de poursuivre sans la moindre hésitation :

- Je me dois d'être honnête avec vous. Je n'ai pas la moindre intention de briser le code. J'ose espérer qu'il en est de même de votre côté. Vous conviendrez qu'il serait extrêmement fâcheux que nos relations s'engagent de façon hostile.

Il marche tranquillement à son côté et lorsqu'elle s'arrête pour lui parler il l'écoute attentivement. Un sourire léger un instant. Il ne recherche pas la gloire mais parfois ça ne serait pas du luxe quand même. "Déjà je ne suis pas vraiment en position... Mais on ne sait jamais avec les esprits pervers." il regarde la bouteille... Elle pourrait être empoisonnée. Il plonge ses yeux gris sombres dans ceux de la capitaine. La Flamme en lui s'embrase avec force. "Je ne suis pas de ces gens là. Jamais." dit-il avec une conviction quasiment fanatique.

Je soutiens son regard, captivée par la puissance de la flamme qui l'anime. Je n'ai moi-même pas à rougir de la mienne, mais lui, il est... Epoustouflant. Je hoche la tête, satisfaite par sa réponse.

- Bien.

Enfin, nous arrivons devant la porte massive qui mène à mes appartements. Je sors une clé d'une de mes poches, et je l'ouvre, sans jamais tourner totalement le dos à mon invité. Bien qu'il m'ait assuré qu'il ne tenterait rien contre moi, il est préférable que je ne le sous-estime pas. Je m'efface pour le laisser pénétrer en premier dans la vaste pièce qui me sert de bureau. En son centre, deux fauteuils entourent une table ronde toute de bois faite. Sur les murs, les portraits des différentes capitaines du Némésis regardent la scène, d'un air toujours fier. Plusieurs portes mènent à d'autres pièces de mes quartiers personnels, et entre elles se dressent de grandes étagères saturées de livres. Enfin, au fond, un bureau massif trône devant le mur, immense vitre s'ouvrant sur le vide intersidéral.

- Je vous en prie.

J'entre après lui, et je referme la porte derrière nous. Puis, je désigne les fauteuils, l'invitant à s'asseoir.

Il entre de manière résolue. Tournant le dos sans la moindre crainte. Elle n'est pas du genre à frapper un homme comme lui dans le dos. Et il n'est pas du genre à frapper les femmes sans une excellente raison. Alors une capitaine, aussi belle... Un crime. Il sourit tellement il se trouve superficiel pour le coup. Mais au fond ça fait partie de la vie et ça ne le dérange pas.

Il s'installe donc dans un fauteuil et pose la bouteille de rhum sur la table ronde avant de regarder de sa position les portraits qui s'étendent devant lui. Il reconnaît bien là tous les traits Alvarez. Décidément les femmes de cette famille se ressemblent énormément.

- Magnifique galerie de portrait. dit-il finalement. Toujours de manière sincère, jamais de flatterie ... Il est évident qu'il croit ce qu'il dit.

- Avec des verres nous pourrons trinquer. ajoute-t-il avec une petite pointe d'humour.

Toujours droite et fière, je souris. J'aime lorsque les portraits de notre si merveilleuse famille attire les regards. Je suis particulièrement altière en ce qui concerne mon nom et ce que toutes les femmes Alvarez sont parvenues à en faire.

- J'avouerai sans la moindre difficulté qu'ils font la fierté du Némésis. Ils rendent un bien bel hommage à notre nom.

Avisant la bouteille de rhum qu'il a déposé sur la table, je m'approche d'un placard, en sort deux verres. Je viens déposer le tout devant l'homme. J'ouvre la bouteille qu'il a apporté, rempli son verre. Dans un même geste, je verse un fond dans le mien. Juste suffisamment pour respecter le code. Je hais profondément cette tradition idiote qui m'oblige à agir à l'encontre même de mes principes. Cependant, de la même manière que je l'enseigne à ma fille, être capitaine implique de savoir mettre notre individualité et nos sentiments après notre devoir. J'attrape mon verre presque vide.

- N'y voyez aucune offense de ma part mais je ne bois usuellement pas d'alcool. Néanmoins, trinquons à notre rencontre.

