Histoire
"Alors comme ça vous avez envie d'entendre mon histoire? Je tiens à vous avertir d'avance qu'elle n'est pas aussi palpitante que celle de bien des pirates, mais j'ai vécu mon lot d'aventures."
Elle fait un clin d'oeil à une serveuse qui passait tout près. Celle-ci lui rend un clin d'oeil complice en rougissant légèrement.
"Alors... je suppose que je vais commencer depuis le tout début. Ah non, mieux encore, laissez-moi vous parler de ma mère un peu." Elle marque une pause, scrutant son public du regard. "Nal'ka Vistana était une Mo'at de Renaissance. Son clan, le clan Vistana, était un clan assez nomade. Ils vivaient dans des genres de caravanes et des tentes faciles à poser et à défaire. Vous voyez le genre... Ils aimaient porter des tas de bijoux en honneur de leur déesse, Calypso, et se peinturaient souvent le corps avec de la peinture très colorée. Bref, ma mère a passé toute sa jeunesse avec son clan. Mais un jour, les mecs de la Trinité sont arrivés et ils ont presque tout eradiqué le clan. Ceux qui n'étaient pas tués étaient pris en esclavagisme. C'était le cas à ma mère."
Elle prend une gorgée de sa chope de bière, puis s'essuie la bouche du revert de la main.
"Ma mère est devenue l'esclave d'un Trinitaire assez influent." Elle se place de façon très formelle, posant sa main sur sa poitrine en prenant une voix de snob. "L'inquisiteur Bartholomé Chevalier." Elle rigole doucement. "L'Inquisiteur Chevalier était un homme redouté autant par ses collègues de l'Inquisition que ses victimes. Il vivait avec plusieurs esclaves, mais Nal'ka c'était sa préférée... À quelque part, je ne le blâme pas. Ma mère était vraiment canon. D'où vous pensez que j'ai hérité mes merveilleux atouts? Certainement pas de lui..." Elle détourne le regard un moment. "Mon père la battait régulièrement et il abusait tout aussi régulièrement de son corps. Ce n'est pas étonnant que ma mère a fini par tomber enceinte de lui." Elle crache à côté d'elle d'un air dégoûté. "Salaud... Lorsqu'il a apprit qu'elle était tombée enceinte, il l'a battu si fort que j'ai manqué d'y perdre la vie... mais ma mère était forte, tout comme moi. Si ça n'avait pas été du fait qu'elle était la préférée à mon père, je crois qu'il l'aurait tué."
Elle s'arrête un moment pour boire une longue gorgée de bière. Son regard se promène sur la foule qui s'était accumulé pour entendre son histoire.
"Je suis née dans un sous-sol miteux où tous les esclaves vivaient ensemble. Je ne sais pas si c'était la grâce de Calypso ou le fait qu'une des femmes qui travaillait avec ma mère avait été sage-femme au sein de son clan, mais nous avons tous les deux survécu à l'accouchement. Ma mère m'a appelé Nadezh'da." Quelque personnes se mettent à rire doucement. Nadya lève le sourcil. "Ouais, je sais, j'aime pas trop qu'on m'appelle par mon prénom. Nadya ça roule beaucoup mieux sur la langue... Bref, la vie d'un enfant esclave n'a pas été facile, surtout pas avec mon papa d'amour qui aimait un peu trop me frapper..." Elle soupire profondément. "Mais j'endurais, parce que chaque coup qu'il me portait, c'était un coup de moins qu'il portait à ma mère..."
Quelques personnes lui jetent des regards compatisants. Nadya cale le fond de sa chope avant d'en demander une autre à la serveuse de plus tôt. Elle lui claque une fesse au passage. Plusieurs hommes se mettent à rire et elle se retourne vers son public pour poursuivre son histoire avec un rictus amusé aux lèvres.
