Le soupirail des anges [Colombe & Jezabel]

Je ne possède pas la moindre envie de m'éloigner de la jeune femme qui se trouve désormais contre moi ; cependant, je la laisse toujours maître de ses mouvements. A n'importe quel instant, elle pourrait me dire non, me repousser, rompre la symbiose qui s'installe d'ores et déjà entre nous. Cependant, aucun mouvement de la sorte ne se fait connaître ; à l'inverse, je sens son corps secoué de ce frisson si caractéristique - un délicieux frisson qui peine à masquer ce qu'elle ressent réellement vis-à-vis de tout cela.

Ma main délaisse progressivement sa taille sans pour autant rompre le contact entre elle et son corps ; elle se contente de glisser très lentement le long de sa hanche, jusqu'à trouver à nouveau les mains de la jeune femme. Elle les a déposées sur son ventre, crispées sur le tissu de son haut. Lentement, je commence à caresser la peau de ses doigts, puis celle de son ventre, à travers le tissu.

Mes lèvres poursuivent leur voyage sur le cou de la jeune femme, s'y déposant en un rythme lent et doux. Chacun de mes baisers est profond et juste suffisamment appuyé pour que toutes les sensations l'atteignent. En même temps, ma main libre se fait audacieuse. Mes doigts se nouent autour du tissu au niveau de sa taille, et entreprennent de le soulever peu à peu, jusqu'à pouvoir se glisser sur la peau délicieusement chaude de la jeune femme, jusqu'à pouvoir la caresser.

- Tout cela vous plait-il, Colombe?

Une douce chaleur lui réchauffe le dos. La chaleur de Jezabel, de sa main qui glisse à nouveau sur les siennes, de ses lèvres dans le creux de son cou, de son corps si près du sien, de son odeur, de sa douceur, de son souffle, de sa voix, de tout ce qu’elle dégage et qui fait tourner la tête de Colombe depuis le début de ce petit manège. La jeune femme peine à garder les pieds sur terre afin de lui offrir une réponse cohérente à sa question. Dans l'attente, les mains de la capitaine se font aventurières, relèvent lentement sa chemise pour frôler son ventre.

Elle sursaute. Par réflexe, sa main se plaque sur celle de Jezabel pour l’arrêter dans son mouvement, comme elle le fait avec les doigts baladeurs des clients trop entreprenants. Ça va trop vite… et ça chatouille. Colombe ne s’y attendait pas. Elle regrette immédiatement son geste et relâche les doigts de la pirate en serrant les dents.

– … je sais pas, hésite-t-elle.

Le bruit de son cœur affolé envahit son esprit, tiraillé entre le profond malaise que lui inspire la situation et l’envie de se blottir contre Jezabel pour profiter de sa douceur. Son regard dévie momentanément sur le vide qui s’ouvre toujours derrière la baie vitrée et un nouveau frisson la secoue alors qu’elle ferme les yeux.

– J’ai peur, lâche-t-elle enfin d'une voix minuscule.

Elle a terriblement honte, mais avouer la crainte qui l'envahit a quelque chose de libérateur.

Prétendre que je ne suis nullement surprise par sa réaction serait mentir ; je me fige légèrement lorsque je sens sa main qui se referme sur la mienne. Elle hésite, son cœur s'emballe, sa peur transparait dans sa voix. Sans effectuer de geste brusque, je retire ma main de sa peau en une autre caresse. Je me détache d'elle un instant, afin de lui faire à nouveau face. J'effleure son visage, en la regardant avec une intensité toute particulière.

- Je ne souhaitais nullement vous effrayer, pardonnez-moi. Je veux simplement vous offrir toute l'attention et la douceur que vous méritez, Ma Dame, soufflé-je avec toute la sensualité du monde.

J'effleure ses lèvres des miennes, et doucement l'enlace, laissant mes mains courir sur son dos et ses cheveux, déposant des baisers sur son crâne. Je la berce avec tendresse contre moi, effectuant des gestes aussi doux que répétitifs le long de son dos ainsi que sur l'arrière de sa tête. Je ferme les yeux, me laissant porter par cette proximité incroyablement apaisante.

- Souhaitez-vous que tout cela cesse, Colombe ? Je ne vous forcerai à rien.

Nouveau murmure, contre son oreille, sans cesser tous les mouvements que je mets en œuvre pour essayer de la faire se sentir à son aise.