Je m'assois en face de lui, et croise élégamment mes jambes, mettant légèrement en valeur mon décolleté plongeant. Je lève mon verre en sa direction.

- Eh bien, capitaine Conrad Stackborn, que me vaut l'honneur de votre visite ?

Il la regarde servir... Un froncement de sourcils... Léger. Elle n'aime pas l'alcool... Étrange et paradoxal pour un capitaine pirate.. Si elle lui annonce qu'elle est pacifiste il se promet de partir. Il trinque et bois religieusement. Le rhum a été partagé, le sang pirate échangé de manière symbolique. La quantité importe peu après tout. Il se détent notamment parce qu'elle est diablement séduisante et perd le fil de ses pensées l'espace d'un instant. Est-ce le bon moment pour aborder ce sujet.... Il sent que ça gâcherait ce moment plaisant avec cette femme à la réputation sulfureuse mais aussi au charme indéniable.

- les affaires. dit-il finalement. Ce n'est pas un mensonge... Pas toute la vérité. Mais c'est compliqué de déceler ses mensonges, alors les demi-vérités. .. Je me demandais si parfois vous seriez prête à vous associés pour des raids d'envergure. il est toujours à la recherche d'associés et la réputation du Némésis n'est plus à faire.

Je trempe à peine mes lèvres dans l'alcool, me forçant à engloutir le liquide légèrement sucré. Il n'est guère question de goût, mais j'ai assisté à la déchéance causée par la substance et ses effets. Je me dois de demeurer parfaite, présentable et maîtresse de mes moyens. Je ne puis me permettre ce genre de bêtises. Je repose mon verre sur la table, et tout en restant bien droite, j'appuie mon dos contre le dossier du fauteuil. Mes jambes croisées, je pose distraitement une main sur le haut de ma cuisse, sans jamais quitter Conrad du regard.

- Les affaires ?

J'avoue être surprise qu'un capitaine soit capable de prendre autant de risques simplement pour traiter affaire avec moi. Néanmoins, je réfléchis sérieusement à sa proposition. Le Némésis fonctionne de manière indépendante quasiment depuis sa création. Il s'est forgé seul sa réputation au fil du temps. Cependant, la flamme pirate du capitaine me dissuade de décliner son offre. Nous allier pourrait représenter un avantage non négligeable, autant pour lui que pour moi. Il me faut en savoir davantage.

- Eh bien, dites m'en davantage. Vous pensiez à certaines situations en particulier ?

Ma main toujours posée sur ma cuisse, je le fixe intensément.

Lui boit franchement son verre... Après tout c'est sans doute une de ses meilleures bouteilles alors il ne va pas la laisser se gaspiller entre les mains d'une femme qui n'apprécie pas. Ça doit pas être tous les jours facile ... Enfin avec le temps il a compris que la façon de commander des autres étaient.... Différentes. Il hausse les épaules à sa question et s'enfonce dans son fauteuil tout en se se forçant à regarder la belle dans les yeux... Pas ailleurs. Depuis quand est-ce si compliqué ?

- c'est variable en fonction des renseignements que j'obtiens. Par principe j'aime attaquer les esclavagistes trinitaires, mais çà an ne rapporte pas beaucoup. Quelques membres d'équipage en plus et l'assurance que les Mo'at soutiennent la cause pirate où qu'ils se trouvent. Par contre parfois j'ai des informations sur des transports de Durilium. Malheureusement trop souvent bien protégé.

Il ne vise pas Hell... La dernière fois à suffit à tous les pirates. Mais les transporteurs eux ne sont pas hors limites. A condition d'être suffisamment hardi et bien armé.

Le fait qu'il ne soit pas insensible à mon charme ne me laisse pas indifférente. Je dois bien avouer qu'il ne me serait pas désagréable de partager ma nuit avec lui. Cela fait trop longtemps à mon goût qu'il n'y a pas eu d'hommes dans mon lit. Distraitement, je passe ma langue sur mes lèvres, tandis qu'il m'expose ses projets. Intéressants et ambitieux, quoi qu'au demeurant flous.

- Eh bien, cela semble fort intéressant. Quel rôle envisagez-vous pour le Némésis dans tout cela ? Quels bénéfices pourrais-je en tirer ?