"Mon père représentait tout ce que je détestais de la Trinité. Le fanatisme, l'abus de pouvoir, l'intolérance et surtout, leur désir insatiable d'éradiquer toute forme de liberté. Toute ma jeunesse, j'ai cultivé une profonde haine pour l'homme qui me servait de père. Encore là, j'utilise le terme de façon très large, parce c'est ma mère qui s'est occupé de m'élever durant mon enfance. Les autres esclaves l'aidaient du mieux qu'ils pouvaient. Ils m'ont fait part de leur culture, leur langage. C'était d'ailleurs en mojat qu'on se parlait pour éviter d'être compris par nos maîtres. Pour en temps, ils étaient la seule famille que j'ai connu, mais ils savaient tous que je ne survivrais pas si je restais parmi eux. Ma mère le savait très bien, et c'est pour cette raison qu'ils ont planifié mon escapade..."
Sa nouvelle chope arrive finalement et elle prend une autre longue gorgée.
"Les esclaves ont passé des mois à voler ici et là quelques petits items qui allait servir à me faire sortir de la résidence à mon père. Une clé ici, un couteau là, quelques provisions, des vêtements et quelques crédits pour que je puisse avoir dequoi vivre pour quelques temps. Puis, la fameuse soirée arriva. Les esclaves performèrent chacun leur partie du plan, distrayant les gardes et mon père pendant que ma mère m'aidait à m'échapper de la maison. Arrivés à la grille, elle me fait passer de l'autre côté. J'ai essayé de la convaincre de venir avec moi, mais elle savait que je n'arriverais jamais à me sauver si nous étions deux. De plus, la maison au complet était tombée en alerte au moment où j'ai passé de l'autre côté de la grille. Avant qu'on se sépare, ma mère m'a prit la main et elle y a déposé son collier qu'elle portait toujours avec elle. Il s'agissait d'un pendantif d'une effigie de Calypso. Ses derniers mots avant que je parte furent: Que Calypso te garde, ma fille. Je t'aimerai même jusqu'au delà de l'éternité... Puis elle a disparu vers la maison et moi je me suis enfoncé dans l'obscurité de la nuit..."
"Avec une légion de Trinitaires qui me poursuivait, il me fallait une sortie de secour et il m'en fallait une le plus rapidement possible. Grâce à l'argent que ma mère et les autres esclaves avaient amassé, j'ai pu me procurer un allé simple vers l'astroport de Paradis. De là, je ne savais pas trop où j'allais aller, mais c'était un début. J'avais 16 ans à cette époque et je n'avais pratiquement rien à mon nom. J'avais besoin de me trouver un moyen pour m'éloigner définitivement de la Trinité et rapidement. Alors j'ai commencé à chercher des pilotes qui seraient prêts à m'emmener avec eux loin de Paradis, mais ce que j'ai trouvé fut bien meilleur..."
Son regard plane sur les yeux intrigués de son public un moment.
"Je trainais souvent près du port où tous les vaisseaux passaient, cherchant désespéremment quelqu'un prêt à me faire quitter cette damnée planète. C'est à ce moment que je l'ai vu... La femme la plus magnifique et la plus terrifiante que j'avais vu de toute ma vie: Erszebeth Alvarez."
Des murmurs s'élèvent auprès des spectateurs et un sourire amusé se dessine sur les lèvres de la métisse.
"Elle était accompagnée d'un homme que j'ai assumé devait être son second, ainsi que d'une jeune femme que j'aurais pu juré qui était son clone. La même chevelure blonde presque blanche, le même regard bleu glacial, mais ce qu'Erszebeth perdait en beauté à cause de son âge, la jeune femme avait en double. En effet, je ne pense pas avoir vu de femme plus belle que sa fille, Jezabel. C'est d'ailleurs à elle que j'ai parlé en premier. Je croyais qu'elle avait la début vingtaine alors du coup, je me suis senti plus à l'aise avec elle et je l'ai approché. La surprise lorsque j'ai su qu'elle avait presque trente ans!" Elle s'esclaffe. "Mais je lui ai expliqué que j'avais besoin de quitter l'astroport et elle m'a tout de suite présenté à sa mère. Je vais vous avouer qu'au début, Erszebeth me terrifiat. Elle est arrivée devant moi dans toute sa splendeur, m'a regardé avec un sourire hautain de la tête aux pieds et m'a demandé pourquoi j'avais besoin de partir aussi urgemment. J'avais tellement peur qu'elle me désintègre des yeux que je lui ai tout dit, à propos de ma mère, mon père, et le fait que je m'étais sauvé de lui. Je lui ai aussi parlé de mon désir d'être libre, mais aussi de mon désir de libérer ma mère ainsi que les autres esclaves qui m'avaient aidé à m'échapper... Je ne sais pas si elle a vu quelque chose en moi que moi je ne voyais pas, mais elle m'a proposé de rejoindre son équipage sur le Némésis. Son offre me semblait complètement surréelle pour moi. J'avais entendu quelques histoires ici et là au sujet du Némésis, mais rien de bien clair, sauf que j'en savais assez pour savoir que le Némésis c'était pas un navire que t'avais envie de croiser dans l'espace... et on venait de me proposer de faire partie de son équipage. J'étais à la fois excitée et terrifiée, surtout que je n'avais jamais envisagée de devenir pirate, mais le plus que j'y pensais, le plus que ça faisait du sens. Captivée par le charisme terrifiant d'Erszebeth et de sa fille, j'ai tout de suite accepté."