Colombe se retrouve à nouveau face à elle, près d’elle, contre elle, entourée de ses bras bienveillants et de sa voix apaisante. Entraînée dans un léger mouvement comme une enfant qu'on berce – comparaison qui l’aurait sans doute mise mal à l’aise si elle ne l’avait pas déjà été – elle sent une agréable chaleur l’envahir, délier lentement les muscles crispés de ses épaules et apaiser la tempête qui faisait rage dans son esprit. À son oreille, Jezabel la rassure, lui murmure qu’elle peut demander à ce que cela cesse. Même si elle se sait libre de ses mouvements depuis le début, Colombe ressent un intense soulagement en l’entendant. Avoir le choix, c’est déjà plus que ce que Josiah lui offrait, parfois, même s’il ne l’a jamais vraiment forcée à quoi que ce soit.

Elle hésite, tente de réfléchir tout en laissant Jezabel lui caresser le dos et les cheveux, car elle sait très bien ce qu’impliquera sa réponse. Mais la tendre chaleur de sa compagne continue de brouiller ses pensées, et c'est en fermant les yeux qu'elle secoue finalement la tête, tout doucement, avant de se blottir dans les bras de l’autre.

– N-non.

Non, elle ne veut pas que ça cesse. Parce que Jezabel sent bon, qu'elle est douce, et que Colombe est bien, là, maintenant, lovée contre la pirate, et ce même si elle n'a aucune idée de la façon dont elle devrait agir face à tout ça.

C’est… peut-être pas si mal, finalement.

Je souris davantage lorsqu'elle m'assure ne point vouloir que cela cesse. Il me faut avouer que je n'ai nullement envie de mettre un terme à cela. Ce jeu de séduction, ces caresses et les réactions de ma jeune compagne me divertissent autant qu'ils me touchent. La jeune femme possède une fragilité qui ne saurait me laisser indifférente. Peut-être est-ce parce que d'une certaine manière, elle pourrait me rappeler celle que j'étais dans ma prime jeunesse ; bien entendu, je ne me souviens point avoir été si prude et délicate. Ma mère n'aurait jamais laissé cela se produire. Cependant, il est indéniable qu'elle possède une plus-value. Il est rare que je me donne autant de mal pour une femme.

Je tâche donc de conserver nos corps serrés l'un contre l'autre, tandis que mes mains poursuivent leur douce valse contre sa peau, par-dessus le tissu fin de son haut. Je me détache finalement très légèrement d'elle, juste suffisamment pour pouvoir la regarder dans les yeux. L'une de mes mains demeure dans son dos, tandis que la seconde lui caresse la joue. Lentement, je rapproche mes lèvres des siennes, et cette fois-ci, l'embrasse avec davantage de passion - à peine, sans que cela ne cesse d'être d'une infinie douceur. Il me semble avoir bel et bien compris qu'il ne fallait nullement brusquer cette jeune femme-ci, sous peine de l'apeurer.

La situation lui laisse une drôle d’impression, à mi-chemin entre le malaise et le bien-être. Un instant, Colombe se demande pourquoi elle a accepté. Elle le regrette presque, même, quand Jezabel se détache d’elle pour la regarder de ses yeux si intenses et envoûtants. Colombe aimait le câlin, mais n’est pas certaine de vouloir que les choses aillent plus loin. Et pourtant, son dos frissonne toujours sous les doigts qui le parcourent en une agréable caresse. Elle laisse donc Jezabel venir chercher ses lèvres, découvre dans les gestes de cette dernière une passion renouvelée qui instaure un nouveau désordre dans ses pensées, déjà envahies d’une impression tenace de faire quelque chose de mal et de nuisible. Elle n’a absolument aucune idée de ce qu’elle doit faire face à cette femme qui, de son côté, lui semble tout à fait à l’aise. Peut-être Colombe pense-t-elle trop, alors que son esprit ne cherche qu’à s’échapper loin, très loin au-dessus de sa tête. Troublée, elle s’efforce de chasser les pensées parasites, de se répéter ce que lui a dit sa compagne.

Il n’y a pas de mal à s’offrir douceur et tendresse

L’expérience n’a pas d’importance.

Elle ne la forcera à rien.

Et soudain, Colombe s’aperçoit qu’elle lui rend son baiser. Timidement, sans aucune assurance, mais avec sincérité, alors qu’une douce chaleur inonde son corps toujours blotti contre celui de Jezabel.

Lorsque la jeune femme répond à mon baiser sans même faire mine de vouloir me repousser, je m'autorise à songer qu'il s'agit-là d'une première victoire non-négligeable. Je ne compte nullement accélérer le rythme pour autant ; cette relation, ce jeu de séduction et toute l'attention que je lui offre, agissent sur moi comme lorsqu'un anesthésiant cesse enfin de faire effet. Plusieurs sensations reviennent progressivement en moi, et si elles ne sont nullement toutes agréables, la douceur de notre baiser me semble déjà être une compensation amplement satisfaisante.