Je réajuste ma position sur le fauteuil, tandis que mon pied s'agite nerveusement. Pour l'heure, je ne parviens guère à savoir où il veut en venir, et cela ne me pousse guère à lui faire confiance. Je dois avouer que je ne connais pas grand chose à propos de cet homme. Par conséquent, j'ignore s'il faut que je me fie à ses apparentes bonnes intentions.

Il réfléchit une seconde. Pour lui la réponse est évidente mais si elle ne l'est pas pour elle ça va compliquer les choses. Il se redresse donc et se penche en avant comme pour faire un confidence.

- Pour les attaques sur les esclavagistes... La satisfaction d'avoir participé à une juste cause et des membres d'équipage généralement plus loyaux que la moyenne. Pour le durallium. La gloire, la fortune et la reconnaissance de tous.

Ses yeux brillent et c'est étrange, parce qu'il n'est pas tout jeune, sauf que son nom ne résonne pas dans les ports pirates. Alors il ne doit pas chasser la gloire. Enfin pas ce genre de gloire en tout cas.

- Le temps passe et l'empreinte que nous laisserons se décide maintenant. J'ai vécu tranquillement jusqu'à maintenant. Soit dans l'ombre des plus imposant d'entre nous, soit paisiblement à construire un équipage qui saura relever le défi que je vais relever.
Mais désormais il est temps. Et si construire une flotte sous ma bannière serait attirer les foudres des seigneurs pirates... Rassembler des pirates célébres pour agir de concert par contre sera toléré.

Visiblement il désire passer à la vitesse supérieure. Et seul ce n'est pas possible.

Ses mots résonnent avec justesse et profondeur en moi. J'ai entendu ce que j'avais besoin d'entendre, et je suis flattée qu'il ait songé à moi pour une telle entreprise. Je hoche la tête sans même chercher à dissimuler ma satisfaction et ma curiosité. Cet homme-là sait parler, aucun doute n'est plus envisageable. Mais cela n'est guère suffisant.

- Bien. Admettons que je décide d'engager le Némésis dans cette aventure. Comment pourrais-je être certaine que vous ne nous trahirez pas ? Quelle sécurité m'offrez-vous ? Sur quoi puis-je fonder l'assurance que je n'envoie pas ni mon vaisseau, ni mon équipage, ni mon nom à leur perte ?

Je me lève, défroisse mes vêtements avec délicatesse, et me dirige vers le placard dont j'ai sorti les verres pour prendre une bouteille emplie d'eau.

- Comprenez-moi bien, capitaine. La gloire, la justice, la richesse, les combats et la reconnaissance sont autant de motifs qui animent le Némésis depuis la nuit des temps. J'ai une réputation à tenir, des objectifs à remplir, des ennemis à affronter. Il est hors de question que me lance à corps perdu dans une cause idéaliste dont je risquerai de ressortir anéantie.

Je remplie mon verre d'eau, le vide d'une traite, avant de m'asseoir sur l'accoudoir du fauteuil, me rapprochant ainsi de Conrad au point de pouvoir le toucher en tendant le bras. Ma voix devient un murmure empreint de lascivité.

- Votre ambition et vos projets me plaisent. Mais je crains que, pour l'heure, ça ne puisse suffire.

La capitaine est accrochée mais visiblement ça ne suffit pas. Elle ne vois pas son avantage. Il est sceptique a ce sujet. Elle a autre chose en tête.

- je n'ai aucun intérêt a trahir un pirate. Si je veux tuer quelqu'un je le fais. dit-il simplement. Ensuite je ne suis pas un homme recherchant le profit a tout prix. Je peux partager sans aucun problème. Enfin je ne suis pas un rebelle. Je ne sers pas une cause, je participe simplement à la hauteur de mes moyens. Je pense qu'il faut commencer petit et se fixer ensemble une cible qui t'intéresse

Elle se rapproche de lui et il apprécie, la voix se fait plus chaude et il a l'impression que le débat est entrain de glisser... Ou pas. Est-ce qu'il se fait des idées ? En toute ça ne lui déplaît pas de l'avoir soudainement plus proche.

- je suis prêt a trouver un terrain d'entente. dit-il doucement.