"La première fois qu'on m'a emmené sur le Némésis, je tremblais à la fois d'excitation et de peur. Je savais que je m'embarquais dans une aventure qui allait m'emmener aux quatre coins de l'univers connu et qui allait sans doute être dangereuse. Je n'avais aucun entraînement proprement parlant et je n'avais commis que des crimes mineurs depuis que j'avais quitté la maison de mon père. Mais aussitôt que j'ai traversé les portes du vaisseau, j'ai senti toute ma crainte s'évaporer. Je me sentais chez moi, un sentiment que je n'avais jamais connu avant ce moment-là."
"Jezabel et moi, nous sommes devenues instantannément amies. Malgré notre équart d'âge et nos caractères assez contraires, on s'entendait à merveille. Elle m'encourageait dans mes entraînements, me poussait toujours à dépasser mes limites. Je ne m'étais jamais senti aussi proche d'une personne avant de l'avoir rencontré... c'est encore le cas aujourd'hui."
Son regard se perd un peu dans le vide. Un léger sourire vient étirer ses lèvres. Puis elle secoue la tête légèrement et reprend son récit.
"Erszebeth est devenue comme une seconde mère pour moi. Certes, elle était dur avec nous, mais je savais qu'elle donnerait sa vie pour n'importe qui d'entre nous. Et puis j'étais tellement reconnaissante de la chance qu'elle m'a donné. Je le suis toujours d'ailleurs. Il n'y a pas un seul moment de ma vie où je ne reconnais pas la chance d'avoir pu faire partie de l'équipage du Némésis."
Elle colle son poing contre sa poitrine en baissant la tête.
"Mais ça n'a pas toujours été tout arc-en-ciel et paillettes sur le Némésis... Quand je suis arrivée à bord du vaisseau, je sentais déjà qu'il y avait énormément de tensions entre la capitaine et sa famille. Sa deuxième fille, Hannabeth, je n'ai jamais tout à fait compris pourquoi la capitaine la détestait autant. Pour Jezabel, j'ai toujours cru que c'était à cause de sa mère qu'elle répugnait autant sa soeur, et c'était peut-être le cas au début. La pauvre petite n'avait que son père sur qui elle pouvait compter. Moi, j'ai essayé de me tenir loin de cette affaire-là. Je me suis contenté d'être là pour Jezabel. Je ne posais pas de question et je laissais les choses prendre leur court... Puis, un soir, tout a pèté. Hannabeth et son père sont partis et ça a collé une méchante gifle à la figure de la capitaine. Si elle était sévère avec nous avant, elle le fut encore plus par après, mais je comprennais pourquoi. Son âme soeur l'avait abandonné pour quelqu'un qu'elle considérait indigne, une ordure à ses yeux, alors je ne lui en ai jamais voulu..."