Sans quitter le contact de son corps, ma main glisse de sa joue, puis chemin le long de son épaule et de son buste, marque un temps d'arrêt contre sa hanche pour finalement venir trouver sa main. Mes doigts se lient aux siens un instant, simplement le temps que je la guide jusqu'au bas de mon dos, à la naissance de mes courbes. J'abandonne ses doigts à cet endroit après une nouvelle caresse, et retourne effleurer tendrement son visage. Je me risque à approfondir progressivement notre baiser, en tâchant d'être aussi attentive que possible aux réactions de ma jeune compagne.

Je maintiens nos deux corps collés l'un contre l'autre, sans cesser de faire des mouvements réguliers contre son dos, m'attardant de plus en plus lorsque je descends, sans pour autant m'aventurer trop loin. Pour l'heure, ce que je cherche avant tout est le contact avec sa peau. Je voudrais pouvoir m'y risquer sans que cela ne la brusque ou ne l'effraie d'aucune sorte.

Le va-et-vient de la main dans son dos a un effet terriblement apaisant qui lui fait momentanément oublier l’étrangeté de la situation. Sous les caresses, Colombe inspire en un long frisson et le parfum de Jezabel lui envahit la tête, brouille sa raison et la laisse étourdie. Pendant ce temps, le baiser se prolonge et sa compagne ne semble nullement prête à y mettre fin. Au contraire, Colombe la sent s’enhardir, alors que la main de la pirate guide la sienne pour la déposer au creux de ses reins.

La jeune femme rougit davantage en sentant la chaleur du dos de Jezabel sous sa paume, placée un peu trop bas à son goût. Elle semble l’inciter à lui rendre ses caresses, ce qui serait la moindre des choses compte tenu de la situation. Incertaine, Colombe délaisse son ventre où gronde toujours une armée d'émotions confuses pour glisser son autre main derrière sa compagne, la déposant plus haut dans son dos en un geste qui se rapprocherait davantage d’un câlin. Elle devine sa peau sous la douceur du tissu et, intimidée, se voit incapable de s’autoriser le moindre mouvement. Ses doigts s’accrochent néanmoins légèrement au tissu quand ceux de Jezabel s’attardent plus bas sur ses reins à elle, la faisant hésiter dans leur baiser. Elle devine aisément ses intentions et même si pour l'heure ses mains demeurent sages, Colombe songe avec une certaine appréhension au moment où elles se montreront plus aventurières.

Me voilà tout à fait attentive aux moindres variations qu'il m'est possible de sentir dans le comportement de ma jeune compagne. Je sens son hésitation, ses doigts qui se ferment sur le tissu de mon haut, et je suis même particulièrement satisfaite lorsqu'elle prend l'initiative de refermer ses bras sur moi. Je poursuis mes caresses, sur son dos et sa joue, et offre à notre baiser mille nuances sucrées. Je me risque à doucement venir caresser ses lèvres avec ma langue, sans cesser d'effleurer sa peau autant que faire se peut. Mes doigts se mêlent à ses cheveux, les ramènent derrière son oreille, cheminent sur son crâne, sa tempe, sa joue, son cou et sa nuque.

Lentement, la main qui est dans son dos entreprend le même mouvement que plus tôt, relevant légèrement son haut pour me garantir un accès à sa peau. Cependant, cette fois-ci, je ne m'y engouffre pas sur le champ. Je prends le temps de marquer une pause conséquente, et je vais jusqu'à interrompre momentanément notre baiser afin de pouvoir l'observer.

- Puis-je toucher votre peau, Colombe ? susurré-je.

En l'attente de sa réponse, je dépose des baisers sur le coin de ses lèvres, tout au long de sa mâchoire jusqu'à atteindre le lobe de son oreille que je mordille avec la plus grande des douceurs.

L’air s’insinue dans le dos de Colombe, sous le pan de sa chemise que sa compagne a légèrement relevé. La sensation est désagréable, tout comme l’impression de flottement qui s’installe dans l’attente de sa réponse qui ne viendra pas tout de suite. Un « pourquoi » brûle toujours les lèvres de la jeune femme, ravivé par l’intention évidente de Jezabel de pousser leur contact toujours plus loin. Pourquoi tient-elle tant à la toucher, à l’embrasser, à la traiter avec autant d’attention? Pourquoi elle, ici et maintenant? Elle voudrait le lui demander, mais la question se coince dans sa gorge. Elle n’est pas certaine de vouloir entendre ses raisons, tout comme elle est de moins en moins certaine de vouloir refuser la suite logique des choses. Dire que la situation qui lui échappe complètement serait un euphémisme et les baisers de Jezabel ne l’aident en rien à reprendre pied.

