Caractère
Fascinée par la Vie, Sixtine n’existe que pour la Science. Elle possède un caractère déterminée et fait tout pour arriver à son but. Vive d’esprit et curieuse insatiable, elle est du genre dynamique.
Fière de sa faction, de son haut niveau intellectuel, et nantie depuis sa naissance, la biologiste est parfois arrogante.
Parfois trop franche, elle reste tout de même sympathique et facile à vivre. Par convenance ou par besoin, elle sait faire des efforts avec les autres, et s’adapter. Elle arrive à se contenir, bien se tenir, et être patiente quand il le faut, mais peut finir par craquer et déballer de façon brute ce qu’elle a sur le cœur.
Portée par l’utopisme de la jeunesse, elle rêve d’égalité et de liberté. Elle est heureuse de débarquer dans un endroit si cosmopolite, impatiente d’épancher sa soif de découvertes. Cela dit, elle n’est jamais vraiment sortie de son cocon avant de se retrouver dans le système Dorado ! Et se trouve être une personne inexpérimentée. Sa candeur l’emmène à l’encontre de bien des surprises, bonnes comme mauvaises.
Absorbée par l’érudition, elle n’a jamais eu de relation autre que professionnelle, ou ses parents... Elle garde un goût amer d’avoir été forcée par son père à tirer un trait sur eux. Comme s’il l’avait trahie, rejetée. Pour le moment, elle ne regrette pas son choix car elle réalise son rêve, mais se trouve en proie à sentiment nouveau : la solitude. Même s’il est probable qu’il regrette d’avoir été si catégorique pour la retenir, elle, est persuadée d’avoir été reniée. Elle en garde au fond une certaine souffrance. Bien que traumatisée, cette déconvenue lui a permis de prendre confiance en elle, émancipée du joug paternel, et éveillé le besoin d’être désormais la seule aux commandes de ses faits et gestes. Depuis, elle ne supporte plus qu’on la traite comme une enfant, et ne se laisse pas marcher sur les pieds.
Histoire
C’est sur Valenos que naquit la petite Sixtine. Enfant chérie d’un couple d’administrateurs assez bien placés de l’Union Corporatiste, elle avait été désirée et conçue avec amour. Elle vint au monde en pleine forme, et au bon endroit : il faisait bon vivre sur sa planète natale. Tout le monde nageait dans l’opulence. Ici, on s’occupait bien des enfants. On n’en faisait pas beaucoup, mais on mettait un point d’honneur à bien les éduquer. Ainsi demeura-t-elle enfant unique.
Son enfance fut heureuse.
Ses parents, comme beaucoup d’autres parents, s’investissaient corps et âme dans leur entreprise et n’avaient guère de temps à lui consacrer. Alors comme beaucoup d’autres enfants de Valenos elle apprit rapidement que la vie c’était le travail, d’abord à la crèche puis à l’école, et trouva réconfort dans un goût prononcé pour l’apprentissage. Dure à la tâche, elle ne dévia pas un instant de cette route toute tracée : apprendre, persévérer, réussir. Et elle était douée pour ça. Elle dévorait les bouquins, retenait ses leçons avec aisance.
Sixtine ne posa aucun problème au cours de son éducation. C’était la petite fifille idéale qui rendait bien fiers ses géniteurs. Son père prenait parfois le temps de l’emmener balader. C’est qu’il fallait l’aérer un peu cette petite toute palote ! Et elle, accrochée à sa main ou papillonnant le nez en l’air au gré des vents, prit goût à ces trop rares moments de bonheur partagé. Elle s’émerveillait face à la beauté de la Nature. Chaque plante, chaque être vivant, la fascinait. Et lui s’enorgueillait de la voir si vive d’esprit et curieuse.
Les années passèrent, elle devint adolescente. Sa passion demeura et son caractère s’affirma.
Elle s’entendait plutôt bien avec ses parents. La vérité c’est qu’elle ne les voyait pas souvent. Tous deux avaient fini par troquer le temps qu’ils lui donnaient plus jeune avec du temps à rester au travail.
Sa mère était presque devenue une étrangère. Elle ne se donnait que rarement une minute pour aller l’embrasser avant de partir tôt le matin, ou en rentrant tard le soir. Les seules choses qu’elle avait tenu à lui inculquer étaient l’acharnement et la récompense.
« L’excellence est toujours récompensée ! »
Cette petite phrase était la seule dont Sixtine se souvenait vraiment de sa part.
Sa mère se contentait de vérifier les bulletins scolaires - toujours admirables - de sa Fierté comme elle l’appelait, et c’était déjà pas mal. Et elle versait chaque mois sur son compte une somme d’argent rondelette, inutile carotte au bout du bâton pour cette enfant dévouée.
« Avec ça tu feras des grandes choses plus tard. »
Son père quant à lui, figure aimante mais stricte, avait également pris de la distance. Le temps c’est de l’argent ! Parfois il la faisait quand même espionner. Mais là encore c’était inutile : Sixtine ne s’intéressait pas à l’oisiveté. Pas de fête, pas de bêtise, pas de petit-ami. Rien.
Juste ses livres, et ses sorties au charme bucolique de temps à autre.
Elle trimbalait toujours avec elle un carnet et un crayon. Elle griffonnait ce qu’elle voyait et avait développé un don pour le croquis.
Rêveuse, elle projetait de s’évader, s’imaginait des mondes exotiques aux confins de l’Univers. Quels chemins pouvaient bien prendre la Vie, là-bas...
Les années passèrent jusqu’à ce qu’elle devienne une adulte.
Sans surprise, elle suivit avec brio un cursus universitaire. D’abord généraliste, elle se spécialisa par la suite. Son dada, c’était l’écologie et la biologie des organismes.