Les épaules droites, je ne quitte pas Conrad du regard une seule seconde. Déceler mensonges et infidélités m'échappe bien trop souvent. Je possède en revanche une manière bien particulière d'en apprendre davantage sur certaines personnes dignes et potentiellement importantes que je rencontre.

- Fort bien. Je suis également prête à trouver un terrain d'entente avec vous.

Ma voix conserve ses tonalités chaudes et suaves.

- Il ne fait nul doute que votre présence à bord de mon vaisseau est une preuve manifeste de votre bonne foi. J'ose imaginer qu'un tel accord entre le Liberty et le Némésis pourrait marquer le commencement d'une association longue et durable. Il est impensable que j'ai à me méfier de mes alliés. J'ai bien assez à faire avec mes ennemis.

D'un geste lent, je replace une mèche de cheveux derrière mon oreille, et mes doigts effleurent un court instant le galbe de ma poitrine.

- Sachez, Capitaine, que je n'offre ma confiance qu'une seule et unique fois. Alors peut-être devrions nous aborder le sujet plus... En profondeur.

Conrad sourit. Il a un sourire petit certes mais tranquille et facile. C'est une personne plus intéressante que ce qu'il pensait au prime abord... Comme quoi aller à la rencontre des gens est toujours payant. Après elle reste dangereuse, ce qui ne le choque pas outre mesure, sous un aspect passionné et parfois simple il n'en demeure pas moins un pirate.

La sortie finale de la capitaine le surprend. Elle vient vraiment de lui proposer ce qu'il croit ? Sûr qu'elle aime prendre les choses en main alors. Ou il a trop bu et se fait des films. Mais il ne compte pas bouger sans avoir de certitude et surtout la réponse à sa prochaine question.

- Toujours prêt à approfondir une relation. Mais cela dépend des limites fixées. Y a-t-il des domaines interdits... Je suis un pirate et je ne respecte généralement que le Code et mes envies. Alors si certaines choses sont hors limites, il faut que je le sache avant de m'engager. Pour ma part mon équipage est hors limite j'entends par là que je suis le seul à décider d'une punition à l'encontre d'un membre de mon équipage, si c'est la mort alors je suis celui qui exécute la sentence. Ensuite ma liberté est hors limite, je n'ai plus de chaîne et celle qui pouvait m'enchainer n'est plus. dit-il avec de plus en plus d'intensité au fur et à mesure qu'il avance dans son explication.

Le capitaine me résiste bien davantage que certains de ses congénères. Cependant, il ne fait aucun doute qu'il succombe à mon charme, et il me semble déjà sentir un trouble palpable l'envahir. Les hommes ne peuvent guère avoir d'armes contre une créature telle que moi, si belle, si désirable. Je souris toujours, provocatrice.

- Je ne vous cacherai pas que j'apprécie notre entente. Je ne songe pas être dans l'erreur si je prétends que nos limites respectives se chevauchent pour n'en former qu'une unique, uniforme et fusionnelle. Ni mon équipage, ni mon vaisseau, ni ma liberté, ni moi-même ne vous appartiennent. Et réciproquement, bien entendu.

Sans cesser de le fixer, je mordille sensuellement ma lèvre inférieure.

- Tout comme vous, l'unique personne qui aurait pu prétendre m'enchaîner n'est plus. Cela nous fait un autre point commun. En revanche...

Je me lève et m'approche de lui avec sensualité. Prenant les devants comme bien souvent, je prends place sur les genoux de l'homme, pose une main sur son torse, mon visage à quelques centimètres du sien.

- Cela ne m'empêche jamais de prendre du... Plaisir.

Les yeux de Conrad brillent un instant. Les mots sont importants pour lui et nul doute qu'elle les manie parfaitement bien. Il note qu'elle ne parle pas de sa sœur... Étrange il aurait cru pourtant. Tant mieux d'un autre côté. Elle compliquerait l'équation sans doute de toute manière.

Lorsque la capitaine vient se poser sur ses genoux le doute déjà bien écrasé disparait définitivement. Il sourit tranquillement mais ses yeux trahissent la fièvre qui l'envahir rapidement.