C'est finalement le courant d'air au bas de son dos qui lui rappelle qu'on lui a posé une question. D'un léger hochement de tête - les mots refusant toujours de franchir ses lèvres nouvellement libérées - Colombe donne enfin son accord pendant que les dents de Jezabel s’attardent sur son oreille. La jeune femme n'aurait de toute façon trouvé aucune raison de refuser, touchée par le fait que sa compagne lui demande sa permission; comme une preuve de sa promesse de respecter ses limites. Une invitation à lui faire confiance.

Je respecte tout à fait les longues secondes dont elle nécessite avant de m'offrir finalement une réponse. Nous ne sommes nullement pressées, n'est-il pas ? Lorsqu'elle me donne son accord, je lui octroie un court sursis - afin de lui prouver également que je ne suis point de ces amants affamés qui ne savent se tenir d'aucune manière. Puis, lentement mes doigts s'insinuent sous le tissu fin, et se posent sans brusquerie sur sa peau. Le contact de sa peau douce et chaude m'est fort agréable. J'en désire toujours davantage ; davantage d'elle, davantage de nous, de nos corps qui se mêlent, de nos esprits qui sauront fusionner - même un court instant.

En un premier temps, mes lèvres demeurent contre son oreille, et mes dents ou ma langue poursuivent une danse relativement calme - quoi que je mette en ces simples gestes toute la sensualité dont je suis capable, ou presque. Ma main demeure d'abord immobile, afin de lui octroyer la possibilité de s'habituer au contact étrange et étranger que représente ma peau contre la sienne. Mes lèvres délaissent peu à peu son oreille pour retourner contre son cou, et je m'autorise à mordre très légèrement sa peau. J'alterne avec des baisers profonds sur sa peau, et peu à peu, je trace un chemin invisible jusqu'à ses lèvres. Lorsque je les atteins enfin, mes doigts entame une lente valse verticale sur son dos, savourant le contact avec sa peau.

La main de Jezabel est chaude dans son dos, tout comme ses lèvres et ses dents qui explorent son cou. Colombe ne sait plus quoi penser de tout cela ; ses questions, ses peurs et ses envies s’entremêlent avec de moins en moins de logique. Elle n’a pas l’habitude de combattre autant de choses en même temps et de résister à… à quoi au juste? Elle ne le sait plus vraiment. Son esprit fatigué est loin dans les nuages. La seule chose qui lui semble encore avoir du sens est le sentiment de bien-être que lui apportent la chaleur du corps de Jezabel contre le sien, la douceur de ses lèvres sur sa peau et son parfum dans ses narines. Avec un soupir, Colombe ferme les yeux, pose le front contre l’épaule de sa compagne, lui offre son cou et s’enivre de l’odeur de ses vêtements pendant que ses mains remontent lentement le dos de la capitaine pour la serrer contre elle.

L'étreinte ne dure qu’un maigre instant avant que Jezabel ne revienne chercher ses lèvres. Au même moment, la main dans le dos de Colombe se met en mouvement, donnant naissance à des milliers de frissons qui lui courent sous la peau. La chair de poule lui fait légèrement cambrer le dos sans que ses lèvres ne quittent celles de Jezabel. Son baiser se fait même un peu plus hardi l’espace d’un instant, alors que ses doigts se referment sur le chandail de sa compagne.

Les réactions de ma jeune compagne me poussent à croire qu'elle apprécie grandement ce que nous faisons, malgré la timidité qui semble être la sienne. Je décide pour autant de conserver le rythme actuel ; j'ai le sentiment que si je venais à la presser, cela risquerait d'avoir des conséquences tout à fait regrettables. Oh, rien de tragique, il est vrai. Cependant, nous priver toutes deux d'un moment empli d'une telle douceur serait véritablement fâcheux. Je réponds à ses baisers avec la même hardiesse, tandis que mes doigts poursuivent leurs caresses sur son dos. Chacun de mes gestes se fait plus ample ; je m'autorise d'abord une petite parcelle de peau, puis je monte jusqu'à ce que mes doigts se heurtent contre le tissu de son soutien-gorge, et je le dépasse finalement pour m'attarder entre ses omoplates.

Je prends le temps de faire durer cet instant, de lui permettre de s'habituer à moi, à mon contact, à nos corps qui se mêlent l'un à l'autre ; puis, lentement, je la pousse à reculer en direction du lit. Lorsque nos jambes se cognent contre le rebord, je m'y appuie afin de pouvoir nous allonger toutes les deux sans la moindre brusquerie. Je la tiens de telle sorte que sa chute puisse être lente et contrôlée, que je puisse l'accompagner sans la blesser. Je n'arrache nullement mes lèvres aux siennes, sans pour autant l'emprisonner dans ce contact si elle ne souhaite point qu'il ne perdure.