"Mais une partie de notre capitaine était partie en même temps que son mari. Jezabel avait officiellement prit la place de son père au sein du vaisseau, et plus le temps avançait, plus elle était forcée d'assumer le rôle de capitaine aussi lorsque sa mère n'était pas en état de commander. Jezabel était une capitaine formidable. Je savais que s'il y avait quelqu'un que je devais suivre jusqu'à ma mort, ce sera elle. Elle avait tout le charisme et le charme de sa mère et même plus. Ce ne fut donc pas surprennant lorsque j'ai appris qu'un homme était tombé en amour avec elle. Je soupçonne qu'elle aussi en était très amoureuse, puisqu'elle passait beaucoup de temps avec lui. J'étais heureuse pour eux, surtout que je savais à quel point Jezabel voulait un enfant. Puis elle m'a annoncé qu'elle était enceinte de lui et je débordais de joie pour elle, mais je vous mentirais si je vous disais que je n'étais pas aussi un peu jalouse. Pas parce qu'elle allait avoir un enfant et pas moi, j'étais tout sauf prête à avoir des enfants à l'époque et je me considérais encore trop jeune pour commencer à penser à ça. Non, j'étais jalouse parce que son homme m'avait enlevé ma meilleure amie et que bientôt, son enfant aussi allait m'éloigner davantage de Jezabel. Comme je disais plus tôt, je ne m'étais jamais senti aussi proche de quelqu'un, alors le fait de potentiellement voir ma meilleure amie disparaître de ma vie me paraissait insupportable... Mais Ô que j'ai eu tort... Plutôt que de les rapprocher, la nouvelle de la grossesse à Jezabel fit complètement l'inverse. En une nuit, il disparut complètement dans le néant. J'étais furieuse... S'il y a bien quelque chose dans cet univers que je ne tolère pas, c'est qu'on fasse du mal à ceux que j'aime. Mais pire encore, en plus de l'avoir abandonné alors qu'elle était enceinte de lui, cette vermine a été vers une autre femme... Et devinez sur qui il avait jeté son dévolu. Oui, nul autre que la petite soeur que Jezabel méprisait autant, et je commençais moi aussi à voir pourquoi elle méritait autant de haine. Je vous jure, si j'étais tombée sur ce rat, il ne serait rien resté de son minable cadavre..."
"J'ai fait tout mon possible pour aider Jezabel à traquer cet homme. Je voulais le voir souffrir comme il l'avait fait souffrir, mais lorsque le moment était venu, j'ai laissé Jezabel s'en occuper elle-même. Elle refusait que je vienne avec elle de toute manière et j'étais assez intelligente pour comprendre qu'il ne fallait pas que je la dispute à ce sujet là. Lorsqu'elle est revenu au vaisseau après, j'ai senti comme un poids se lever de mes épaules. Durant les mois qui suivirent, j'ai supporté Jezabel au travers de sa grossesse. Certes, elle détestait que je m'en fasse autant pour elle. C'était une femme fière après tout, mais j'avais envie de prendre soin d'elle. Le père de son enfant n'allait certainement pas le faire, et j'étais sa meilleure amie. Ça me faisait plaisir de retrouver la complicité que je croyais que l'on allait perdre. Même que cela nous a rapproché davantage. Je l'ai supporté jusqu'à l'accouchement, et même après. Jezabel m'a nommé maraine à sa fille, Jillian. Je ne vais pas vous cacher que j'étais extrêmement fière de cet honneur. Jillian était une petite fille extraordinaire et je l'adorais comme si elle faisait partie de ma propre famille. Je suppose qu'à la fin, c'était un peu le cas..."
Son regard se perd de nouveau dans le vide alors qu'un nouveau sourire se dessine sur ses lèvres.
"La naissance de Jillian m'a rappelé à quel point la famille était importante, et donc j'ai envoyé une prière à Calypso pour qu'elle garde ma mère en sécurité. Je n'étais pas quelqu'un d'ouvertement religieuse, mais je n'enlevais jamais le collier que ma mère m'avait donné avant notre séparation. Une fois de temps en temps, j'envoyais mes pensées à Calypso, ne m'attendant pas à ce qu'elle me réponde. Sauf que ce soir là, j'ai entendu une voix dans mon sommeil. Elle m'informa de l'état de ma mère et des autres esclaves, et je me suis mis à rêvé de ce qu'ils avaient subi toutes ces années depuis mon départ. J'ai pris cela comme un signe que Calypso voulait que je sauve son peuple. J'avais déjà parlé de ma mère à Jezabel, mais quelques temps après la naissance de sa fille, j'ai confié à Jezabel que je devais aller libérer ma mère de mon père. Avec tout ce que j'avais appris et fais à bord du Némésis, j'étais confiante qu'avec l'aide de Jezabel, j'arriverais à libérer ma mère ainsi que les autres esclaves de mon père. Jezabel accepta presque aussitôt et ensemble, nous avons organisé une petite équipe pour aller à la rescousse de ma mère."