- il me paraît intéressant que nos envies se chevauchent ainsi... J'espère même qu'elle se pénètre l'une l'autre pour en tester leur vigueur. Les mots sont aisés à dire mais parfois plus difficiles à assumer.

Une main vient se poser sur la haut de la cuisse de Jezabel tandis que l'autre remonte son dos doucement pour venir attraper attraper le tricorne de la femme et lui retirer. Les yeux de Conrad sont plongés dans ceux de la belle. Nul doute que la nuit sera longue si elle est d'accord. Il vient ensuite l'embrasser fougueusement avec la force et l'intensité qui est la sienne lorsqu'il fait quelque chose en accord avec ses envies.

Tandis qu'il commence enfin à entrer réellement dans mon jeu, je laisse mes doigts courir sur son visage et s'attarder sur ses lèvres. Le désir qui perce son regard me procure une satisfaction que je ne saurais pas même exprimer. Lorsque les mots ne suffisent plus à dire ce que l'on souhaite partager, lorsque le langage ne nous permet pas de lever les dernières barrières qui demeurent entre deux êtres, le corps, lui, parvient à s'exprimer. Alors que nos lèvres se scellent en un baiser fiévreux, je ne puis m'empêcher de sourire. Tout cela était presque trop facile. Presque. Il ne fait nul doute que cet homme est à ma hauteur, et qu'il est digne de partager mon lit. Je commence à défaire le haut de Conrad, et tandis que nos lèvres se séparent, je susurre :

- Assumer ses mots et ses actes, signifie être courageux...

J'approche mes lèvres de son oreille droite et passe une main dans les cheveux de l'homme, me redressant légèrement pour mettre en avant mon décolleté.

- Êtes-vous un homme courageux, Conrad ?

Elle commence à le déshabiller et il ne l'arrête pas bien entendu. Est-ce qu'il est courageux ? le murmure l’électrise un peu, elle sait y faire visiblement. Sa main remonte la cuisse de la femme et vient se poser entièrement sur sa fesse alors que l'autre remonte à nouveau son dos pour attraper ses cheveux. Il lui tire la tête en arrière et vient embrasser son cou. Un mélange de baisers et de mordillement. Puis ses lèvres glissent sur la peau de la capitaine pour descendre vers son décolleté. Mais il ne s'y attarde pas et revient plonger ses yeux flamboyant dans ceux de Jezabel.

- Les hommes ambitieux ont toujours du courage. Et ceux qui ont en plus du panache sont définitivement courageux. dit-il simplement attendant sa réaction.

Un soupire s'échappe de mes lèvres entrouvertes, tandis que lui semble de plus en plus perdre le contrôle. A l'instant présent, il n'y a rien que je souhaite plus que de connaître tout le courage de cet homme à l'aura brûlante. Je désire le mettre à nu, et apercevoir l'espace d'un moment passionné qui il est réellement. Ma voix se fait toujours plus provocante, tandis que je presse davantage mon corps contre le sien.

- Il me semble que je ne vais guère tarder à savoir si vous êtes réellement un homme plein de panache... N'est-ce pas.. Conrad ?

Lentement, sensuellement, la main qui était dans ses cheveux glisse le long de son visage, suit la ligne de son cou, descend sur son torse et disparaît dans son pantalon.

Les choses s'enchainent rapidement ensuite. Et Conrad termine dans la chambre de la capitaine a profiter de ses faveurs. Il la laissera conduire le bal durant la majorité de leur ébat. Il sera toujours temps de changer ça plus tard. Il est patient et vraiment pas pressé. Lorsqu'elle vient s'allonger à coté de lui alors qu'ils viennent de partager un intense moment de plaisir il note un sourire mystérieux sur ses lèvres. Étrange.

- Je crois que cette affaire a été rondement menée. conclut le capitaine.

Sûr que ça le change des filles de joies qu'il paie parfois. Et des autres femmes qui viennent de temps à autre à lui. Jezabel est son égal. Une capitaine à la tête d'un équipage reconnu et réputé. Quelqu'un qui comprend la difficulté de commander des pirates. Même s'il l'avoue il n'éprouve pas les mêmes difficultés que d'autres. Ses hommes le suivent naturellement et s'il sait comment les diriger... il n'en a souvent pas besoin.