Les doigts de Jezabel tracent un chemin frissonnant le long du dos de Colombe, s’aventurent toujours plus haut en de grands gestes agréablement doux. Malgré l’air qui s’engouffre sous sa chemise, la jeune femme se sent envahie d’une profonde chaleur qui lui fait tourner la tête. Docile, elle se laisse guider à reculons vers la chambre, comprend malgré ses yeux clos qu’elle s’éloigne de la fenêtre et pousse un court soupir de soulagement qui achève de lui détendre les épaules. L’instant suivant, ses jambes rencontrent une surface qu’elle identifie comme étant un lit et après une brève chute contrôlée, la voilà étendue entre un matelas et Jezabel Alvarez.

Prenant conscience de sa position, Colombe rouvre les yeux sans pour autant s’arracher aux lèvres de sa compagne. Est-elle réellement en train de faire ça? Il semblerait que oui, à voir la Dame qui se tient au-dessus d’elle, douce, sublime et inquiétante à la fois. Une telle présence lui donne l’impression de s’enfoncer dans le matelas et son baiser se fait soudain incertain. Comment appréhender la suite des choses? Colombe n’en a pas la moindre idée. Elle ne sait même pas où mettre ses mains, qui demeurent résolument accrochées au dos de Jezabel. Nerveusement, elle tente quelques caresses du bout des doigts, attrapant au passage une mèche de cheveux clairs et soyeux qui traînait non loin.

A peine sommes-nous allongées que je sens l'hésitation qui est la sienne. Je ne puis lui en vouloir ; il me serait difficile d'oublier qu'elle m'a avoué n'avoir eu aucune expérience de cette acabit auparavant. Mon corps se tient au côté de la jeune femme, quoi que mon visage soit au-dessus du sien. Ma main poursuit ses caresses sous son haut, s'aventurant délicatement au niveau de ses côtes. Notre position m'offre un meilleur accès à sa peau, et le tissu laisse une partie de son ventre à l'air libre. Je quitte ses lèvres pour déposer de nouveaux baisers sur sa joue et jusqu'à son oreille.

- Tâche de te détendre... Si tu le souhaites je peux te guider, soufflé-je.

Je décide d'abandonner le vouvoiement pour tenter de la faire se sentir davantage à son aise ; je poursuis mes baisers et mes caresses sous sa chemise, avant de me redresser - non sans lui avoir dérobé un autre baiser.

- J'ai cependant besoin que tu me guides également. Je souhaite que tu me dises lorsque ce que je te fais te plaît, et lorsque cela te déplaît, entendu ? Tu n'as ni honte ni crainte à avoir ; je suis là uniquement pour te procurer du plaisir, Colombe, soufflé-je.

J'enjambe lentement sa taille, afin d'être tout à fait au-dessus d'elle. Ainsi assise, je puis glisser mes deux mains sur la peau de son ventre, sans cesser de la regarder. Je remonte progressivement son haut, guettant ses réactions.

Jezabel l’invite à se détendre, mais Colombe ne possède pas l’assurance nécessaire pour accéder à sa demande. Tout au plus parvient-elle à hocher timidement la tête aux paroles de sa compagne. Cette dernière fait visiblement tout pour la rassurer, mais ses mots ne font que raviver la confusion croissante de la jeune femme. Elle n’est rien pour Jezabel, qui n’avait probablement même pas conscience de son existence au début de la soirée. Malgré cela, elle se sent soudainement si importante à ses yeux, là, maintenant, alors que l’illustre capitaine s’installe à califourchon sur elle et entreprend de relever sa chemise…

Elle ne devrait pas avoir honte ou peur, mais ce sont malheureusement ces deux émotions qui prennent le dessus quand elle se tortille sous Jezabel dans un mouvement affolé.

– P-pardon, bafouille-t-elle. J’essaie madame je… j’suis désolée… mais...

Mais elle ne sais plus parler, ni ne sait où elle en est, et son cœur bat de nouveau à ses tempes. Ses mains se posent sur celles de la capitaine pour les arrêter.

– … pourquoi faites-vous ça?

Sa voix n'est plus qu'un murmure incertain. La question lui a finalement échappée et aussitôt Colombe sent la crainte lui tordre le ventre en imaginant la suite des choses. Et si elle la faisait fuir? Et si elle perdait patience? La jeune femme rougit de nouveau et baisserait volontiers les yeux si, dans sa position actuelle, ce mouvement ne lui offrait pas une vue imprenable sur la poitrine de sa compagne.

Je me fige à nouveau lorsqu'elle se tend sous moi ; ses mains viennent bloquer les miennes, et je ne cherche nullement à rompre se contact. A l'inverse, avec tendresse, mes doigts caressent les siens, tandis que j'essaie de lui offrir le plus lumineux de mes sourires. Visiblement, elle n'apprécie point de se sentir bloquée, et je puis le comprendre. Par ailleurs, elle semble tout à fait pudique. Doucement, je tire sur ses mains pour l'inviter à se redresser. Je me retrouve ainsi assise sur elle, et je guide une nouvelle fois ses mains dans mon dos avant de venir la serrer contre moi. En cette position, son visage arrive au niveau de ma poitrine. L'une de mes mains la maintien afin qu'elle n'ait point à forcer pour demeurer en cette position, tandis que l'autre caresse sa joue ainsi que l'arrière de son crâne. Je dépose un baiser tendre sur son front.