"Nous nous sommes rendus à Renaissance où mon père avait son manoir. J'avais détaillé le plus possible un plan de la maison et de la grille de sécurité pour Jezabel, ce qui l'aida à coordonner nos forces. Nous avons infiltré la maison plutôt facilement... trop facilement, d'ailleurs. En rejoignant le quartier des esclaves, nous avons remarqué que ma mère n'était pas là. Mon père avait l'habitude de la garder dans sa chambre, alors j'ai amené Jezabel avec moi et nous nous sommes rendus à la chambre de mon père."
"Je ne sais pas comment il a fait pour le savoir, mais mon père avait eu vent de notre arrivée à Renaissance, et évidemment, le connard nous avait laissé un petit 'cadeau' dans sa chambre, c'est-à-dire ma mère ligotée à une chaise couverte d'explosifs. Les autres esclaves avaient déjà été évacués. Folle de panique, j'ai manqué de me jeter vers elle, mais Jezabel m'a arrêté juste à temps. Si j'avais avancé d'un pas de plus, j'aurais déclenché les explosifs et nous serions tous mortes."
L'atmosphère était tendue dans la taverne. Tout le monde écoutait l'histoire de Nadya avec beaucoup d'intérêt.
"Tranquillement, nous avons navigué la pièce pour aller rejoindre ma mère. Je lui ai retiré le foulard qui lui bloquait la bouche et elle m'a dit:
-Idiote ! Je n'ai pas risqué ma vie pour que tu reviennes ici te tuer !
Je pense que si elle n'avait pas été attachée, elle m'aurait giflé sur-le-champ." Nadya s'esclaffe de nouveau. "Je lui assure que nous allons la sortir de là et que les autres esclaves sont déjà sains et saufs à l'extérieur du manoir. Mais nous manquions de temps. Un compte à rebours avait déjà débuté et il nous restait plus qu'une minute pour désactiver la bombe et sortir ma mère. Mais Jezabel et moi, nous ne sommes pas des informaticiennes. On ne savait pas quel fil couper. On ne connaissait rien des bombes. Mais Jezabel ne se laissait pas abattre aussi facilement, et d'un grand coup d'épée majestueux, elle coupa les cordes et les fils de la bombe d'un seul coup. Certes, c'était risqué. Je lui ai gueulé que nous aurions pu tous mourir, puis elle me pointa le compteur qui était figé à une seconde, ce qui m'a tout de suite calmé. Ma mère a put se défaire de ses cordes et nous nous sommes enlacées après toutes ces années passées loin de l'autre."
Un soupir de soulagement parcourt la salle.
"Suite à ça, Jezabel et moi avons ramené les esclaves à leurs clans respectifs. Ceux dont leur clan avait été erradiqué, comme ma mère, ont été accueillit dans d'autres clans. Jezabel me donna l'option d'aller vivre avec ma mère, mais je savais que ma place dans ce monde était sur le Némésis. Ma mère le voyait bien aussi et m'encouragea de rester auprès de Jezabel, me confiant qu'elle allait avoir besoin de moi pour les années à suivre. Ô comme elle eut trop raison... Le même soir où nous sommes rentrées de notre mission, Jezabel est allée visiter sa mère dans ses quartiers. Je ne sais pas exactement ce qui a été dit ce soir-là, mais Jezabel est sorti de la chambre de sa mère plus furieuse que je ne l'ai jamais eu auparavant. J'ai voulu l'arrêté pour lui parler, pour qu'elle me parle de ce qui était arrivé, mais elle m'a repoussé, m'a ordonné de la laisser tranquille. J'avais le coeur brisé, pas parce qu'elle avait si violemment refusé mon aide, mais parce que la dernière chose que je voulais c'était qu'elle souffre toute seule. Mais j'ai respecté son choix et je l'ai laissé tranquille. Je savais qu'elle viendrait me voir lorsqu'elle serait prête. Et comme de fait, elle est venue me voir plus tard, folle d'inquiétude. Je ne l'avais jamais vu aussi paniquée. Notre capitaine avait disparu durant la nuit et Jezabel venait d'apprendre qu'elle avait été capturée par la Trinité."