Elle était à présent une jeune femme déterminée, à la matière grise solide.
Elle avait pris connaissance de l’existence du système Dorado des années auparavant en cours d’Histoire et Géographie, et ne pouvait s’empêcher de fantasmer à l’idée de se rendre sur Renaissance. Elle avait étudié sa faune et sa flore. Le fait d’apprendre à distance lui laissait un goût de pas-assez. Ici elle étouffait. Elle s’ennuyait.
Elle décida de se lancer dans l’écriture d’une thèse, qu’Anthema accepta de financer. Les mois, les semestres se succédaient, et sa thèse piétinait. Elle devait convaincre sa hiérarchie de la laisser partir au cœur de son sujet d’étude sans quoi elle n'avancerait pas. Ce fut rapidement accepté ! Il y avait tant à découvrir, et sa société se voulait tête de proue de la recherche scientifique. Ils consentirent même à lui attribuer une rente mensuelle afin de subvenir à ses besoins.
Son ticket de sortie était enfin là.
Cela prit encore quelques mois pour que son départ soit orchestré.
Elle attendit ce qu’elle jugea être le bon moment pour l’annoncer à son père...
Le cristal de sa bouteille d’alcool précieux tinta quand il la reposa dans le bar.
« Tu n’iras PAS ! C’est beaucoup trop dangereux. »
Il se retourna vers elle, verre à la main. Il but sobrement une gorgée puis traversa leur beau salon ultra-moderne et chiquement décorée. Il se planta devant elle, lui lança un regard qui se voulait tendre mais ferme, et continua.
« Ce n’est pas un endroit pour les gens de ta catégorie. C’est un repère de dépravés. Les seuls qui vont là-bas sont ceux qui n’ont pas le choix, ou qui n’ont plus rien à perdre. »
Sixtine croisait les bras, la moue obstinée. Il continua, d’une voix tendre mais condescendante, parlant comme s’il s’adressait à une enfant.
« Tu n’as rien à faire dans ce repère de bouseux... »
Face à l’air butée de sa fille, il reprit en agitant ses bras et son verre.
« Et tu vas vivre comment là-bas hein ? Tu as réfléchi à ça ?! »
Elle plissa les paupières, entrouvrit ses lèvres puis dodelina de la tête, l’air de dire t’es bête ou tu le fais exprès ?.
« ... J’en ai, de l’argent !!! »
Le visage de son père se renfrogna, désespéré à l’idée de voir partir son petit trésor.
« Cet argent qu’on a mis de côté pour toi c’était pour que tu deviennes quelqu’un ! Que tu achètes une résidence, que tu montes ta propre entreprise ! ICI ! »
Elle soupira lourdement, agacée, et se mit à faire les cent pas, bras croisés.
« Mon seul avenir... C’est LÀ-BAS ! Et puis Anthema me soutient !!! Devrait pas y avoir de problème ! »
À bout d’arguments, il pointa un doigt sévère dans sa direction.
« C’est hors de question ! TU AS TOUT À PERDRE LÀ-BAS !!! Tous tes sous ! Ton innocence… Ta vie ! »
Elle maintint son regard, sourcils froncés. Hélas pour lui, les chiens ne font pas des chats. Sa petite chérie était devenue grande, et elle décocha.
« A quoi ça rime ?... Qu’est-ce qu’elle vaut, ma vie ici ? Solitaire, aseptisée... À part un gros paquet de Crédits ?... »
Il sentait que les rennes lui avaient échappé. Elle qui avait été si parfaite, si obéissante jusque là. Son visage s’assombrit. Il ne supportait pas l’idée qu’elle s’en aille pour gâcher sa vie à Dorado. Dernier ultimatum, espérant la retenir, il annonça d’une voix solennelle :
« Si tu pars, ne reviens pas... »
La jeune femme, les traits déformés par la contrariété, le toisa quelques instants puis sortit précipitamment en claquant la porte.
Elle courut dans sa chambre et s’enferma rageusement à double tour. Elle avait toujours fait ce qu’on lui demandait. Et on lui refusait la seule chose qu’elle se soit jamais permise de demander. Les poings serrés, la respiration forte, elle n’arrivait pas à comprendre. Un quart de siècle de contrainte et voilà que la digue cédait, emportant tout sur son passage. C’était l’insurrection.
Tout traversa sa tête excepté ton père t’aime et il s’inquiète pour toi. Ce sale %#§ !... Tortionnaire !... Égoïste !...
Elle jeta une valise sur son lit et commença à y jeter pêle-mêle ce dont elle aurait besoin. Des fringues, des livres, bloc-notes, stylos, crayons, …
Elle se calma graduellement, tout en ajoutant des choses qui pourraient lui servir.
Le silence tomba.
Elle se mit à trembler. Ce n’était plus de la colère. C’était de la peur. Si tu pars, ne reviens pas... Choisir entre vivre pour ses parents et s’oublier, ou vivre pour elle et les perdre à tout jamais. Pourquoi la forçait-il à prendre une telle décision ? Au fond, elle avait toujours été seule, alors un peu plus ou un peu moins... En proie au doute, elle s’approcha de la fenêtre. Elle les aimait, elle ne voulait pas leur dire adieu.
Le cœur serré, son regard se perdit dans une myriade d’étoiles.
Et le doute s’envola.
Le regretterait-elle ? Seul l’avenir le dirait.
Quelques heures plus tard, en ce matin de Bercer 111, un des shuttles de la maisonnée fila à travers la pénombre silencieuse et fraîche du dehors…
Quelques semaines plus tard, elle atterrit à Vanguard.