- Nous pouvons cesser tout cela, si tu le souhaites.

Je n'ai évidemment aucune envie que tout cela cesse. Pour autant, je n'ai point pour habitude de forcer mes partenaires. Aussi décidai-je de lui répondre honnêtement, en un murmure tranquille.

-Je fais cela parce que tu me plais. Ta douceur et ta fragilité éveillent en moi un certain nombre de sensations que je n'ai point l'occasion d'éprouver usuellement. J'ignore pourquoi précisément, cependant, j'ai envie que tu te sentes à ton aise. J'ai envie de te faire du bien, et de te faire découvrir ce qu'est le réel plaisir.

Elle lui plaît. Elle, Colombe Delcourt, plaît à Jezabel Alvarez. La jeune femme aurait été tentée de douter de ses paroles si cette dernière ne lui avait pas semblé aussi sincère. Jamais elle n’aurait pu concevoir qu’il lui serait un jour possible de faire un tel effet à quelqu’un. Il y a eu Josiah, certes, mais jamais son défunt mari n’a démontré le moindre intérêt pour ses envies à elle. Les choses prennent une tournure très bizarre et, de nouveau collée contre sa compagne du moment, la tête contre son cœur et ses mains dans son dos, Colombe s’accorde plusieurs secondes pour assimiler l’information. Les raisons de Jezabel la mettent mal à l’aise autant qu’elles la rassurent.

– … je vois.

Et elle ignore une fois de plus ce qu’elle doit faire, tiraillée entre ses envies, ses peurs, sa curiosité et son incertitude. Elle se sent fatiguée, soudainement, et un peu gênée de se retrouver à nouveau bercée comme une enfant. Finalement, elle choisit d'être honnête, tout comme l'a été Jezabel.

– J’veux pas que ça arrête, c'est juste que... qu'il y a beaucoup de choses qui se passent dans ma tête en ce moment. Je suis un peu perdue, je crois.

La voilà qui se sent stupide, maintenant. Un petit rire contrit secoue sa poitrine et, se sentant rougir de plus belle, elle ferme les yeux pour enfouir son visage dans l'épaule de Jezabel.

– Vous savez comment faire de l'effet aux gens, en tout cas.

Je poursuis mes caresses tout en l'écoutant m'ouvrir son cœur à son tour. Je souris sincèrement à l'entente de son compliment.

- Je te remercie pour le compliment. Je t'avoue qu'il n'est point usuel que cela soit si... Complexe à mettre en place. Cela ne me déplaît pas pour autant.

Je la force à relever la tête en ma direction, et effleure ses lèvres des miennes, sans cesser de sourire.

- Je vais t'avouer un secret, Colombe. Ce que j'apprécie le plus dans l'acte sexuel est l'efficacité avec laquelle cela vide l'esprit. Peut-être devrais-tu cesser de prêter attention à ce qui se passe dans ta tête, et prêter un peu plus attention à ce qui se passe entre nous, susurré-je, aguicheuse.

Je m'arrache doucement à son contact et me relève, l'invitant à me suivre un instant, afin qu'elle soit assise sur le bord du lit. Je m'approche d'un panneau de contrôle incrusté dans le mur, en prenant soin de faire rouler mes hanches d'une manière tout à fait indécente. Déjà habituée par ce genre de technologie, j'active la musique adéquate, tandis que l'ambiance se fait plus feutrée et les lumières plus tamisées. Je ne quitte plus Colombe des yeux, tandis que j'entame une danse lente et sensuelle, presque collée à la jeune femme pour qu'elle ne puisse point détourner le regard. J'espère avoir toute son attention, alors que mes mains remontent le long de mon corps jusqu'à atteindre les premiers boutons de mon chemisier.

La compréhension dont Jezabel fait preuve soulage Colombe d’un énorme stress… qui revient légèrement à la charge lorsque la capitaine reprend la parole.

– … ce qui se passe entre nous?

Il s’en est passé des choses entre elles depuis le début de la soirée, mais la jeune femme a l’étrange impression que Jezabel n’y fait pas référence. Leurs lèvres s’effleurent de nouveau et Colombe perçoit sans mal le sourire qu’affiche sa compagne. Elle a définitivement quelque chose derrière la tête. Intriguée, la serveuse se laisse entraîner au bord du lit pour s’y asseoir et la suivre du regard, remarquant avec un certain embarras le roulement prononcé de ses hanches alors qu’elle s’approche de la console fixée au mur. Ses yeux la quittent un instant quand les lumières se tamisent, balayent la chambre qui s’emplit d’une musique d’ambiance et reviennent sur Jezabel pour la retrouver terriblement près d’elle, à entamer une danse des plus suggestives.