Nadya soupire profondément et elle cale presque toute sa chope de bière d'une traite, s'essuyant la bouche du revers de la main avant de continuer.
"Deux fois la Trinité s'en est prit à ma famille, et je soupçonne que ce ne sera pas la dernière. Jezabel m'avait expliqué qu'elle avait eu une dispute avec sa mère, mais elle refusait de me dire sur quoi. Elle me supplia de l'aider à trouver sa mère, mais au fond, elle n'avait pas eu besoin. Erszebeth avait été comme une seconde mère pour moi, j'aurais tout fait pour la libérer des griffes de la Trinité. Et c'est ce que nous avons fait. Nous avons tout essayé pour lui venir en aide, mais nous avons échoué sur toutes nos tentatives. L'impuissance face à la situation était écrasante. J'essayais de mon mieux de consoler Jezabel, de garder la flamme de l'espoir vivante, mais ce n'était pas évident... Finalement, après dix jours d'effort, la Trinité nous a vaincu, ordonnant l'exécution d'Eszebeth Alvarez."
Elle baisse la tête en fermant les yeux. Un silence de mort couvre toute la taverne. Certains imitent Nadya. Un moment de silence pour la grande femme qu'était Eszebeth Alvarez.
"J'ai voulu accompagner Jezabel à l'exécution de sa mère, autant parce que je voulais être là pour elle que parce que je voulais être la pour la femme qui m'avait sauvé des griffes de l'esclavagisme, mais elle avait refusé que j'y sois, prétendant qu'elle devait affronter sa mort seule. J'y suis allée tout de même, seulement pas avec elle. De l'autre côté de la foule, je l'ai aperçu. Elle n'était pas difficile à repérer, surtout pas pour moi. Jusqu'à la fin, Erszebeth est restée indomptable, avec une dignité et une classe sans limite, et juste avant de mourir, je l'ai vu tourner son regard vers sa fille, et j'ai senti mon coeur se fendre sous la réalisation qu'elle allait disparaître à tout jamais. Mon corps entier tremblait alors que j'essayais de retenir le torrent d'émotions qui menaçait d'exploser à n'importe quel moment. Quelques larmes rebelles glissèrent le long de mes joues, se mêlant aux goutes de pluie qui tombaient sur mon visage. Après être resté un long moment sans bouger, j'ai quitté la place pour aller retrouver Jezabel, mais elle n'était nul part en vue. N'arrivant pas à la trouver, je suis rentrée au vaisseau pour l'attendre."
"J'ai toujours été beaucoup plus ouverte sur mes sentiments que Jezabel. Lorsque je suis rentré au Némésis, je me suis effondré presque aussitôt, et j'ai hurlé toute ma douleur, toute ma tristesse. Je ne contrôlais plus du tout mon corps qui tremblait incontrôlablement sous toute l'émotion que j'avais retenu jusqu'à ce moment là. Si je souffrais autant pour la mort de notre capitaine, j'imaginais pas ce que Jezabel devait ressentir... J'ai passé les prochains jours dans ma chambre, me noyant d'hommes et de femmes et d'alcool, essayant vainement de trouver ce que j'aurais pu faire de plus pour prévenir ce qui venait de se passer. Puis Jezabel est arrivée dans ma chambre. Avec la mort de sa mère, elle allait assumer le rôle de capitaine du Némésis et elle avait besoin d'un second, poste qu'elle m'offrit sans même y penser deux fois. J'ai accepté l'honneur presqu'immédiatement aussi. Il n'y avait rien que je voulais plus que d'être là pour elle, à ses côtés, et de m'occuper de la famille qui m'avait accueilli il y a si longtemps avec les bras grands ouverts."
La métisse pousse un long soupire soulagé et se pose au fond d'une chaise.
"Et voila où j'en suis rendu! Seconde à la capitaine la plus extraordinaire, la plus terrifiante et la plus sexy de l'univers." Elle rit doucement. "Sur le vaisseau le plus redouté de toute la galaxy, us against the world, forever and ever..."