Oh bon sang.

Colombe écarquille les yeux. Elle a terriblement chaud, tout à coup, alors que son visage, son ventre et tout le reste de son corps prennent feu. Intimidée, elle se recule, s’appuie sur ses coudes pour se retrouver à moitié étendue sur le dos, pendant que la capitaine devant elle s'attarde au premier bouton de son chemisier. Si sa surprise et son embarras n’étaient pas aussi intenses, Colombe lui aurait volontiers accordé la victoire, sur ce coup-là. Il lui est en effet impossible de penser à autre chose, soudainement.

L'heure n'est plus guère à la parole, mais aux gestes. Et voilà bien ce que je m'applique à faire pour elle. Cela ne me semble pas vain si j'en crois le regard qu'elle pose sur moi. Je la laisse tout à fait se reculer afin qu'elle puisse être aussi à l'aise que possible. Quant à moi, je poursuis mes gestes en déboutonnant lentement mon chemisier, étape par étape. Je remue sensuellement mes hanches et poursuit cette danse envoûtante qui m'a déjà fait prendre plus d'un cœur.

Progressivement, mon soutien-gorges écarlate apparaît sous le tissu blanc. Cependant, je fais en sorte de ne point dévoiler trop de chaire, tandis que je lui tourne le dos un instant, afin qu'elle puisse profiter de cet angle-ci de mon déhanché. Lorsque je lui fais de nouveau face, je laisse tomber ma chemise au sol, dévoilant entièrement les dentelles qui ne masquent guère la peau qui se trouve au-dessous. Je ne cesse de sourire, guettant tout de même ses réactions afin de m'assurer qu'elle apprécie le spectacle que je lui offre.

Je m'assieds auprès d'elle un instant, mon corps se mouvant encore au rythme de la musique. Je la regarde dans les yeux; l'une de mes mains lui caresse un instant le visage tandis que l'autre glisse le long de ma cuisse, jusqu'à pouvoir délasser la première botte, et les retirer toujours aussi sensuellement. Je fais de même pour la seconde jambe, puis dépose un baiser sur la main de Colombe avant de me relever.

Bon sang.

Jezabel est réellement en train de se dévêtir et, en première loge pour assister au spectacle, Colombe ne sait plus où se mettre. Tendue comme une barre de fer, elle se redresse lentement pour s’asseoir au centre du lit. Sous ses yeux, la capitaine se déhanche à travers les notes d’or et de noir qui s’échappent des haut-parleurs, dévoile un morceau de dentelle rouge qui se marie étrangement bien avec la musique qu’elle a choisie. Ce n’est définitivement pas la première fois qu’elle s’adonne à ce genre de petit manège, à en croire l’assurance avec laquelle elle abandonne son haut…

Colombe remarque rapidement que la dentelle ne cache pas grand-chose et cette constatation la fait violemment rougir. Elle détourne le regard un court instant, mais se voit forcée de poser à nouveau les yeux sur sa compagne quand celle-ci la rejoint sur le lit, le temps de retirer ses bottes et de permettre à sa spectatrice de l'admirer. Elle est… belle. Très belle, même. Et Colombe a chaud à force de rougir autant, tellement qu’elle sent à peine la caresse sur sa joue et le baiser sur ses doigts. Sa main demeure même en l’air quelques secondes, là où Jezabel l’a lâchée, pendant que son regard médusé suit les déplacements ondulants de la capitaine. Elle ramène son poing contre sa poitrine et ressent son cœur qui bat la chamade pendant que sa compagne retourne poursuivre sa danse sur le pan de sol où gît déjà son chemisier.

Cela semble fonctionner d'une manière tout à fait appréciable. La jeune femme m'observe et la rougeur de ses joues ne laisse planer que peu de doutes quant à ce qu'elle ressent. Aussi décidai-je de poursuivre en cette voie, en prenant tout à fait le temps de me mouvoir sous ses yeux. Mes mains se plaquent un instant contre mes cuisses tandis que je descends jusqu'à m'accroupir, puis me relève toujours au rythme de la musique. Mes doigts s'attardent alors sur ma ceinture, la détachent habilement avant d'en faire de même pour l'attache de mon pantalon.

Je le maintiens un instant, tournant le dos à ma compagne afin d'attirer son attention sur ma chute de reins. Je fais alors doucement glisser mon pantalon le long de mes jambes, dévoilant ma culotte assortie à l'identique au soutien-gorges, ainsi que mes porte-jarretelles qui maintiennent mes bas - eux aussi à dentelles. Lentement je me tourne en sa direction, et je me mords la lèvre tandis que nos regards se croisent encore. Toujours proche d'elle, je tends une main vers elle, afin de l'inviter à me rejoindre.

Rouge. Tout devient d’un beau rouge vif, chaud, passionné, avec un arrière-goût de danger. Rouge comme la dentelle de Jezabel, qui vibre à travers le blanc de son dos et l’or de la musique qui l’enveloppe. Rouge comme le visage de Colombe qui l’observe, qui hésite à détourner la tête sans réellement en avoir envie, alors que le pantalon de sa compagne rejoint le chemisier au sol. Rouge comme son malaise et sa curiosité face à cette femme – la première qu’elle ait jamais vue aussi peu vêtue – qui lui tend la main pour l’inviter à la rejoindre.

Elle ne devrait pas penser, pourtant quelques souvenirs remontent. Pas ceux de la Trinité, ni même ceux de Josiah, mais plutôt ceux des doigts de Jezabel dans son dos, de ses lèvres sur les siennes et de sa chaleur contre son corps. Le souvenir de tout ce rouge qui lui envahit la tête et qui la laisse pantoise. Non, elle ne voulait pas que ça cesse, et se retrouver seule après autant de douceur lui donne l’impression d’avoir froid malgré la chaleur ambiante. Alors Colombe inspire profondément et s’approche du rebord du lit pour se relever. Doucement, ses doigts viennent chercher la main que lui tend Jezabel, poussent l’audace jusqu’à la retenir une brève seconde, le temps que Colombe y dépose à son tour un timide baiser. Puis, la jeune femme laisse sa compagne l’entraîner à sa suite, dans une danse qui, indéniablement, lui paraîtrait plus belle à deux.

Mon sourire se fait plus lumineux encore lorsque je la vois se mouvoir afin de me rejoindre ; elle se relève lentement, prend ma main dans la sienne, porte ses lèvres à mes doigts. Durant tout ce temps, je ne cesse de l'observer et de l'attendre. Et puis, avec cette sempiternelle douceur qui ne me quitte plus guère, je l'attire à moi collant à nouveau nos deux corps l'un à l'autre. Je n'ai que faire d'être presque nue alors qu'elle est encore entièrement vêtue. Mes mains se posent sur ses hanches, et je l'invite à se mouvoir avec moi, au rythme de la musique. Précautionneusement, je soulève son haut afin qu'aucun tissu ne sépare plus son ventre et le mien. Je veux sentir sa peau contre la mienne, je veux qu'elle se sente envahie par l'ivresse de nos corps qui se mêlent.

Emportée par l'intense sensualité que dégage notre danse, je pose mon front sur le sien un bref instant, avant de lui tourner à nouveau le dos. Mes doigts s'accrochent au sien, sans que je ne cesse de remuer mes hanches contre elle. Je guide ses mains jusqu'à mon ventre dénudé et me risque même à en déposer une au niveau de ma poitrine, lui laissant tout juste le temps de m'effleurer. Lorsque je lui fais face, je trace une ligne qui suit les boutons de sa chemise. Je n'oublie pas pour autant de m'enquérir des émotions qui peuvent la traverser à cet instant.

Colombe retrouve le corps et les mains de Jezabel, découvre la chaleur de son front contre le sien et de sa peau sur la sienne, brièvement, alors que dans son ventre le feu gronde avec force. L’envie de lui dérober un baiser la traverse, mais sa compagne ne lui en laisse pas l'occasion. Elle mène la danse, ondule sensuellement devant elle, et Colombe ne voit aucune raison de refuser qu’on la guide ainsi. Elle s’efforce de détendre ses muscles encore crispés et de suivre les mouvements de Jezabel avec de plus en plus d’aisance. Sa compagne dirige ses mains et Colombe la laisse sagement faire, effleure la peau et la dentelle qui lui sont offertes avec une certaine pudeur mêlée de curiosité. Puis, le dos brûlant de la pirate se dérobe à son regard et elle retrouve son visage et… tout ce qui se trouve en dessous. Elle la sent suivre le chemin des boutons de son propre chemisier et déglutit en prenant conscience qu’elle est toujours vêtue, contrairement à Jezabel, et que la suite logique des choses voudrait qu’elle perde quelques morceaux elle aussi.

Mais elle ne doit pas y penser. Pas tout de suite. Pas du tout, même, si possible. Alors elle s’accroche à autre chose, glisse ses mains d’abord hésitantes, puis de plus en plus amples, dans le dos de Jezabel, sur cette peau qui s’avère aussi douce que le reste de son corps, alors qu’elle lève le menton pour aller chercher ses lèvres.